Une rétrospective consacrée au peintre Nicolas de Staël, figure de la scène artistique d’après-guerre, a ouvert ses portes à Paris, avec des œuvres rarement ou jamais montrées. Provenant de “65 prêteurs privés en France, Suisse, Grande-Bretagne, Belgique et aux États-Unis et d’une quinzaine de prêteurs publics, 25 % des œuvres n’ont jamais été montrées en France”, indique Pierre Wat, commissaire de l’exposition avec Charlotte Barat-Mabille.
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“On peut en ajouter à peu près autant qu’aucun d’entre nous trois n’a jamais vues exposées”, précise-t-il. Des premiers voyages de sa jeunesse à ses derniers mois de production frénétique, 200 dessins, fusains gommés, tableaux, gravures et carnets sont exposés au Musée d’Art Moderne de Paris (MAM). Parmi eux, un bouquet de Fleurs abstrait, réalisé en 1952, moment où les collectionneur·se·s états-unien·ne·s s’arrachent son travail, que “même Gustave ou Anne, sa demi-sœur aînée, n’ont jamais vu”, ajoute M. Wat. Il voisine avec Trois pommes en gris, cubiques, toutes en matière, absorbant la lumière environnante.
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Né en 1954, son fils, Gustave de Staël, avait un an au moment du suicide de son père. Il explique l’avoir “découvert” et “compris” à travers son œuvre, décrivant un personnage public qui évoluait dans une grande solitude pour travailler. “Je pense qu’il a dit tout ce qu’il avait à dire, puis il est parti. C’est un homme très heureux et accompli pour cela. Vous ne pouvez pas éternellement vous demander de vous dépasser intérieurement en vieillissant”, affirme Gustave de Staël.
Qu’il s’agisse de paysages, de natures mortes ou de ses rares personnages, Pierre Wat décrit de son côté “un homme intégralement dédié à la peinture, sa vie durant, dont le maître-mot est la recherche, l’expérimentation et l’exigence, d’une liberté absolue”. Il a “constamment changé sa manière de peindre, évoluant dès 1942 radicalement vers l’abstraction”, ajoute Mme Barat-Mabille.
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“1 100 tableaux”
Gustave de Staël chiffre à “1 100 tableaux” les œuvres de son père qui “demeurent” et “autant de dessins, réalisés en moins de 15 ans” des années 1940 à la fin de sa vie. Le peintre en a détruit d’innombrables, notamment ses œuvres de jeunesse. Parmi celles exposées, figure le Parc des Princes, toile monumentale abstraite de “200 kilogrammes”, réalisée en 1952 après l’un des premiers matches de football nocturnes à Paris.
Vendu 20 millions d’euros à un particulier, il y a une dizaine d’années, selon Mme Barat-Mabille, il voisine avec l’une de ses études préparatoires à l’huile sur carton, en très petit format, et un Parc de Sceaux provenant de la Phillips Collection acquise en 1953. Même période, même lumière, puisée dans le sud de la France où le peintre s’est établi à la fin de sa vie : Les Indes Galantes, deux silhouettes en rose et bleu sur fond noir, gris et bleu, et les Bouteilles dans l’atelier, provenant d’une collection particulière états-unienne.
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Né à Petrograd (Saint-Pétersbourg) en 1914, Nicolas de Staël a fui la révolution russe bébé avec ses parents, morts de misère et de maladie en Pologne. Recueilli par un industriel en Belgique, il s’est formé à la peinture contre l’avis de ses parents adoptifs. Engagé dans la légion étrangère en 1939, il a été démobilisé en 1940 et s’est établi à Nice, puis à Paris.
Il est resté “un voyageur perpétuel”, dit M. Wat. Si son voyage au Maroc a constitué le “fondement de sa peinture” et de sa “clarté”, selon le commissaire, son voyage en Sicile, en 1953, a radicalisé ses couleurs. Une série de tableaux paysagers géométriques, peints autour d’un point de fuite, mêlent avec profusion les oranges, violets et verts inspirés d’Agrigente et de Syracuse. Ils rayonnent de joie et font partie des pépites exposées.
Konbini, partenaire du Musée d’Art Moderne de Paris.
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