Chez AlainPaul, la marque qui invite le ballet dans le fashion, les ballerines ont des talons et la poésie devient sexy

Publié le par Flavio Sillitti,

© Lucas Tombolini pour AlainPaul

Après une première collection remarquée, la maison AlainPaul continue d’assurer son statut de marque à suivre en rendant hommage au passé de danseur du créateur.

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Du 26 février au 5 mars dernier, dans les rues de la capitale, les fashions ont paradé pour la sainte Paris Fashion Week, à l’affût des tendances de l’hiver prochain. Les nouvelles pièces à s’arracher se sont vues dévoilées dans des shows parfois grandiloquents, parfois élégants, mais toujours aussi captivants.

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Si, chaque année, ce sont les grandes maisons qui attirent le gratin et l’attention des médias du monde entier, c’est aussi sur les petits nouveaux que les yeux se sont braqués cette saison, et notamment sur quelques newcomers qui nous ont tapé dans l’œil. Parmi eux, AlainPaul, qui revenait présenter sa seconde collection au théâtre du Châtelet.

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En octobre 2023, à l’occasion de son tout premier défilé, le jeune créateur avait déjà donné le ton, en proposant une ligne aux codes déjà bien définis et au thème précis : le ballet. Né à Hong Kong et installé en France en 1997, Alain Paul s’inscrit en 1998 à l’École nationale supérieure de danse de Marseille, et entame une éducation façonnée par la rigueur et la discipline de la danse contemporaine.

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S’il se lance ensuite dans une carrière dans la mode, notamment au sein des maisons Vetements puis Louis Vuitton, c’est à son passé de danseur qu’il dédie la première collection de sa marque éponyme AlainPaul, cofondée avec son mari Luis Philippe en 2023. Le premier défilé d’octobre dernier investissait déjà le théâtre du Châtelet, avec une vue dramatique et spectaculaire sur les balcons et les fauteuils d’orchestre du public, alors que le défilé et les invité·e·s prenaient place sur la scène. Cette fois-ci, lorsqu’on pénètre l’antre du mythique lieu parisien, on s’aperçoit que l’atmosphère est différente.

Des rideaux cloisonnent la scène et les structures lumineuses du plafond sont baissées pour participer à cette impression de rétrécissement. Pas de grandiloquence ou de mégalomanie pour ce second défilé, la focale est sur les détails. Même la première partie de la bande-son du défilé joue sur ce côté épuré et captivant, sorte de métronome débridé ou de percussions frénétiques de baguettes — certainement un son propre au monde du ballet, qui nous échappe. L’immersion est totale.

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Pour son Show 2, dans le cadre de la Paris Fashion Week automne-hiver 2024, le créateur creuse plus loin dans son inspiration et tente de transformer le mouvement même du danseur ou de la danseuse (notamment celui retrouvé dans le ballet Lamentation de la danseuse américaine Martha Graham en 1930) en pièces à porter. C’est évidemment d’une poésie touchante.

Les pièces phares de la maison, qui reprennent directement les codes, les coupes et les patrons des tenues d’entraînement ou de scènes propres au monde du ballet, sont retrouvées ici dans des pièces qui épousent le corps des mannequins, dans des matières qui font effet comme le cupro, fibre textile semi-synthétique produite à partir de la cellulose de coton et déjà retrouvée sur la première collection, mais aussi des couleurs séduisantes, comme un délicat rose pâle ou un bleu roi élégant, exhaussé par les jeux de lumière projetés dessus.

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Les mouvements du ballet de Martha Graham sont traduits dans des coupes audacieuses et poétiques, qui traduisent les différentes postures de la ballerine ou du danseur, que ce soit dans un plissé retourné dans le dos du mannequin pour symboliser la cambrure, dans un voile délicat qui rejoue le lâcher d’une main qui s’élance ou dans un col “figé par le temps” qui exprime la rigueur et la droiture de chaque geste.

Tout a une symbolique, rien ne semble laissé au hasard, mais rien ne semble trop réfléchi non plus. Dans toute la discipline qu’impose une telle inspiration, AlainPaul se laisse le luxe de la spontanéité et de l’instinct, et on retrouve le côté surréaliste de sa première collection (marquée par des pantalons et des jupes à porter comme des hauts) dans cette collection également.

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Il s’exprime par ces écharpes qui semblent extraites de manches de costumes, ces cuissardes à talons qui se mêlent aux ballerines classiques en bout de pied ou encore ce côté imparfait retrouvé sur l’agencement de pièces élégantes qu’on aurait tendance à retrouver parfaitement ajustées ailleurs, mais qu’on laisse volontairement libres ou ballantes ici, en clin d’œil à la tenue du danseur, débraillée par l’effort. C’est beau, c’est fort, c’est poétique et c’est sexy, et ça n’annonce que du bon pour la suite d’AlainPaul.