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Dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances 2019, les sénateurs ont adopté un amendement porté par le président du groupe Rassemblement démocratique et social européen, Yvon Collin, afin de supprimer en partie la niche fiscale des journalistes.
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Ce n’est pas la première fois qu’Yvon Collin tente de s’en prendre à cette réduction d’impôt. Il y a près de cinq ans jour pour jour il faisait voter un amendement similaire par le Sénat afin de supprimer cet abattement fiscal pour les journalistes gagnant plus de 4 000 euros net par mois. Moins sévère, il s’agit aujourd’hui d’en priver les journalistes qui gagnent plus de 6 000 euros net par mois, soit 93 510 euros par an, explique dans le détail Public Sénat. Cela concerne peu de journalistes.
Mais de quoi parle-t-on au juste ? Et pourquoi les journalistes bénéficient-ils de cet abattement fiscal ?
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7 650 euros d’abattement par an
En pratique, les journalistes peuvent enlever 7 650 euros par an au montant total présent sur leur déclaration d’impôt. Pour en bénéficier nul besoin de posséder la carte de presse, il suffit de justifier d’une “activité de journalisme” précise Le Monde qui avait déjà étudié la question en 2013. Dans les faits, les journalistes qui payent moins de 7 650 euros de contribution par an sont exonérés d’impôt.
C’est une survivance d’un système élaboré en 1934. À l’époque il s’agit de soulager une centaine de professions dont les frais professionnels sont jugés élevés. On parle du transport, de la nourriture ou encore du matériel. Cela va du chef d’orchestre jusqu’à l’ouvrier de bonneterie en passant par le journaliste, précise Le Monde. On dit aussi que c’est une aide aux patrons de presse pour les inciter à embaucher. Les journalistes bénéficient alors d’un abattement spécifique de 30 %.
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Seulement voilà, quelques décennies plus tard, l’opportunité de maintenir une telle ristourne pose question. Aussi, l’idée de l’abolir revient régulièrement sur la table. En 1996, Alain Juppé avait décidé de priver les journalistes – comme les autres professions de cette liste – de cet avantage. Face à la colère des premiers, des négociations ont finalement abouti deux ans plus tard au système tel qu’on le connaît aujourd’hui.
Les “journalistes, rédacteurs, photographes, directeurs de journaux et critiques dramatiques et musicaux” sont autorisés à déduire 7 650 euros du montant de leur impôt, dans le cadre du calcul de l’impôt sur le revenu. “Un abattement s’ajoutant à la déduction forfaitaire de 10 % appliquée au titre des dépenses courantes des salariés, dont le montant n’a jamais été révisé depuis”, précise Capital.
50 à 70 millions par an
Vingt ans plus tard, on peut se poser la question de la pertinence de maintenir en place un tel système. D’autant que les niches fiscales coûtent cher – plus de 100 milliards d’euros en 2018, précise Les Échos, une “dérive” pointée du doigt par la Cour des Comptes.
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CICE, dons à des associations, emploi d’un salarié à domicile… les “dépenses fiscales” sont plébiscitées par les divers gouvernements depuis une dizaine d’années, notamment parce qu’elles sont populaires. Elles sont en effet perçues comme une réduction d’impôt. Il y en a 477 en tout selon Le Figaro.
Combien coûte celle des journalistes ? Entre 50 et 70 millions par an, selon les calculs. Si les sénateurs ont fait voter un amendement pour en limiter les effets, il y a tout lieu de penser qu’il sera retoqué devant l’Assemblée nationale, comme ce fut déjà le cas en 2013. Selon Public Sénat, le gouvernement y est fermement opposé. Or il jouit d’une majorité solide dans la chambre basse.
Qu’en disent les principaux intéressés ? Si maintenir cette niche fiscale au nom des frais professionnels ne fait plus vraiment sens, ses défenseurs arguent qu’elle permet aux journalistes de faire face dans une profession de plus en plus précaire. Si elle est perçue comme un privilège, il y a tout lieu de penser que tôt ou tard cette niche fiscale disparaîtra.
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