À quinze jours de sa cérémonie consacrant les nouvelles stars, le Michelin a remis ses notes salées, rétrogradant un restaurant trois étoiles, celui de René et Maxime Meilleur, en Savoie (La Bouitte), a annoncé le directeur du Guide rouge à l’AFP. “C’est surprenant que ce soit la seule table à perdre une troisième étoile”, décrypte pour l’AFP Franck Pinay-Rabaroust, rédacteur en chef du média culinaire Bouillant(e)s. “C’est une maison familiale et elles sont peu en France à en avoir trois, est-ce que cela veut dire qu’il faut des moyens démesurés ou des fonds étrangers pour maintenir trois étoiles ?” poursuit-il.
Publicité
L’expert y voit “un mauvais signal envoyé à des maisons indépendantes et c’est dommage pour la dimension humaine et familiale et pour ces chefs engagés et réguliers”. “C’est un moment délicat”, concède Gwendal Poullennec, directeur international des Guides Michelin. “Pour certains, je tiens à m’y rendre en personne, c’est ce que j’ai fait” chez les Meilleur, développe le responsable, quinze jours avant la cérémonie de remises des étoiles à Tours.
Publicité
La Bouitte est un restaurant de montagne situé dans les Trois Vallées, à Saint-Martin-de-Belleville. Il est dirigé par un duo composé de René, le père, et Maxime, le fils. “Ici, tout est imaginé en famille, puisque mère, fille, belle-fille et gendre travaillent ensemble en salle et à l’intendance”, décrivait le Michelin sur son site internet. “Cette année, malheureusement, on est sortis de la piste. Ce soir, comme à notre habitude, toute la famille Meilleur est déjà au travail pour retrouver le frisson de la troisième étoile, et donner le Meilleur de nous-mêmes”, a réagi auprès de l’AFP la famille de chefs.
“Coup de pied aux fesses”
Au total, vingt-huit établissements étoilés ont été révisés à la baisse lundi, un trois étoiles, un deux étoiles (l’Auberge du Cheval Blanc du chef Pascal Bastian, en Alsace) et vingt-six ont perdu leur unique étoile, dont douze en raison d’un changement de chef ou d’un mouvement d’équipe. “C’est pas agréable à entendre”, a commenté auprès de l’AFP Nicolas Gautier, chef du restaurant Nature, à Armentières (Nord).
Publicité
“On a ouvert un nouvel établissement en septembre, l’Auberge de la Grive, à Trosly-Loire, dans l’Aisne, et on y est beaucoup, et même en étant en place avec notre équipe chez Nature, on savait qu’on prenait un risque”, explique-t-il. Nicolas Gautier savait aussi que “ça ne pouvait pas plaire forcément à tous y compris au Michelin, et on accepte fort volontiers et on comprend aussi”. “Il suffit de regarder nos chiffres et nos retours clients et il n’y a pas à rougir d’avoir perdu une étoile, quand on reçoit une étoile, on doit accepter de la perdre.” “Et ça peut même mettre un coup de pied aux fesses”, conclut le chef qui a prévu simplement de passer la soirée en allant boire “un bon coup”.
Séisme
Le guide fait chaque année la pluie et le beau temps dans le milieu de la gastronomie. En 2023, les rétrogradations du Michelin avaient provoqué un séisme, avec notamment la perte de la troisième étoile pour les stars Guy Savoy, à Paris, et Christopher Coutanceau, à La Rochelle. Élu meilleur chef du monde pour la sixième fois consécutive en novembre 2022, Guy Savoy était détenteur de trois étoiles depuis 2002. Christopher Coutanceau avait, lui, obtenu son troisième macaron juste avant le premier confinement en 2020.
Publicité
Cette année, le directeur du Michelin note même une “baisse nette et sensible des établissements avec révisions à la baisse, avec pourtant un contexte remarquable en raison de difficulté de recrutement et surtout d’une année de grave inflation”. À noter, enfin, que le restaurant doublement étoilé Sur Mesure, à Paris, est retiré de la sélection, après le départ de son chef, Thierry Marx, et la mise en place d’un nouveau projet avec une nouvelle équipe.