La ville de Lyon a deux passions : prouver qu’elle est la véritable capitale gastronomique du pays et s’énerver contre ceux qui oseraient dire le contraire. Héritière d’une histoire culinaire très marquée, Lyon aime aussi clamer sa fierté d’une gastronomie éclectique, entre “bouchons” traditionnels, spécialités charcutières et cuisine bourgeoise.
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Si la viande et les protéines animales tiennent une place importante dans ce patrimoine, cela n’empêche pas quelques exceptions à la règle. Et pour cause, c’est bien un restaurant lyonnais qui a raflé, en 2020, le titre de “meilleur restaurant végétarien du monde”. Au fond, cette distinction n’est pas si étonnante si l’on prend un peu de recul sur l’évolution culinaire de Lyon depuis quelques années.
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De nombreux chefs sont venus y proposer une nouvelle cuisine, plus responsable, plus végétale aussi, inspirée par la grande révolution de la “jeune cuisine” à l’œuvre à Paris et dans les grandes capitales gastronomiques à travers le monde. Parmi eux, le jeune chef Adrien Zedda est devenu un étendard de cette nouvelle génération. À la tête des cuisines du restaurant Culina Hortus depuis un peu plus de trois ans, il travaille sur une carte entièrement végétarienne, de l’entrée au dessert.
Alors que je me baladais à Lyon, le hasard d’une annulation de réservation m’a offert la chance de pouvoir, enfin, m’attabler dans ce restaurant dont on m’avait déjà dit, à plusieurs reprises, le plus grand bien. Depuis quelque temps, le chef se concentre sur un menu unique, accessible et copieux, qui offre au client une immersion complète dans son univers. Cette formule magique, qui lui fera peut-être obtenir prochainement une étoile méritée, permet de saisir tous les codes, la complexité et la richesse d’une cuisine végétale qui vient balayer les innombrables clichés auxquels on l’a trop souvent réduite.
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“Adrien Zedda n’a peut-être pas trente ans, mais il peut déjà se considérer comme l’un des meilleurs chefs de légumes au monde. Chez Culina Hortus, il transforme les légumes en un véritable festin avec une créativité exceptionnelle, ce qui donne des plats raffinés, bien équilibrés, sains et surtout délicieux”. Voilà comment Frank Fol, fondateur du concours qui venait de sacrer la table “meilleur restaurant du monde”, avait salué le travail d’Adrien Zedda. Le chef lui avait alors répondu, sans attendre. “Ce prix récompense notre régularité, notre implication et notre amour du travail bien fait. Les végétaux m’inspirent par leur diversité de variétés, de goûts, de couleurs, de textures”.
S’il peut y avoir des saisons plus colorées et plus ou moins emballantes que d’autres en matière de légumes, le soir où je me suis mis à table était optimal – on célébrait tout juste l’arrivée des toutes premières asperges. Pour commencer le menu unique du jour, donc, des amuse-bouches détonants et des blinis surmontés d’algues, de crème crue, de wasabi et d’un ingénieux caviar végétal.
L’heure de la première asperge de la saison arrive juste après, accompagnée d’herbes potagères et de yuzu. Elle trône seule, fière et sûre d’elle, au milieu d’une assiette impeccablement composée et équilibrée.
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Arrive désormais à table ce qui restera, pour moi, le plus stupéfiant et prodigieux met de la soirée. Une endive (je déteste les endives) remontée au vin jaune (je ne suis pas un grand fan de vin jaune), servie avec des champignons, des fleurs et une savante huile verte.
À suivre : une betterave en multiples cuissons, lait ribot et figues. Puis, l’un des best-sellers de la maison : une sorte d’immense gnocchi de shiitake et pomme de terre, boosté à la noisette.
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Petite bombe : ce cornet au charbon végétal garni à la carotte, à la feta et au chanvre.
En sucré, pour finir, une – moins surprenante – meringue surmontée de kiwi, cédrat et persil, doublée par la droite, juste avant la ligne d’arrivée, par un divin pressé de pomme, glace au lait de riz et tonka.
Après deux heures et demie à table et une harmonie très aboutie sur les accords liquides, l’odyssée de Culina Hortus a rempli toutes ses promesses. Et si l’idée de vous attabler à un restaurant totalement végétal vous semble encore infaisable, ou hors de portée, dites-vous une chose : ni le chef, ni 90 % de la clientèle qui se rend au restaurant ne sont totalement végétariens dans la vraie vie. Et c’est justement cela qui rend l’expérience encore plus merveilleuse.
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