En voilà, une bonne nouvelle : à bientôt 40 ans, l’imagination foisonnante de Baptiste Lecaplain n’est toujours pas tarie – loin s’en faut. Le comédien révélé par Bref en fait la démonstration flamboyante avec son troisième one man show, Voir les gens. Un spectacle pétrit d’absurde, comme à l’accoutumée, dont la tournée avait débuté courant 2020. Trois ans plus tard, la capture vidéo de ce show jubilatoire nous parvient aujourd’hui, avec un atterrissage en fanfare sur Prime Video. Focus.
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Lecaplain et son bestiaire sous LSD
Il a bouffé un lion, Baptiste Lecaplain, pour avoir autant un tel peps ? Oui, mais pas que. “Je vais faire des trucs loufoques, je vais faire des animaux qui parlent”, avertit notre comédien au préambule de son spectacle. En puisant avec maestria dans son arsenal comique habituel, le voici donc qui la joue fable animalière. Pas version La Fontaine, non. Plutôt celle de Looney Tones en plein trip d’acide.
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L’humoriste interprète dans la franche débauche d’énergie (et de voix) qu’on lui connaît le rôle d’un tigre effrayé par des lasers que brandit… Une gazelle. Puis place à la rencontre incongrue d’un frelon mafioso, rackettant une abeille ouvrière à l’appui de son “bras” droit. Soit une guêpe addict au melon, et à la gâchette facile, façon Joe Pesci de Casino. Délirant, dites-vous ? 100%. Mais que les plus cartésiens se rassurent. Cette scène, comme d’autres, est aussi l’occasion de poser de vraies questions. “L’abeille sait-elle qu’elle meurt, après avoir piqué ? J’pense pas”. À méditer.
“L’affiche de ma vie”
Fanny Ardant revient dans le temps, toujours la clope au bec. Un arbre au masochisme assumé supplie qu’on lui “scie le tronc”, l’inventeur du martinet – conçu pour dépoussiérer les habits, mais aujourd’hui utilisé comme outil de torture sexuelle – danse la salsa avec Lucifer, dans le carré VIP des enfers. Plus barrés les uns que les autres, ces tableaux s’enchaînent à un rythme effréné avec, au casting, une galerie de personnages improbables, truculents. Sacré carnaval.
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À travers ce défilé haut en couleur, Baptiste Lecaplain prouve, s’il était besoin, qu’il excellence au jeu de l’imaginaire en roue libre. À chaque “sketch” on se dit que, non, il ne pourra pas pousser le WTF plus loin – sauf que si, il peut. Mais là où Voir les gens surprend vraiment, ce n’est pas tant dans cette démonstration de force, puisque voilà des années que l’humoriste fait des étincelles, grâce à ses récits a minima saugrenus. Non, si l’humoriste nous prend de court, c’est plutôt du côté de séquences moins outrancières, où il se met à nu.
Exit les jeux de rôle, place aux confidences. En cela fidèle à l’esprit du stand up, et entre deux vannes sur la sodomie, Baptiste Lecaplain quitte les rivages coutumiers de l’extravagance pour glisser des bribes de récits plus personnels (oui, l’enchaînement thématique sodomie-vie perso, fallait l’oser).
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Des doutes sur les nouveaux modes de parentalité – Monsieur a deux filles, bravo à lui – aux difficultés de cultiver une sexualité conjugale lorsque les gosses dorment à côté, en passant par ces vilains “réflexes de vieux cons” qui bourgeonnent à l’approche de la quarantaine, l’humoriste confie tout. Jusqu’au savoureux récit du naufrage d’une aventure extra-conjugale, qui se clôturera par une scène de ménage en apothéose. “L’affiche de ma vie”, résume l’humoriste. Tandis que de notre côté, évidemment, ça se bidonne à gorge déployée.
Avec l’âge, celui qui sera en 2024 à l’affiche du Nous, Leroy de Florent Bernard (La Flamme, Bloqués…) aux côtés Charlotte Gainsbourg glisserait-il vers un registre plus intimiste, plus sensible ? Tout porte à le croire. Et on en redemande !