“J’ai senti mon bassin craquer, comme une branche cassée en deux” : Lobna a subi une expression abdominale lors de son accouchement

Publié le par Constance Derouin,

Lobna Egenschwiller

Alors que cette violence obstétricale est interdite par la Haute Autorité de santé depuis 2007.

A voir aussi sur Konbini

Lobna Egenschwiller a 30 ans et trois enfants. En 2019, elle subit une expression abdominale lors de l’accouchement de son deuxième enfant. Jusqu’à son entrée en salle d’accouchement, elle marchait sans problème. Au moment des poussées et alors que les contractions s’intensifiaient, la fille de Lobna ne sortait pas. La gynécologue a donc eu recours à une ventouse, sans succès.

Publicité

Après un signe de tête à la sage-femme qui la secondait, la sage-femme est alors montée sur un marchepied, et a appuyé de tout son poids sur le haut du ventre de Lobna, au niveau de l’estomac. Elle vomit alors une première fois. La soignante réitère deux fois, au cours desquelles le bassin de sa patiente craquera.

Publicité

Sous péridurale, elle ne ressent pas de douleurs instantanément. Après une “hémorragie de la délivrance”, la jeune mère remonte en chambre, et commence à ressentir de vives douleurs au niveau du bassin. Elle ne peut se mouvoir dans le lit, ni bouger ses jambes. Elle est incapable de marcher.

L’expression abdominale, manipulation qui consiste à appuyer sur le ventre d’une femme durant son accouchement, est désormais considérée comme une violence obstétricale, et est bannie des pratiques gynécologiques depuis 2007 par la Haute Autorité de santé.

Publicité

Lobna restera dix jours à l’hôpital, sans explications du corps médical sur son incapacité physique à marcher et cette hospitalisation prolongée. Les imageries demandées par la patiente ne sont pas effectuées directement. C’est trois mois après son accouchement que Lobna découvre l’ampleur des blessures causées par l’expression abdominale.

L’acte a provoqué une disjonction symphysaire : l’écartement des os droit et gauche du bassin de Lobna, et également la fragmentation d’os dispersés dans son bassin. Les ligaments du bassin ont également été rompus au cours de l’expression abdominale.

Après son accouchement, Lobna n’a pas pu porter sa fille, ni s’occuper de son fils aîné, en bas âge : “Je n’arrivais même pas à me laver, à marcher, je n’arrivais pas à aller aux toilettes. J’étais dépendante de mon mari tout le temps. Avoir un enfant, c’est déjà un chamboulement. Même quand tout se passe bien, un post-partum est toujours compliqué en soi.”

Publicité

Psychologiquement, la jeune mère reste incomprise, le corps médical ne parvenant pas au cours des premières semaines à mettre de mots sur sa situation physique. Elle se sent seule, privée de sa liberté de mouvements : “Je m’obstinais à allaiter ma fille, c’était la seule chose que j’arrivais à faire, il fallait que mon mari la pose sur moi et vienne la récupérer”.

Trois ans et demi après les faits, Lobna Egenschwiller est toujours diminuée physiquement. En procédure juridique contre la clinique où elle a accouché, elle attend une opération qui pourrait stabiliser son bassin et lui permettre de retrouver une marche plus fluide, même si la jeune femme sait qu’elle ne retrouvera pas son physique pré-partum : “Je sais que j’aurai des séquelles à vie.”

Publicité