Chez Biiinge, on s’est lancé le défi, pour le moins hasardeux, de classer les saisons d’American Horror Story de la meilleure à la moins bonne. Un numéro d’équilibriste totalement subjectif et parfaitement assumé. Que voulez-vous, on ne sait plus comment s’occuper en attendant la saison 10, qui doit être diffusée quelque part cette année sur FX.
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#1. Murder House
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Impossible de ne pas la mettre en premier. Parce qu’elle a ouvert la marche, non seulement à une franchise désormais culte, mais aussi à un genre, la série anthologie d’horreur, qui n’avait pas franchement brillé sur nos écrans depuis La Quatrième Dimension. Tout le monde se souvient de la première fois où il ou elle a posé ses yeux sur cet étrange objet télévisuel. On entrait dans cette famille et dans cette maison, avec la curieuse sensation que plus rien ne serait désormais comme avant. Le “thriller psycho-sexuel”, comme l’ont décrit ses créateurs Ryan Murphy et Brad Falchuk, nous a laissés en état de sidération, de fascination et de dégoût. Et ce générique, lugubre, qui ne nous a plus quittés… À l’issue de ses douze épisodes, c’est certain, une part de nous est restée avec les Harmon, coincée entre les murs de cette maison, et le Rubber Man continuera de hanter nos nuits pendant encore longtemps.
#2. Hotel
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Ce n’était qu’une question de temps avant qu’American Horror Story ne s’empare de l’histoire macabre du Cecil Hotel (renommé ici hôtel Cortez). D’ailleurs, si celle-ci vous intéresse, on vous invite à regarder le documentaire Crime Scene: The Vanishing at the Cecil Hotel sur Netflix. Mais revenons à notre série d’horreur. Hotel n’est peut-être pas la saison la mieux écrite, mais c’est celle du triomphe esthétique. Ce quasi-huis clos Art déco, peuplé de créatures hors du temps (mais souvent en tenue de gala), est une orgie visuelle qui mêle la beauté au morbide, la grâce à la putréfaction. En plus de leurs muses habituelles, Sarah Paulson et Kathy Bates, Ryan Murphy et Brad Falchuk ont invité Lady Gaga à se joindre à la débauche. Son rôle de la Comtesse, femme fatale, vampire et icône du vieux Hollywood, est taillé pour elle. Le séjour à l’hôtel Cortez est éprouvant et, comme dirait la chanson, “you check out, but you can never leave” (“vous faites votre check out, mais vous ne pourrez jamais partir”).
#3. Asylum
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“Vous qui entrez ici, abandonnez tout espoir.” Ces mots inscrits aux portes de l’enfer, dans La Divine Comédie de Dante Alighieri, auraient pu être gravés sur l’entrée du Briarcliff Manor, une institution psychiatrique qui n’a rien à envier à celle de Vol au-dessus d’un nid de coucou. La saison 2 d’American Horror Story est l’une des plus perturbantes et celle dont la narration est la plus cohérente aussi. Elle nous a criblé le cerveau d’images toutes plus traumatisantes les unes que les autres et brassé une myriade de tropes horrifiques : de la (douteuse) présence d’Anne Frank entre ses murs, en passant par les aliens, un démon, les méthodes “médicales” d’un autre âge qui ressemblent plus à de la torture, et un chirurgien nazi. Rare instant de lumière dans toute cette obscurité, l’inoubliable numéro musical, “The Name Game”, avec Jessica Lange en star des sixties. Mais une chose est sûre, on avait besoin de plusieurs séances de thérapie après le visionnage d’Asylum.
#4. Coven
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Voilà un choix controversé ! La saison 3 d’American Horror Story a ses détracteurs, c’est vrai, mais permettez-nous de plaider en sa faveur. Et pour nous, ça tient en deux mots : des sorcières ! On vous avait prévenu : ce classement est subjectif. Mais plus sérieusement, Coven, c’était aussi la saison de la puissance et de la perversion des femmes. Des femmes qui se butent entre elles, qui sèment le chaos, qui jettent des sorts et qui unissent leurs forces. Ce n’est certainement pas l’expression féministe la plus subtile – on rappelle que la série est showrunnée par deux hommes, certes adorateurs de ces dames, mais tout de même – néanmoins elle a le mérite de brasser une mythologie forte en symboles. Comme dans chaque nouveau chapitre d’American Horror Story, certains éléments sont très critiquables (on pense notamment à l’utilisation du viol comme mécanique du torture porn). Mais les silhouettes toutes vêtues de noir des sorcières du coven, déambulant dans les rues ensoleillées de La Nouvelle-Orléans, resteront gravées dans nos mémoires.
#5. Apocalypse
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C’est la saison qui relie toutes les saisons ! Les scénaristes se sont livrés à un véritable exercice de contorsionniste, et les fans ont tenté de trouver tous les easter eggs qui se glissaient dans chaque épisode. Le résultat est forcément chaotique (mais quelle saison d’AHS ne l’est pas ?), les timelines se téléscopant dans un joyeux bordel. Apocalypse en tire un avantage inestimable : le fait d’avoir à l’écran Sarah Paulson, Evan Peters, Kathy Bates et Frances Conroy dans plusieurs rôles. On navigue entre les époques jusqu’à y perdre la tête : tantôt claustro dans le bunker, tantôt en trauma quand on nous replonge dans Murder House, Coven ou Hotel à travers leurs personnages. Autre cadeau de cette fournée d’épisodes, la présence de Cody Fern dans la peau de Michael Langdon, aka l’Antéchrist en personne. On retiendra surtout la présence aussi envoûtante que vénéneuse de Wilhemina Venable, incarnée par Sarah Paulson (encore elle).
#6. Freak Show
Aucune autre saison ne symbolise mieux les obsessions de Ryan Murphy pour ce que la société considère comme des anomalies. Il posait déjà ce regard mi-voyeur mi-empathique sur certain·e·s des patient·e·s du cabinet de chirurgie esthétique McNamara/Troy, dans Nip/Tuck. Cette fascination malsaine, c’est aussi une façon pour le showrunner d’exorciser ses propres démons, lui qui s’est longtemps senti comme un freak. Cette saison résonne comme la revanche des parias, ceux et celles que la société, quelle que soit l’époque, aimerait parquer loin du regard public. Freak Show nous a offert quelques scènes mémorables, à l’instar des prestations scéniques de Jessica Lange reprenant les classiques de Bowie ou Lana Del Rey, ou la performance bicéphale de Sarah Paulson dans la peau des sœurs siamoises Bette et Dorothy. On a eu bien du mal à trouver où mettre Freak Show dans ce classement, et sa sixième place est davantage la marque de notre légère préférence pour les autres, que d’un désamour pour son univers. On croise les doigts pour que Twisty le clown ne vienne pas laver cet affront en nous trucidant.
#7. Cult
Il y a une place en Enfer spécialement réservée pour cette saison, parce qu’on a eu bien du mal à dépasser notre phobie des clowns pour la regarder. Cult a choisi d’embrasser pleinement l’actualité en situant son récit en pleine présidence Trump et en plaçant sur le devant de la scène un couple de lesbiennes directement affectées par sa politique. Le grand méchant de la saison, incarné par Evan Peters, est un avatar du président déchu, une figure de prophète populiste galvanisé par l’attention qu’il génère. Le problème de Cult, c’est précisément qu’en se superposant à cette élection, elle n’est alors plus aussi intemporelle que les autres, pour lesquelles les marqueurs temporels n’avaient peu ou pas d’incidence sur le discours. Et finalement, le message s’est un peu brouillé en cours de route, moquant tantôt le leader de pacotille et la panique qu’il inspire chez ses opposantes. Sans doute un chouïa moins extravagante et “camp” que les autres, cette saison a tout de même rempli sa mission première : nous faire flipper comme jamais.
#8. 1984
Dans cette saison, les scénaristes convoquent un sous-genre du cinéma d’horreur, le slasher, qui a connu sa première heure de gloire à la fin des années 70 et au début des années 80 avec des classiques comme Halloween ou Vendredi 13. Ce dernier sert largement d’inspiration à l’intrigue : le camp Crystal Lake où sévit Jason Voorhees devient le Camp Redwood, théâtre de massacres passés, présents et futurs, dans lesquels va se débattre une bande de jeunes adultes ainsi que le personnel présent sur place. Mais comme pour Roanoke, dernière de notre classement, 1984 se heurte à une surenchère dans la référence méta, qui plus est dans un genre qui n’a jamais vraiment percé en série, et pour cause. Si regarder un tueur massacrer des jeunes gens sur deux heures peut passer, sur neuf épisodes, le temps va paraître long.
Ryan Murphy multiplie alors les tueurs et tueuses à l’aide de twists à répétition, au point qu’on se demande au final si cette histoire a des victimes. Emma Roberts a beau être parfaite en “final girl”, la reconstitution fétichiste des années 80 est toute aussi divertissante et camp. Mais il se dégage de 1984 une certaine vacuité et un manque manifeste d’innovation. Parodier un genre qui s’autoparodie depuis au moins Scream (1997) était un pari osé, et il faut bien le dire, il est à moitié raté. Suprême ironie : malgré la présence de tous ces serial killers, on n’a pas vraiment peur. Et on retient à peine une figure de grand méchant, inspiré de la vraie vie, le “Night Stalker” Richard Ramirez, incarné par le très bon Zach Villa.
#9. Roanoke
Si elle est tout en bas de cette liste (subjective, on le rappelle), c’est surtout parce que la saison 6 d’American Horror Story n’a pas autant marqué les esprits que les autres. Pourtant, elle a tenté un véritable tour de force en étant méta… au carré. Une série dans la série et une téléréalité dans la fiction. Il y avait de quoi perdre les pédales entre véritables témoins et acteur·rice·s qui les jouent dans la reconstitution. Roanoke signait aussi le retour de Lady Gaga dans le rôle, cette fois-ci, de Scathach, une sorcière autrefois martyrisée et revenue exercer sa vengeance sur les pauvres mortel·le·s qui osent fouler du pied les lieux de son supplice passé. D’un point de vue purement formel, cette saison n’était pas une grande réussite, mais le pari était risqué. On peut saluer l’audace de ses créateurs, qui savent exploiter au mieux les fondements mêmes de l’anthologie en tentant à chaque fois quelque chose de nouveau. Et on peut toujours compter sur les esprits torturés de Ryan Murphy et Brad Falchuk pour provoquer en nous ce sentiment unique, mêlant dégoût et fascination.
Les 9 saisons d’American Horror Story sont disponibles sur Netflix.