Quand on se laisse prendre par le tourbillon culinaire de la capitale, on oublie parfois à quel point le jeune chef Matthias Marc a déjà marqué de son empreinte la gastronomie à Paris. Une étoile rapidement décrochée dans son repaire, Substance, une galaxie de disciples auxquels il a ouvert la voie pour des aventures diverses – notamment Sylvain Courivaud au sein de l’excellent restaurant Braise – et sa table d’appoint ou “taverne moderne” Liquide. Cette dernière, devenue en quelque temps une référence pour sa formule du déjeuner imbattable et ses créations du dîner toujours très bien senties, a récemment vu éclore un nouveau chef, Aurélien Royer.
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Celui-ci, qui semble déjà avoir trouvé tout son épanouissement dans les cuisines ouvertes de Liquide, a récemment dévoilé une nouvelle création dans laquelle nous avons été parmi les premiers à plonger la fourchette : un kebab de pleurotes absolument déroutant. Et, dès la sortie du repas, on a ressenti le besoin de vous en parler. Une création née dans l’esprit du chef Aurélien Royer mais qui s’inspire d’un plat qui a déjà largement fait ses preuves. “Après que le Noma et René Redzepi ont dévoilé le kebab de céleri et truffe à la braise, l’équipe de Septime (Bertrand Grébaut et Valentin Burteaux) a commencé à élaborer de multiples brochettes végétales dont une aux champignons sauvages”, se souvient-il. “J’ai été absolument fasciné par ce plat et j’ai décidé de l’adapter dans un autre style.”
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Puisqu’il existe autant de manières de créer un plat qu’il existe de chefs, Aurélien Royer, lui, avait une base de travail très claire dans son esprit. “L’idée initiale était de reprendre les marqueurs d’un grand classique de la cuisine française, le poulet sauté chasseur, en le mixant avec un plat de la street food dont je raffole, que chaque personne de notre génération a au moins mangé une fois dans une nuit : le kebab.”
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“Ce plat correspond très bien à ce qu’on essaye de faire aujourd’hui à Liquide, à savoir une cuisine gourmande mais précise basée sur le produit, marquée de références, qu’elles soient françaises ou internationales, en passant par des grands classiques retravaillés autant que de la street food.”
Une sensation de carné
Si on avait été bluffés, il y a quelques mois, par un kebab végétal très surprenant, cette expérience chez Liquide aura encore plus repoussé les limites de l’illusion du carné et les frontières de l’umami. Une sensation troublante, une fois les pleurotes en bouche, qui a le don de venir chambouler tous nos solides repères. “Les champignons restent des produits que j’affectionne particulièrement, situés entre le végétal et l’animal, ils ne sont néanmoins ni l’un ni l’autre”, confie Aurélien Royer. “En leur apportant une cuisson à la braise, on se rapproche assez vite des saveurs qu’une viande pourrait avoir.” Un aléa, donc, plutôt qu’une volonté de se rapprocher d’une saveur carnée à tout prix :
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“Je pense que cette sensation de carné est essentiellement culturelle car les Français n’ont pas l’habitude de consommer des légumes cuits au barbecue et qu’ils évoquent plutôt des souvenirs carnés sans pour autant que ceci soit une volonté de notre part.”
Mais alors, comment la recette fonctionne-t-elle ? Pour cette composition, le chef a choisi des pleurotes gris, pour plusieurs raisons : “Je les trouve délicieuses, abordables, avec un goût boisé, de noisettes et presque sucré. De plus, une fois grillées et cuites, elles gardent une très belle texture”, dit-il. Aussi, la saison du pleurote est relativement longue, “un atout”, et sa forme est “parfaitement adaptée pour reproduire une broche de kebab”. Mais cette recette peut être réalisée avec presque tous les champignons : “Cèpes, lactaires, pieds-de-mouton, champignons de Paris, girolles, morilles… Tout dépend de la saison, des goûts et du budget de chacun.”
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Pour augmenter “le goût de caramélisation de la brochette” et pour que les champignons se débarrassent de leur eau de végétation, le chef et sa brigade les grillent dans du beurre avec du thym, du laurier et une gousse d’ail. “On les pique ensuite sur la broche, et on la rôtit au barbecue, tout en la laquant de jus de volaille à l’estragon”, poursuit le chef, qui précise qu’il existe également une version végétarienne. À table, la brochette est servie avec des pousses de moutarde assaisonnées avec du vinaigre d’estragon et une huile de noix, ainsi qu’une sauce béarnaise “afin de ramener encore plus de gourmandise”. Et pour couronner le tout, les équipes de Liquide travaillent, par ailleurs, à une sorte de naan à la farine de châtaigne qui viendrait accompagner ce kebab pas comme les autres… que l’on vous recommande très chaudement.
Liquide
39, rue de l’Arbre Sec (Paris 1er)
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