Tiraillé entre son envie de documenter ce moment si particulier de nos existences et sa volonté de respecter le confinement, le photographe Bichara est sorti dans les rues parisiennes à deux reprises, appareil photo au poing. Lors de ses deux excursions – durant lesquelles il s’est bien entendu tenu à distance de toute autre personne –, l’artiste a immortalisé la capitale vidée de sa cohue habituelle.
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Les escaliers menant au Sacré-Cœur sont, pour une fois, déserts. Tout comme Beaubourg, les Halles, Pigalle ou encore la place de Clichy, des lieux pourtant connus pour leur foule de touristes, de Parisien·ne·s, de badauds et de travailleur·se·s, jour comme nuit. À la Concorde, seule la paire d’yeux d’une mannequin affichée sur une façade toise la place habituellement noyée par le trafic routier.
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Bichara a commencé par photographier les rues dénudées de son quartier en allant faire ses courses, la semaine dernière. Le jeune homme, qui s’était déjà confiné de lui-même avant l’annonce du président, raconte son ébahissement devant un Paris tout à fait étranger :
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“C’était tellement vide que je me suis demandé la dernière fois que j’avais pu voir la ville comme ça, et la réponse est : jamais. Même au mois d’août, à 5 heures du matin, je n’avais jamais vu ça.”
L’expérience est inédite, “inexplicable” même, avance Bichara, qui s’est décidé à sortir son appareil pour la postérité, pour documenter une période historique, non sans s’assurer de prendre “mille précautions”. “Je ne voulais surtout mettre personne en danger, ni les autres, ni moi.”
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Afin de mettre en lumière ce vide qui prend toute la place dans les rues, Bichara a utilisé son flash (dont il use déjà dans le reste de son travail plutôt dédié aux portraits) : “J’aime le flash parce qu’il ravive les couleurs. Je n’aime pas l’ombre et le flash efface les ombres, détaille-t-il. C’est comme si tu allumais un endroit vide, il n’y a personne à photographier, donc [le flash] donne encore plus d’éclat.”
Une série qui fourmille de questionnements
L’artiste a pris ces images quelques jours après la déclaration d’Emmanuel Macron. Entre quelques joggeur·se·s et passant·e·s, Bichara est tombé sur quelques situations cocasses, notamment trois personnes baladant, au bout d’une laisse… leur chat.
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Si les quelques promeneur·se·s solitaires faisaient preuve d’une certaine méfiance les un·e·s envers les autres, Bichara a tout de même ressenti une forme de solidarité dans les rues, pendant ces moments si particuliers. Depuis quelques jours, remarque-t-il lorsqu’il va faire ses courses, les rues sont de plus en plus clairsemées : “On entend les oiseaux comme jamais auparavant, il n’y a plus le brouhaha des voitures, ça me rappelle le silence des villages du Sud.”
Le vide que donne à voir Bichara dans ses images est d’autant plus poignant qu’il témoigne d’un effort collectif, visant à endiguer l’épidémie due au coronavirus. Le jeune homme pensait étoffer sa série en immortalisant la place de la Bastille, la Défense et le Champ-de-Mars, mais il se sera arrêté avant, taraudé par sa “légitimité à sortir” pour rapporter sa documentation visuelle.
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À force de questionnements, le projet est désormais achevé ; il permet cependant de garder une trace de longues journées printanières, pendant lesquelles Paris fut vide. Si Bichara a fini par sortir documenter sa ville, qu’il ne serve pas d’exemple. Le temps est au confinement et ces images de Paris sont à regarder depuis le confort de vos salons !
Vous pouvez retrouver le travail de Bichara sur son compte Instagram.
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