On l’ignore souvent, mais on peut faire plein de choses avec du pain invendu. De la bière, de la farine, du crumble… et même du pain. Depuis près de deux ans, le pâtissier boulanger Benoît Castel travaille en secret, ou presque, sur une manière de réutiliser ses miches et autres pains invendus.
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Après de nombreux tests, il est enfin parvenu à réaliser une recette dont il est parfaitement satisfait pour ce “pain d’hier et de demain”. Pour Konbini food, il raconte les secrets et les dessous de cette création pas comme les autres.
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Comment vous est venue l’idée de recycler votre propre pain ? Et quand ?
Ça va faire deux ans que j’ai commencé à faire des tests autour du pain. Je me demandais comment on pouvait essayer de faire bouger les choses, de changer un peu la tradition et de bousculer les codes afin de coller un peu plus à ce que je crois. Je trouvais ça dommage de ne rien pouvoir faire avec les invendus, alors j’ai fait des tests. J’ai essayé plein de trucs mais rien de réellement concluant. Puis je suis parti en Autriche voir un copain et bam, le déclic. En soi, c’est une technique relativement ancienne, une technique artisanale que beaucoup de boulangers connaissent. Il fallait juste la revoir, la repenser pour qu’elle colle avec notre savoir-faire actuel.
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Quel a été ce déclic ?
J’ai appris la bonne technique pour réincorporer de la matière dans une recette traditionnelle de pain. Quand je l’ai vue et quand je l’ai apprise, ça a sonné comme une évidence. Je n’avais pas du tout réfléchi à cette façon de faire et, en voyant cela, je me suis rendu compte que c’était comme ça qu’il fallait résoudre le problème.
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Qu’est-ce que cela change, concrètement, en matière de gaspillage alimentaire ?
Je n’ai pas encore réellement de chiffres, car on débute seulement la commercialisation de ce nouveau pain, mais j’utilise 30 % de pains invendus pour chaque recette. C’est toujours ça !
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Le goût de pain recyclé change-t-il ?
Le goût n’est pas du tout le même. Pour arriver à réaliser cette technique, on grille le pain d’abord, et ensuite, on le torréfie, donc on retrouve plutôt le goût du pain bien grillé.
Combien de temps et de tests pour trouver la bonne recette ?
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Au total, j’ai travaillé pratiquement un an sur le développement de ce pain et ça fait environ un an et demi que j’ai découvert cette technique pour la première fois en Autriche. J’ai commencé les premiers essais en décembre 2019 et, à partir de septembre 2020, on a commencé à réaliser quelques miches.
On se doute que c’est assez secret, mais quel est le processus de fabrication de ce pain ?
Je commence par rassembler tous les pains invendus de la boutique pour les torréfier au four et obtenir une texture proche de la biscotte. Ensuite je transforme ce pain toasté en chapelure très fine que je mélange avec de l’eau bouillante pour obtenir une crème de pain très brune. J’y incorpore ensuite une farine bio et du levain naturel fait maison, ce qui me donne une pâte à pain très humide que je passe au four deux fois. C’est réellement différent du pain traditionnel, car on ajoute une étape dans la fabrication. Le processus de fabrication est plus long, tout comme la cuisson.
Il se conserve bien ?
Il se conserve beaucoup mieux et plus longtemps, car c’est un pain très humide. Tellement humide que je suis obligé de le cuire en deux fois : une première fois pour la mie et une seconde pour avoir une croûte bien croustillante. C’est justement cette humidité qui fait que le pain se conserve au moins une semaine.
Quels sont les retours de vos clients face à ce pain unique en son genre ?
Les gens adorent ! On a vraiment des super retours et ça fait chaud au cœur. Les gens aiment le concept, le principe de ce pain, mais surtout son goût. Ils trouvent ça dingue qu’on n’y ait pas pensé avant. Ce qui interpelle surtout, c’est son goût, on a réellement l’impression de redécouvrir le goût du pain.
Pourriez-vous imaginer ce procédé avec d’autres produits que le pain ?
Bien sûr et c’est bien le but. On peut l’imaginer avec de la brioche, par exemple. Après, c’est comme tout, ce n’est qu’une question de réflexion et de tests. C’est du travail et de la conviction.