FX et la BBC viennent de lancer une petite pépite qui plaira grandement aux fans de Peaky Blinders. Retour sur ce pilote superbe mais à l’intrigue bien prétentieuse.
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Après des semaines de teasing intensif, le premier épisode de Taboo a enfin été diffusé sur FX aux États-Unis et sur la BBC en Angleterre (il n’y a pas encore de diffusion française prévue). Ce drame historique s’annonçait sombre et palpitant, porté par un acteur au charme incroyable : Tom Hardy (The Revenant, Mad Max : Fury Road). L’acteur s’est associé avec son père Chips Hardy et le créateur de Peaky Blinders Steven Knight pour mener à bien ce projet alléchant. Le résultat est une œuvre fascinante, qui renvoie autant aux westerns qu’aux films de gangster et est parcourue d’un soupçon de motifs fantasmagoriques empruntés au réalisme poétique de Charles Dickens.
La série suit l’histoire de James Keziah Delaney, incarné par Tom Hardy, un soldat déchu qui retourne dans sa Londres natale au début du XIXe siècle. Après avoir passé dix ans en Afrique et être présumé mort, Delaney revient réclamer son héritage auprès du gouvernement. Son père décédé, il entre en conflit avec plusieurs instances dont des membres de sa famille pour un bout de terre situé entre la frontière américano-canadienne, appelé la baie de Nootka.
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Un Tom Hardy show filmé comme une peinture impressionniste
À la fin du pilote de Taboo, une seule véritable réaction frappe : que c’est beau. Le travail du réalisateur Kristoffer Nyholm (The Killing) et du chef opérateur Mark Patten (Seul sur Mars) est saisissant. Ils s’amusent sur les jeux d’ombre et de lumière, gardant un filtre très gris lors des séquences urbaines, dans la plus pure tradition des productions de la BBC afin d’assombrir l’atmosphère. L’équipe du tournage a posé ses caméras dans le comté du Buckinghamshire pour donner vie à ce Londres insalubre (à l’époque, la ville a subi une suite d’épidémies tels que le choléra, la variole et le typhus), un territoire parsemé de vastes plaines marécageuses et de côtes pluvieuses.
La caméra se tient la majeure partie du temps à hauteur d’homme pour nous permettre de comprendre les forces en présence et de s’identifier à Delaney. Tout comme ce personnage qui revient après dix ans d’absence, le spectateur est un peu perdu au début de l’histoire et il faudra plus d’un épisode (et beaucoup d’attention) pour comprendre tous les enjeux commerciaux et politiques qui se trament. Enfin, les costumes ainsi que la fidèle reconstitution de cette Angleterre coloniale sont sublimes, plaçant Taboo dans la lignée des meilleures séries historiques récentes, telles The Crown.
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Il y a également de quoi être subjugué par la prestation de Tom Hardy, impérial dans le rôle du ranger solitaire lancé dans une vendetta qui s’annonce sanglante. Orné de son plus beau haut-de-forme, l’acteur assure les entrées en scènes remarquées et les punchlines cinglantes. Terrifiant, le regard perçant et un brin macho sur certains points, son personnage semble complexe et l’acteur le transcende dès les premières secondes de l’épisode. Fini les rôles de “thug” qui parle dans sa barbe, Tom Hardy est désormais dans le game des antihéros charismatiques.
En revanche, les partitions de ses camarades s’avèrent plus inégales. Si on prend plaisir à retrouver deux acteurs de Game of Thrones (Jonathan Pryce et Oona Chaplin), leurs rôles sont parfois à la limite du cliché du genre “des méchants vraiment méchants”. Pour le moment, les femmes ont la fâcheuse tendance à être relayées au second plan, qu’elles soient teneuses de bordel ou embarquées dans des relations malsaines. À voir si elles prendront de l’importance dans les épisodes suivants, mais tous les personnages sont plus ou moins effacés de l’action tant la prestation de Tom Hardy en impose.
Certains déploreront également le manque de second degré de Taboo. Impossible d’éviter la comparaison avec Peaky Blinders, qui se lâche beaucoup plus que ce nouveau bébé made in Steven Knight. Tout est très sérieux dans Taboo, ce qui provoque parfois le sentiment d’avoir à faire à une série prétentieuse. Il faut dire que le scénario et les échanges entre les personnages sont assez exigeants. Ils demandent une solide connaissance du contexte géo-politique de l’époque, comme l’existence de la Compagnie britannique des Indes orientales ou la crise de Nootka, véritable incident diplomatique qui s’est déroulé en 1789.
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Cela dit, le potentiel de Taboo est immense. C’est à la fois un drame sombre, intimiste et historique rendu intense et fascinant par un acteur souvent sous-exploité. Souhaitons juste qu’elle évite de tomber dans les dialogues à rallonge, qu’elle évite le côté m’as-tu-vu et qu’elle explose rapidement pour nous prouver que oui, l’année sérielle 2017 commence très, très fort.