À voir et re-voir. Grease est de ces bijoux du 7e art qu’on se doit d’avoir regardé. Rythmé par la romance du duo iconique que formaient à l’écran John Travolta et Olivia Newton-John, ce long-métrage 100 % feel good s’est hissé au rang de film culte à grand renfort de refrains endiablés, et de chorégraphies toniques. Avec pour toile de fond une teen-Amérique 50’s un poil stéréotypée.
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Réalisé par Randal Kleiser et adapté de la comédie musicale homonyme, Grease sort aux États-Unis courant juin 1978. Son succès est retentissant. Au total, l’œuvre cumule un peu moins de 400 millions $ de recettes en salles et totalise quelque 5 700 000 entrées dans les cinémas français.
Côté tubes, l’album regroupant les chansons du film s’écoule à 28 millions d’exemplaires dans le monde. Quant au mémorable « You’re the one that I want, oh honey ! », le single-phare trouve 1,8 million d’acheteurs, rien qu’en France.
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Une idylle irrésistible
Mais quelle histoire a bien pu susciter pareil engouement ? Celle, bien connue, d’un amour contrarié entre Sandy Olsson (Newton-John) et Danny Zuko (Travolta). La première est une fille de bonne famille, âgée de 18 ans. Le second, un ténébreux blouson de cuir. Tous deux s’étaient rencontré à l’été 1958. Mais leur passion bourgeonnante avait été brutalement interrompue, alors que la jeune femme devait s’en retourner dans son Australie natale après la période estivale.
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Ce flirt adolescent aurait pu s’arrêter là. Mais c’était sans compter sur un coup du sort. Voici que, par un heureux concours de circonstances, Sandy intègre en dernière année le lycée où étudie son Jules. Lorsqu’ils se retrouvent, Danny fait mine devant ses amis de ne plus rien éprouver – fierté de bad boy oblige. L’intrigue suivra le cheminement de leurs retrouvailles amoureuses. Le tout ponctué de plusieurs battles musicaux, réminiscences fleur bleue et chorégraphies fiévreuses. Jusqu’à un bouquet final, à jamais inscrit au Panthéon du rétro-kitsch.
Un jalon du film musical
Le plus célèbre des musical movies du XXe siècle ne part pas de rien. Il est issu d’une tradition dont on décèle les prémices aux origines du cinéma. Thomas Edison, l’un des pères du 7e art, rêvait déjà fin XIXe de coupler le son d’une voix et l’image d’un artiste. « On pourrait ainsi assister à un concert du Metropolitan Opera cinquante ans plus tard, alors que tous les interprètes auraient disparu depuis longtemps », avait-il déclaré.
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Cette possibilité verra le jour avec la sonorisation d’un art longtemps resté muet, depuis le début du cinéma (Le Salut de Dickson, William Dickson, 1891) jusqu’au premier film sonore (Don Juan, Alan Crosland, 1926). En même temps que la sonorisation se développe, le chant s’impose. Dans les années 1930 fleurissent des œuvres où plusieurs artistes issus du musical hall et du café-concert donnent de la voix.
Cette dynamique, qui sert à la fois l’industrie du disque et celle du cinéma, pousse certains réalisateurs à adapter les triomphes des comédies interprétées à Broadway dès les 30’s. Le procédé trouve un âge d’or dans les années 60-70, avec le succès de titres tels que West Side Story (1961), Cabaret (1972) et… Grease.
Sans réinventer la comédie musicale, cette oeuvre porte le genre aux nuées en misant sur une love story charmante, une BO rock mâtinée de boogie-woogie, et d’impressionnantes performances dansées – parmi lesquelles on ne peut pas ne pas citer les déhanchés de Travolta. Le film marquera un tournant, en pavant la voie au sous-genre des musical movies adressés aux teenagers, comme Footloose (1984) ou Dirty Dancing (1987).
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Les États-Unis des 50’s, en clichés
Si Grease a tant séduit outre-Atlantique et demeure culte, c’est notamment parce qu’il brosse une vision idéalisée de l’Amérique des années 50. Les adolescents y sont beaux, sémillants, insouciants. Vêtus de jeans moulants, robes colorées et blousons vintage, ces jeunes font des virées en décapotables, mâchent du chewing-gum, dégustent leurs milk shakes en fast-foods. Ils sentent l’huile de moteur, le parfum bon marché et la gomina (traduction française du titre Grease).
Au lycée, plusieurs archétypes de bandes se toisent. Les « Pink Ladies », qui accueillent la jeune Sandy, mais aussi les virils « T-Birds », dont Danny est le charismatique leader. Les unes font montre d’une retenue toute bourgeoise, les autres d’une impétuosité gouailleuse. Chacun son rôle.
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Une polémique, et un prequel dans les tuyaux
Les stéréotypes véhiculés à l’image, s’ils n’ont pas manqué d’enchanter le public de l’époque, ont récemment été pris pour cible sur les réseaux sociaux. D’aucuns ont fustigé le « sexisme » du film, en pointant du doigt certaines scènes jugées machistes. Sans oublier de critiquer, au passage, le fait que l’héroïne se métamorphose en bad girl pour complaire à son aimé.
Sur la défensive, Olivia Newton-John était montée au créneau auprès du Guardian en octobre dernier pour y expliquer : « C’est juste l’histoire d’une fille qui aime un type, et qui pense que si elle fait ceci, il l’aimera. Et lui pense que s’il fait cela, elle l’aimera. Je trouve ça assez réel. Les gens changent l’un pour l’autre ». « C’était une histoire d’amour amusante », a-t-elle sobrement résumé.
Que les nostalgiques qui s’accordent à la vision de l’actrice se réjouissent. Après un Grease 2 (1982) fraîchement accueilli, l’univers du chef-d’œuvre originel reviendra sur grand écran sous la forme d’un prequel. Baptisé Summer Loving, ce projet annoncé en 2019 par la Paramount devrait s’axer sur la rencontre entre Sandy et Danny. Autant dire que si la puissante société de production hollywoodienne ambitionne de renouveler l’évènement mondial qu’à constitué Grease, la barre est haute.