Éliminée aux portes de la demi-finale, Sarika s’en va sans regret, fière de son parcours. Peu sûre d’elle, la native de Compiègne a connu des débuts compliqués. Le sentiment d’illégitimité qui la tétanisait s’est peu à peu estompé et le changement de brigade aura été une véritable libération pour la cuisinière de 28 ans.
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Arrivée dans la cuisine sur le tard, Sarika s’est réorientée à l’âge de 26 ans après des études en gestion et marketing. C’est à Lille qu’elle fera son apprentissage, dans le restaurant gastronomique L’Arc. CAP en poche, elle passe un bac professionnel accéléré en apprentissage au Clarence, un restaurant étoilé de Lille. C’est en parallèle de cette année qu’elle s’inscrira au concours Objectif Top Chef, dont la victoire lui offrira une place dans la brigade de Philippe Etchebest.
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Konbini | Tu participes à Objectif Top Chef sans grandes attentes, est-ce que c’était également le cas pour Top Chef ?
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Sarika | Top Chef, c’était que du bonus, il s’est passé très peu de temps entre les deux concours. Au quotidien, je me mets beaucoup la pression, et je me suis vite rendu compte que sur Top Chef, fallait pas du tout que je fasse ça. Ça a été très dur au début.
Il y a un moment où tu t’es sentie illégitime ?
Oui, clairement. Je me suis beaucoup remise en question au début de Top Chef. Parce qu’entre les deux concours, il y a eu un gros gap. Ça a été très dur, j’ai totalement perdu confiance en moi sur le début du concours. C’est au fil des épreuves que je me suis rendu compte que j’avais des forces qu’il fallait que j’exploite. Ça a été un gros travail. De toute ma vie, je ne me suis jamais autant remise en question que sur Top Chef.
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Quand est-ce que tu as compris que tu étais capable d’aller aussi loin ?
Je m’en suis rendu compte quand j’ai changé de brigade et que j’ai commencé à gagner des épreuves en solo. L’apprentissage avec le chef Pairet m’a fait un grand bien. C’est là que j’ai compris que je n’étais pas moins légitime qu’un autre candidat. Sur ça, il a fait du très bon boulot.
Dans Objectif Top Chef, tu étais avec Philippe Etchebest, et pendant une grande partie de Top Chef également. Tu l’as vécu comment, le changement de chef de brigade ?
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Ça a été très dur. Quand on attend le verdict avec César, je me rends compte que soit je rentre chez ma mère, soit je change de brigade. Après le résultat, ce qui m’a fait un grand bien, ce sont les mots du chef Etchebest. Il m’a dit : “Écoute, Sarika, moi je t’ai connue sur Objectif Top Chef, pour l’instant tu n’as pas réussi à montrer de quoi tu étais capable. C’est à toi maintenant de te dire que c’est une deuxième chance et que tu vas pouvoir faire tes preuves auprès de Paul Pairet.” Je suis revenue le lendemain en me disant : “OK, j’ai eu une deuxième chance, je n’en aurais peut-être pas une troisième, il va falloir que je mette les bouchées doubles.”
Ça a été une libération ?
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Ça a été deux coachings totalement différents. Quand je suis arrivée dans la brigade du chef Pairet, j’ai réussi à performer sur l’épreuve du marché avec rien. Il m’a dit : “Non mais Sarika, si tu arrives à faire des trucs comme ça avec que dalle, je pense qu’on peut aller très loin ensemble.” Il a aimé ma créativité et ma façon de construire les assiettes. Il voulait avant tout que je prenne du plaisir sur les épreuves, et ça a pas mal marché.
Sur la dernière émission, tu pensais être en demi-finale. Tu vois Danny revenir, retour en quarts. Il se passe quoi dans ta tête ?
Je suis clairement au bout de ma vie. Le matin même, j’étais au téléphone avec des potes et mon mec, je leur disais : “Putain, truc de ouf, demi-finale, je peux sauter maintenant, ce n’est pas grave.” On ne l’avait vraiment pas vu arriver. Forcément, on redoutait le moment où d’anciens candidats allaient revenir pour réintégrer le concours. À chaque nouvelle épreuve, on se demandait quand est-ce qu’ils allaient revenir. Puis les semaines s’enchaînent, on est plus que quatre, plus que trois, et on se dit : “Il n’y aura pas de retour possible, ils ne vont pas les réintégrer aussi tardivement.”
Ce matin-là, on arrive, je vois quatre plans de travail, et là, je me dis : “Oh non, il ne va pas se passer ce qu’il se passe.” On nous explique, et à ce moment-là, je pense que ça va être Jérémie ou Carla, les derniers éliminés. À aucun moment je me dis que c’est Danny. Puis je comprends qu’il a fait sauter tout le monde et qu’on va avoir chaud aux fesses.
Ça a changé ta façon d’aborder la cuisine, Top Chef ?
Oui et non. J’ai beaucoup appris, ma cuisine a évolué, j’arrive à mieux construire une assiette, je vois davantage les éléments futiles. J’ai appris à simplifier ma cuisine.
Tu pourrais la définir aujourd’hui ?
Honnêtement, je me cherche encore, c’est vraiment une cuisine axée sur les produits de la mer. J’ai été formée dans des maisons qui mettaient en valeur les poissons, les fruits de mer, les crustacés. J’ai clairement une touche asiatique parce que j’ai été biberonné à la nourriture asiatique. J’aime bien travailler le produit, l’amener dans mon univers de part des épices, des saveurs, des techniques de cuisson. Mais elle va encore évoluer, ma cuisine.
Pendant le concours, plusieurs fois tu es dos au mur, tu as l’impression que tu n’y arriveras pas, et finalement, tu t’en sors. Tu la tiens d’où, cette capacité à rebondir ?
Ça me vient clairement de mon éducation. Je n’en parle pas souvent, dans ma famille on n’est pas très démonstratifs. Mes parents ont vécu la guerre au Cambodge, la famine. Quand ils sont arrivés en France, ils ont tout fait pour qu’on ait une bonne éducation, une bonne situation, une vie stable. J’ai été élevée à la dure, il fallait performer à l’école, ne pas avoir trop d’amis. Du coup, ça m’a forgé un sacré caractère.
Tu as enchaîné Objectif Top Chef et Top Chef. Tu aurais aimé aller plus loin, mais est-ce que ça t’a fait du bien de sortir de la routine des concours ?
Au moment où je me fais éliminer et que Stéphane me demande comment je me sens, je me dis : “Purée, ça fait du bien.” Ça fait six mois que je ne dors quasiment plus, que je ne pense qu’au concours. Honnêtement, sur le moment, ça a été un gros soulagement. Sur les dernières semaines, dans ma chambre d’hôtel, je dormais avec la lumière allumée et mon carnet à côté de moi parce que des fois, je me réveillais et je notais mes idées.
Ce n’est pas frustrant de sortir sur une bouchée préparée à la va-vite pendant une autre épreuve ?
La bouchée éliminatoire, c’est un truc hyper dur. Pendant l’épreuve, tu te demandes ce que tu fais. Est-ce que tu te focus sur la bouchée éliminatoire et tu mises tout dessus ? Est-ce que tu essaies quand même de vivre l’épreuve ? Sur l’épreuve de Stéphanie Le Quellec, j’hésite à laisser tomber l’épreuve pour me focus sur une bouchée de ouf. Mais je me suis dit : “Non, c’est Stéphanie Le Quellec quand même, je vais essayer de lui faire plaisir, sinon la honte.” Mais ouais, c’est hyper frustrant, parce qu’il faut savoir gérer le temps.
C’est quoi la suite pour toi ?
Là, ça fait deux semaines que je suis cheffe pour la toute première fois. Je fais une résidence de deux mois dans le 17e à Paris. Je découvre le vrai métier de chef, comment gérer un service, un staff, un planning, comment faire toute une carte, et surtout je m’éclate à faire la cuisine que j’aime. À chaque nouvelle carte, j’ai peur d’être trop clivante, et finalement, les gens qui viennent manger sont trop contents. Et après, je vais sûrement profiter des retombées de Top Chef. Dans une semaine ou deux, je fais un quatre mains avec Carla et je fais pas mal d’événements par-ci, par-là.