Déjà contestée en pleine cérémonie, l’attribution du César de la Meilleure réalisation à Roman Polanski a continué samedi de susciter protestations et mécontentement, du monde du cinéma au mouvement féministe, jusqu’au sein du gouvernement.
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“Ils voulaient séparer l’homme de l’artiste, ils séparent aujourd’hui les artistes du monde”, a réagi samedi auprès de Mediapart l’actrice Adèle Haenel, qui avait quitté la salle Pleyel vendredi soir en lançant “la honte !”, après l’annonce du César de la Meilleure réalisation.
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Cette récompense a été décernée à Roman Polanski pour J’accuse, thriller historique sur l’affaire Dreyfus distingué par deux autres César (costumes et adaptation) lors d’une cérémonie boycottée par le cinéaste franco-polonais et son équipe.
Avant le début de la cérémonie, quelques centaines de manifestants – surtout des femmes – avaient protesté aux abords de la salle Pleyel contre le cinéaste multirécompensé, devenu pour beaucoup un symbole des agressions sexuelles impunies alors qu’il est visé par plusieurs accusations de viol.
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Adèle Haenel, qui incarne un nouvel élan de #MeToo en France depuis qu’elle a accusé en novembre le réalisateur Christophe Ruggia d‘”attouchements répétés” quand elle était adolescente, a estimé que ce que les membres de l’Académie des César “ont fait” vendredi “soir, c’est nous renvoyer au silence, nous imposer l’obligation de nous taire”.
“J’aurais dû quitter la salle”, a abondé la comédienne Sara Forestier sur son Instagram, disant ne pas en avoir dormi “de la nuit” et avouant n’avoir pris qu‘”après coup” la “mesure de la terreur de la situation”.
Sur le même réseau social dans la nuit, l’humoriste Florence Foresti, maîtresse de la cérémonie, s’était dite “écœurée”.
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“On se lève. On se casse. On gueule. On vous emmerde”
Le ministre de la Culture, Franck Riester, présent à la soirée, a redit samedi sur Europe 1 que “célébrer” Roman Polanski était un “mauvais signal”, ajoutant qu’il “pouvait comprendre” la réaction “de colère” d’Adèle Haenel. “La difficulté avec cette remise de César […] à Roman Polanski, c’est qu’on ne célèbre pas simplement l’œuvre, on célèbre aussi l’homme”, a-t-il commenté.
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“Je pense que l’Académie des César doit se transformer, ne doit pas oublier qu’à chaque fois qu’un César est remis, il y a certes la reconnaissance artistique mais il y a un message aussi qui est envoyé à la société”, a insisté le ministre.
La secrétaire d’État à l’Égalité femmes-hommes, Marlène Schiappa, a elle réagi au palmarès dans une tribune publiée samedi par Libération, intitulée “Pour que le cinéma reste une fête…”.“Nombreux sont ceux qui, passionnés de cinéma, ont prononcé ou pensé cette phrase hier soir”, a-t-elle écrit, déplorant l’injonction à “ne pas gâcher la fête”.
Et de préciser :
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“Vous ne voulez plus de cris, de manifestations, de scandales, de départs de la salle ? Soutenez les femmes, cessez de les empêcher de facto de créer et de prendre pleinement part à cette fête, à cette industrie. Ne couvrez pas ceux qui sont accusés de viols. Pensez aux victimes. Passées et actuelles. Croyez-les. Soutenez-les.”
La romancière Virginie Despente a aussi dénoncé l’attribution du César du Meilleur réalisateur à Roman Polanski, affirmant dans une tribune publiée aussi dans Libération :
“Il n’y a rien de surprenant à ce que l’Académie des César élise Roman Polanski meilleur réalisateur de l’année 2020. C’est grotesque, c’est insultant, c’est ignoble, mais ce n’est pas surprenant. Quand tu confies un budget de plus de 25 millions à un mec pour faire un téléfilm, le message est dans le budget.”
Et de conclure :
“On se casse. Faites vos conneries entre vous. Célébrez-vous, humiliez-vous les uns les autres tuez, violez, exploitez, défoncez tout ce qui vous passe sous la main. On se lève et on se casse […]. On se lève et on se casse. C’est terminé. On se lève. On se casse. On gueule. On vous emmerde.”
De son côté, le collectif #NousToutes a estimé que l’Académie des César, en récompensant Roman Polanski, “a littéralement craché aux visages des victimes de violences pédocriminelles, au visage des victimes de violences sexuelles et, plus largement, au visage de millions de femmes de ce pays”.
“Nous serons dans la rue dimanche 8 mars (journée internationale des droits des femmes) pour dire à nouveau que nous voulons en finir avec toutes les violences sexistes et sexuelles. Et que ni l’Académie des César ni ceux qui les soutiennent ne nous arrêteront”, a prévenu l’organisation féministe dans un communiqué.