On est allés explorer l’empire culinaire secret de Barbès

Publié le par Claire Verriele,

© 716lavie

Pizzas, garantita, brochettes et thé à la menthe : on s'est laissés guider à travers les spécialités gourmandes du quartier.

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Le quartier de la Goutte d’Or, situé en plein cœur du 18e arrondissement de Paris et davantage connu sous le nom de Barbès, est réputé pour sa dimension populaire, son ambiance unique, ses boutiques bon marché et les multiples communautés ethniques qui y cohabitent.

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Pourtant, à bien y réfléchir, Barbès reste un quartier que les non-résidents connaissent assez peu. Pour en apprendre davantage sur le vrai et l’authentique Barbès, sur ses habitants et sur les bonnes adresses culinaires du coin, on est partis explorer le “Barbès gourmand” en compagnie d’un expert du domaine, Guillaume Le Roux.

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À la fois guide touristique, défricheur de bonnes adresses et critique gastronomique, l’auteur du blog 716lavie (que nous avions rencontré il y a quelques mois) anime différents circuits culinaires à travers la capitale et a accepté de nous guider à travers une petite visite privilégiée.

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D’Anvers à la Goutte d’Or

C’est un jour de canicule que je retrouve Guillaume, à la sortie du métro Anvers. Il arrive avec sa casquette canadienne, vestige de son passé de chroniqueur à Radio Canada, et il commence par poser les bases de la visite : un petit préambule sur l’histoire de la ville de Paris – ça ne fait jamais de mal.

Première devinette : “Quel âge a Paris ?” Pas très sûre de moi, je réponds 2 000 ans. Bingo, c’est bien ça. Mon guide enchaîne alors et remet Barbès dans son contexte. C’est un quartier qui a été peuplé par des vagues de migration successives – venues du Maghreb puis du continent africain. Du temps où Barbès était encore situé en bordure de la capitale, on y trouvait à proximité un grand abattoir, celui de Montmartre. 

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(© Club Sandwich)

Berceau de la street-food

Pour Guillaume Le Roux, le quartier est le véritable berceau de la street-food de la ville, en place ici bien avant que ce mode d’alimentation sur le pouce ne devienne en vogue et ne s’embourgeoise quelque peu.

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Après ces quelques explications nécessaires, nous entamons la route vers notre premier arrêt. Ça tombe bien, j’ai très faim. On commence par une part de pizza. Quelque peu intriguée par cette proposition, je le suis jusqu’à un petit magasin, La Garantita Two. On y sert des pizzas à la part parmi des tourtes et sandwichs.

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Mais pas n’importe quelle pizza : ici, ce sont des pizzas algériennes (pâte légèrement sablée, surplombée de sauce tomate, d’anchois, d’une olive (!) et de harissa pour les volontaires) auxquelles on a affaire et mon guide me l’avait dit : chaque part “fait très bien son taf”.

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Prochaine escale : Kaliente, où l’on sert toute la journée de la garantita (ou karantita). C’est l’un des premiers commerces du coin à servir cette spécialité algérienne salée et, comme c’est une première pour moi, autant vous dire que j’ai hâte.

Part de garantita à la Kaliente. (© Club Sandwich)

La garantita est une déclinaison du flan, élaborée à partir de farine de pois chiches. Cette spécialité algérienne se déguste saupoudrée de cumin ou de harissa et tout juste sortie du four. C’est d’ailleurs de là que vient son nom, kalentica faisant référence au terme caliente (chaud en espagnol).

Plus que son goût, c’est sa cuisson qui la rend très intéressante. Le fond de ce gâteau salé est sablé, son cœur est fondant et sa surface croustillante et gratinée. C’est ce mélange de textures si particulier qui fait qu’on “ne se lasse jamais d’une kalentica”, m’explique Guillaume Le Roux.

Le marché de Barbès

Repus par ces premières dégustations, on se dirige alors vers le célèbre marché du quartier. Sur le chemin, Guillaume passe par quelques lieux emblématiques du coin : le cinéma Louxor, lieu de fantaisie des années 1920 restauré au début des années 2010, le fameux Tati, et une fontaine à eau Wallace, don de Sir Richard Wallace à la ville de Paris après la Commune.

En chemin, on fait une halte à la pâtisserie orientale Nedjmet El Bahri où de magnifiques m’smen, mhadjeb et moutla nous font de l’œil. Lors du ramadan, les files d’attente devant l’enseigne (et les commerces voisins) s’étendent sur plusieurs mètres de long.

Étal de fruits secs sur le marché de Barbès. (© Club Sandwich)

Une fois arrivée sous le métro aérien, j’observe le marché qui bat son plein. Des stands de fruits à bas prix, des étals de viande ou de poisson côtoient des vendeurs de bijoux, de fruits secs et même de yaourts.

Le long des différents stands, il y a du monde. Mais ce n’est rien comparé à d’autres jours où l’on peine à se frayer un chemin parmi les habitants du quartier et les amateurs de bonnes affaires. À peine sortis du marché, un homme interpelle et salue notre guide. “Lui, c’est le spécialiste du thé à la menthe. On ira le goûter plus tard.”

Le cœur du quartier

La suite du parcours nous entraîne vers le cœur de la Goutte d’Or. Dans les petites rues, Guillaume Le Roux n’est pas avare en anecdotes. J’apprends pêle-mêle que la rue des Poissonniers servait à acheminer les poissons venus du port de Boulogne-sur-Mer, qu’un cinéma déchu vit toujours sous la forme d’un immense magasin de chaussures, et que l’une des rues avoisinantes accueillait autrefois de longues files d’attente devant les chambres de prostituées.

Dans la rue Myrha, anciennement refuge de nombreuses échoppes à grillades maghrébines, il n’en reste désormais plus que deux, dont la fameuse grillade Sidi Rached. Une fois passé la porte, on choisit sa brochette, on l’amène directement au cuisinier qui s’occupe de la cuire sur commande. J’opte pour une autre de leurs spécialités : une salade méchouia composée de poivrons verts épicés, cuits au charbon, et au subtil goût fumé. Un délice.

La salade méchouia de Sidi Rached. (© Club Sandwich)

Une fois la salade engloutie, Guillaume Le Roux me montre de loin la brasserie artisanale de la Goutte d’Or, la boulangerie Tembely, connue pour ses gougères et ses pasteis (oui, on trouve des spécialités du monde entier dans le quartier), et de nombreuses boutiques de vêtements, dont celui de la créatrice Marcia de Carvalho.

Destination suivante : l’épicerie ivoirienne Koyaka. Une boutique tout en longueur dans laquelle je découvre l’attiéké, une semoule de manioc sans gluten qui peut remplacer du riz ou des pâtes, mais aussi des ignames, de la sauce à mafé, des fleurs d’hibiscus et de nombreux fruits exotiques.

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On profite du détour pour aller jeter un coup d’œil rapide à l’Institut des cultures d’Islam. Un havre de paix en plein Barbès où l’on vient prendre un thé, faire une expo ou juste prendre l’air devant la fresque de Tarek Benaoum.

La fresque de Tarek Benaoum (© 716lavie)

Menthe et pâtisseries

On passe dans une petite échoppe où l’on peut acheter de la menthe par bottes entières, pour conclure notre tour par la pâtisserie Andalousia où nous retrouvons le “spécialiste du thé à la menthe” croisé plus tôt sur le marché. Je jette mon dévolu sur une pâtisserie aux amandes, accompagnée d’un thé à la menthe savamment dosé.

© Club Sandwich
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