J’attendais beaucoup de The Innocents, peut-être un peu trop. Son pitch avait tout pour intriguer l’amateur de teen drama surnaturel. Imaginez plutôt : la fuite en avant de deux adolescents amoureux, contrariée par la découverte d’un étrange pouvoir, celui de se métamorphoser. La série anglaise signée Hania Elkington et Simon Duric promettait des sensations fortes et s’inscrivait dans la tendance, sombre, des séries ados, de 13 Reasons Why à Impulse en passant par Cloak and Dagger.
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Après visionnage de la moitié de la première saison, composée de huit épisodes, on ne peut pas dire que The Innocents est un ratage total, mais ce n’est pas non plus une réussite éclatante. Pourtant, la série ne souffre pas d’une volonté d’aller trop vite. C’est même complètement le contraire. Les scénaristes prennent le temps nécessaire pour développer la romance entre June et Harry, mais on a du mal à croire à leur amour impossible, même s’ils sont incarnés avec conviction par Sorcha Groundsell et Percelle Ascott.
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On ne comprend pas vraiment ce qui les sépare à la base, si ce n’est que le père de June est surprotecteur. Ils sont certes trognons, mais leur alchimie est moins évidente que celle d’Olivia Holt et Aubrey Joseph dans Cloak and Dagger par exemple. On nous les vend comme des Roméo et Juliette des temps modernes, mais on ne sent pas chez eux cette urgence de la passion, ce désir charnel qui anime les deux amants mythiques imaginés par Shakespeare.
Série caméléon
Je me suis endormie devant un épisode sur deux de The Innocents. L’univers a beau être léché – on nous régale de très beaux plans, notamment des décors naturels anglais et norvégiens – et les effets spéciaux sobres et soignés, l’action avance à la vitesse d’un escargot malade. La série souffre d’un manque de rythme manifeste, son scénario s’axant sur deux arcs narratifs principaux : la fuite des deux ados qui tentent de survivre à Londres et l’aspect surnaturel avec Le Sanctuaire, lieu dans lequel Ben (Guy Pearce, comme souvent plutôt… transparent) s’occupe des personnes ayant le pouvoir de se métamorphoser. Il est a priori bien intentionné, mais sait-on jamais… Cette storyline nous rappelle immanquablement celle de Hap dans The OA.
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À l’image de son héroïne métamorphe, la série n’a pas encore trouvé son identité et emprunte pour le moment un peu trop aux autres, sans rien réinventer. Un peu d’ambiance à la Twilight par ici, une fugue façon The End of the F***ing World par là, une dose de The OA, de beaux plans instagramables… Mais a-t-elle vraiment quelque chose à nous dire sur l’adolescence, au-delà de la métaphore évidente de la métamorphose (le corps de June change littéralement, elle ne maîtrise pas cette transformation, tout comme elle ne maîtrise pas sa puberté et sa sexualité naissante) ? Il ne suffit pas d’accumuler les références, d’exploiter les clichés d’un genre (ici le teen drama surnaturel, pour la moyenne The Rain, c’était le post-apocalyptique) et de miser sur une réalisation qui fait plaisir aux yeux pour faire une vraie bonne série.
The Innocents possède des défauts communs à beaucoup de séries originales Netflix, à moitié réussies ou à moitié ratées, selon que l’on est du genre à voir le verre à moitié plein ou à moitié vide ou que le sujet nous aura plus touchés pour x raisons. Elle semble cocher toutes les bonnes cases pour nous séduire, comme si elle avait été créée… par un algorithme. Elle laisse un goût de produit calibré, vite consommé, vite oublié. On a beaucoup brocardé le formatage des séries de networks, des sitcoms à la Big Bang Theory ou des séries policières type NCIS aux mêmes formules éculées. Mais un formatage de séries de plateforme, voire des séries propres à Netflix, existe aussi. Et s’il est moins évident à repérer, il est tout aussi agaçant.