“La cuisine, c’est ma nouvelle vie” : Melvin*, qui participe avec cinq autres détenus d’Auvergne-Rhône-Alpes à un concours culinaire inter-prisons, compte désormais consacrer son avenir professionnel à sa nouvelle passion. Après seulement quelques semaines de formation en détention, ces six hommes – trois de la maison d’arrêt du Puy-en-Velay (Haute-Loire), deux de Moulins-Yzeure (Allier) et un seul de Bonneville (Haute-Savoie), faute d’obtention d’une permission de sortie pour son binôme – lèvent des filets de daurade et coupent des poivrons en brunoise.
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Bien que libérable, Melvin, 30 ans, tenait tellement à participer à ce concours qu’il a demandé… “à rester en prison”. “Ce concours, c’est une chance qu’il faut saisir” avec l’opportunité de se faire juger par de grands noms de la gastronomie lyonnaise comme Jacotte Brazier, la petite-fille de la célèbre Mère Brazier, ou le Meilleur ouvrier de France Joseph Viola, estime ce père de famille qui débute lundi, dès sa liberté retrouvée, sa formation en CAP de cuisine.
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“Les meilleurs cuisiniers sont en prison !”
Les trois équipes ont eu carte blanche pour l’entrée, tandis que des ingrédients leur ont été imposés pour le plat et le dessert, à savoir de la daurade accompagnée de polenta et de coquillages et une brioche perdue aux fruits de saison.“Là, on a le samouraï des légumes”, lance le chef Dominic Moreaud en observant un détenu du Puy découper un poivron.
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Ce membre des Toques blanches lyonnaises, à la tête d’un centre de formation aux métiers de la restauration à destination de publics en difficulté, dit “espérer si possible emmener un ou deux” de ces détenus dans son établissement. “Ceux qui sont là, c’est qu’ils aiment la cuisine. On sent qu’il y a de l’implication, de la gourmandise et de bons assaisonnements”, observe M. Moreaud.
Dans les semaines précédant l’épreuve, le chef marseillais Michel Portos, deux étoiles au Michelin, s’était rendu dans les trois maisons d’arrêt en course pour apprendre les techniques de base aux futurs candidats et leur prodiguer ses conseils. Au travers de ce “Top Chef” des prisons, “le but est de faire prendre conscience à l’administration pénitentiaire qu’il faut de la formation”, déclare M. Portos.
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Un snack après la prison
Un constat pourtant partagé par la direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) et ses partenaires comme la Région et Pôle emploi. “Un détenu qui suit une formation a 13 % de chances d’avoir un emploi à la sortie et donc on baisse le risque de récidive”, souligne le responsable de la formation professionnelle à la DISP, Damien Igonenc.
Selon le directeur de la DISP Stéphane Scotto, “un millier de détenus par an, en flux, dans la région, bénéficient d’une formation professionnelle”, les métiers en tension comme la restauration, la propreté et le bâtiment étant particulièrement ciblés. Oualid, 34 ans, a déjà trouvé le local pour le snack qu’il va monter à Lyon avec sa femme à sa sortie de détention dans quelques mois.
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Compliments
“Ce concours, c’est une bonne expérience, c’est à refaire mais… à l’extérieur”, relève le trentenaire. Place à la dégustation. Les assiettes, présentées avec soin, défilent sous les compliments des jurés. Jacotte Brazier loue la tomate-mozzarella revisitée de l’équipe du Puy. Quant à la brioche perdue, elle peut être “envoyée direct à Christelle Brua”, la cheffe pâtissière de l’Élysée, juge-t-elle. “Les meilleurs cuisiniers sont en prison !”, en conclut Dominic Moreaud, admiratif.
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Le prix d’honneur a finalement été décerné à l’équipe de Moulins-Yzeure. “On a tous été bluffés par le niveau que vous avez sorti, il y avait l’assaisonnement, le goût, la technique”, s’extasie Michel Portos au moment de proclamer les résultats, tout en saluant le “boulot fait au quotidien par les éducateurs”. D’ailleurs, le chef étoilé a glissé son numéro de portable à l’un des concurrents avec la promesse de l’aider à trouver du travail dans la restauration à Nice.
Konbini/Club Sandwich avec AFP
*Le prénom a été modifié à la demande de l’intéressé