Mardi 24 novembre, une ambiance “absurde et inquiétante” régnait à la cour d’appel de Lyon selon la journaliste Julie Hainaut, cyberharcelée par des néonazis suite à la diffusion d’un article en 2017.
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Injures racistes, sexistes et avocat d’Alain Soral
En septembre 2017, Julie Hainaut rapportait dans un papier du Petit Bulletin les propos des tenanciers d’un nouveau bar à Lyon. Ces derniers expliquaient notamment avoir “cherch[é] à retranscrire l’esprit colonial, un esprit à la cool, une époque où l’on savait recevoir, une période sympathique où il y avait du travail”. Suite à la publication de l’article, la journaliste est devenue une cible privilégiée du site néonazi Démocratie Participative qui se revendique “le site le plus raciste de la fachosphère“.
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Dans une interview accordée à Konbini news en février dernier, Julie Hainaut revenait sur le cyberharcèlement dont elle a été victime ainsi que sur ses conséquences éprouvantes.
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L’enquête ouverte, suite à un dépôt de plainte, a permis l’identification de Sylvain C., un homme qui a été condamné pour avoir partagé sur Facebook un article du site Démocratie Participative qualifiant Julie Hainaut de “pute à nègre” et de “femelle négrophile“. Condamné en première instance à six mois de prison avec sursis pour injures racistes et sexistes, il a ensuite fait appel de la décision.
C’est la raison pour laquelle, mardi 24 novembre, une nouvelle audience s’est déroulée, pendant près de deux heures, devant la cour d’appel de Lyon. Contrairement à la première audience, le prévenu s’est cette fois présenté accompagné de son nouvel avocat, Damien Viguier, conseil d’Alain Soral et de Dieudonné.
“C’était très lunaire et inquiétant“, raconte Julie Hainaut.
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Un prévenu sans empathie ni regrets
Si Julie Hainaut confie être soulagée d’avoir pu parler, d’avoir été entendue et écoutée, elle décrit néanmoins une audience qui lui a semblé durer une éternité. La répétition et l’énumération des insultes proférées à son encontre ont été éprouvantes mais pas que pour la victime. En effet, l’avocat général, après les avoir rappelées pour les besoins de l’audience, s’en est excusé auprès de la journaliste.
Le prévenu n’a quant à lui présenté aucune excuse et n’a, semble-t-il, pas exprimé de regrets. Pour Julie Hainaut, qui rappelle à quel point le cyberharcèlement est traumatisant et dangereux notamment parce qu’il entraîne silenciation et invisibilisation des victimes, les “propos du prévenu étaient absurdes et dangereux“.
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L’avocat général a demandé la confirmation du jugement de première instance et l’arrêt sera rendu le 17 décembre prochain.
Un combat contre la normalisation de la haine
Une parole décomplexée sur Internet, c’est ce qui “menace la liberté d’expression, la liberté de la presse, et puis les gens, aussi, accessoirement.”
Inquiète d’une normalisation de la haine, la journaliste confie qu’elle n’a “pas envie de [s]’habituer à une insulte, quelle qu’elle soit“. “Il y a une confusion entre la liberté d’expression et la libération de la parole : la liberté d’expression comprend des limites notamment celle de ne pas inciter à la haine et de ne pas tenir de propos injurieux“, poursuit-elle. “Je refuse qu’elle soit banalisée, qu’on puisse insulter, menacer en toute impunité. Je refuse de m’y habituer“.
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Depuis trois ans, Julie Hainaut n’a reçu aucun soutien (ni financier, ni juridique, ni même moral) de la part de sa rédaction restée silencieuse depuis le début de l’affaire. Mais, malgré tout ce qu’elle a enduré depuis la publication de cet article (et pour lequel elle a été rémunérée 60 euros brut), lorsqu’on lui demande si elle le regrette, la journaliste n’hésite pas une seule seconde : “Non ! Je le referais 10 milliards de fois !“