Le 1er novembre dernier, AppleTV+ a effectué son entrée (pas si) remarquée sur le terrain déjà bien chargé des plateformes de streaming légal. Très vite, critiques comme public étaient sceptiques face à la qualité inégale des premières fictions originales proposées, en l’occurrence l’anachronique Dickinson, la bordélique See ou encore The Morning Show et son casting quatre étoiles. Une arrivée dans le game qui n’aura, au final, pas fait trop de vagues. Pas sûr que sa toute nouvelle série, intitulée Servant, vienne changer la donne… et c’est bien dommage car le potentiel est bel et bien au rendez-vous.
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Créée par Tony Basgallop (Berlin Station) et notamment produite par M. Night Shyamalan (Incassable et ses deux suites), Servant s’impose d’entrée de jeu comme un thriller psychologique étourdissant. On y suit Leanne, une jeune fille au pair tout droit venue du Wisconsin, embauchée par un couple new-yorkais pour s’occuper de son nouveau-né. Si la mère, Dorothy, une reporter réputée, fait aveuglément confiance à cette inconnue, ce n’est pas le cas de son époux. Sean, chef étoilé, se méfie. Et quand des choses plus qu’étranges commencent à avoir lieu, c’est le début d’un engrenage pernicieux qui menace de bouleverser leur quotidien.
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Impossible d’entrer dans les détails sans spoiler quoi que ce soit. Le premier épisode, d’ailleurs, contient un twist assez monumental qui va propulser le reste de cette saison inaugurale. Bien qu’il ne soit qu’à la production plutôt qu’à la création, M. Night Shyamalan dépose sa patte reconnaissable avec une atmosphère globale faisant écho à The Visit, opus horrifique ô combien sous-estimé de sa filmographie sorti en 2015.
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Niveau réalisation, on ressent tout de même l’influence de Shyamalan tout au long des épisodes de Servant, avec une affinité pour les plans aériens et les close-up frontaux sur les visages des personnages principaux. Pour ce qui est de l’esthétique, tout est fait pour susciter une sensation de danger omniprésent : jeux d’ombres, couleurs ternes, luminosité relativement basse… Tout comme ses protagonistes, on se sent nous aussi piégés, comme étouffés dans la maison new-yorkaise au sein de laquelle se déroule toute l’action (ou presque) de la série. Son visionnage en devient vite déboussolant.
Sans être aussi puissante qu’un The Haunting of Hill House – qui, n’en déplaise à ses détracteurs, a élevé le récit d’épouvante sur le petit écran –, Servant a de lourds arguments en sa faveur. À commencer par un rythme mesuré et maîtrisé, laissant le malaise s’installer doucement scène après scène, bande-son instrumentale bien oppressante à l’appui. On soulignera les prestations impeccables de son casting, de Toby Kebbell (Black Mirror) à Lauren Ambrose (Six Feet Under) en passant par la jeune Nell Tiger Free (Game of Thrones), aussi excédante que captivante en nounou discrète et indéchiffrable.
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Le seul aspect que l’on peut reprocher à Servant, c’est de vouloir être tellement nébuleuse qu’elle en vient à ne donner que très peu de réponses, là où trop de questions se bousculent au fil des épisodes. À maintes reprises, on en vient à remettre en question tout ce qu’on croyait savoir au début, espérant que la série clarifie les choses… en vain, la plupart du temps. On mettra cette avarice sur le compte d’AppleTV+, qui avait déjà commandé une deuxième salve d’épisodes en amont, en espérant que celle-ci se montrera un peu plus généreuse d’ici-là.
Garantie de mettre vos nerfs à rude épreuve, Servant se présente de prime abord comme un huis clos soigné avant de devenir, épisode après épisode, un dédale horrifique prenant. Déstabilisant à bien des moments, son visionnage se fait de manière suffisamment fluide, pour peu qu’on apprécie les œuvres lentes qui privilégient l’ambiance au divertissement pur et dur.
Les trois premiers épisodes de Servant sont disponibles depuis le 28 novembre sur AppleTV+.
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