Avec un crossover inattendu, Narcos: Mexico régale les fans et apporte une cohérence à son univers

Publié le par Marion Olité,

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On était plutôt perplexes face au choix de Netflix de marketer ce qui est techniquement la saison 4 de Narcos en une nouvelle série, rebaptisée Narcos: Mexico. Certes, elle n’a pas franchement besoin de ça, cette excellente nouvelle livraison d’épisodes reprenant la recette qui a fait le succès du show. Le choix s’explique sans doute pour deux raisons : refaire parler d’une série au milieu de sa vie, donc plus difficile à médiatiser qu’au début, mais aussi effectuer un changement de décor. Le showrunner Eric Newman nous propose de remonter le temps jusque dans les années 1980, et de changer de pays, passant de la Colombie au Mexique, pour nous conter l’histoire du cartel de Guadalajara. En termes de temporalité donc, on passait d’une saison 3 terminée au milieu des années 1990 à une saison suivante qui repart dans l’autre sens de l’histoire. 

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Netflix a assumé ce choix jusqu’au bout, proposant sur son catalogue la première saison de Narcos: Mexico, séparée de Narcos. Ce qui laisse à penser que nous allons rester pendant plusieurs saisons du côté de Guadalajara. Mais un peu comme les spin-off de séries, il apparaît clairement au fil des épisodes que Narcos: Mexico appartient à ce qui est en train de devenir une franchise et un univers commun, celui des narcotrafiquants sud-américains des années 1980-90, qui ont fondé des empires de la drogue et donné du fil à retordre aux autorités de leur pays mais aussi à celles des États-Unis, où la coke colombienne et mexicaine se vend comme des petits pains. Dans la série, cet univers étendu est véritablement installé dans l’épisode 5, malicieusement baptisé “The Colombian Connection”, qui prend la forme d’un crossover aussi savoureux qu’inattendu. Et qui est complètement justifié narrativement. 

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Interviewé par The Hollywood Reporter, le showunner Eric Newman s’explique : “J’ai toujours vu cela comme l’univers des super-héros Marvel mais version narcotrafiquants, et ils coexistent tous. Remonter le temps nous a offert cette opportunité de retrouver ces types qui nous manquaient.” 

Narcos Connection 

1985. Après avoir réuni les différentes “plazas” mexicaines sous une même bannière pour créer un cartel dédié au trafic de cannabis, Félix Gallardo (Diego Luna) voit une opportunité dans le trafic de cocaïne quand les barons colombiens se retrouvent le bec dans l’eau, après que leur réseau de distribution vers les États-Unis, qui passait par une plateforme aux Caraïbes, a été exposé. Après avoir tâté le terrain, il se rend en Colombie pour proposer un deal – s’occuper de la distribution de la cocaïne colombienne vers les États-Unis en passant par la frontière mexicaine à Tijuana – à des barons de la drogue qui ne nous sont pas étrangers puisqu’il s’agit des gentlemen de Cali ! 

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Après avoir convaincu Miguel Rodriguez (Francisco Denis), Chepe Santacruz Londono (Pepe Rapazote) et notre chouchou Pacho Herrera (Alberto Ammann), au passage seul personnage de Narcos à apparaître dans toutes les saisons, Félix est prêt à repartir dans ses contrées mexicaines, quand il se fait littéralement enlever avec son associée Isabella Bautista (Teresa Ruiz). Direction Medellin. 

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Plata o plomo

L’occasion de revoir Blackie (Julian Díaz) et Poison (Jorge A. Jimenez), les hommes de mains de Pablo Escobar, qui est alors en pleine forme, au top avec le cartel de Medellin. Celui de Cali est à peine en train de naître et commence à le gêner aux entournures. En termes de temporalité, on est donc quelque part au milieu de la saison 1 de Narcos. Le secret ayant été particulièrement bien gardé, on se dit que ce n’est pas possible… Mais si. Félix se retrouve face à Escobar himself, évidemment de nouveau joué par Wagner Moura. 

“Wagner Moura en Pablo Escobar est juste exceptionnel. […] C’est un acteur tellement intelligent et intuitif. J’ai écrit la scène et, comme à la belle époque, on s’est assis, on a parcouru les pages, fait quelques changements, travaillé dessus, ça a été instantanément un moment spécial. J’étais si excité par cette idée, et Wagner l’a compris, et les gars de Cali l’ont compris, et tout le monde a dit : ‘Ah mais oui, carrément. Allons-y'”commente Eric Newman. 

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Si la séquence avec les barons de Cali est très axée business et rien d’autre – à l’image de la saison 3 de Narcos –, l’échange entre Félix Gallardo et Pablo Escobar prend immédiatement une dimension émouvante, les deux hommes échangeant avec beaucoup d’honnêteté. Le boss de Guadalajara lui explique qu’il a préféré faire affaires avec ses concurrents de Cali car lui a la réputation d’être “soupe au lait”. Le boss de Medellin lui demande alors pourquoi il veut se lancer dans le trafic de coke. Après une réponse toute faite qui ne satisfait pas (“Si ce n’est pas moi, ce sera un autre”), Félix dévoile une histoire très personnelle, la mort de sa première femme, atteinte de leucémie. Et ce sentiment de vouloir prendre le contrôle sur sa vie qui en a découlé. “Le monde, il faut le contrôler, sinon c’est lui qui te contrôle.” 
 
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Un moment à l’image du personnage de Pablo Escobar par Wagner Moura, touchant et dangereux, l’homme étant imprévisible et menaçant par moments. Cette séquence permet aussi de nous éclairer sur la psychologie de Félix, l’antihéros de Narcos: Mexico aux ambitions démesurées et à la trajectoire qui n’est pas sans rappeler celle de Walt dans Breaking Bad
 
Ces scènes, aux allures de passage de flambeau, ne sont pas des gadgets narratifs pour autant, puisque c’est le moyen trouvé par Félix pour faire ses premiers pas dans le monde du trafic de coke. Mais les deux barons de la drogue se sont-ils vraiment rencontrés dans la vie réelle ? Probablement, mais on n’en est pas complètement sûr. Dans la vie comme dans la série, Gallardo est l’un des premiers narcotrafiquants à avoir mis en place des partenariats avec ses homologues colombiens. Eh oui, il a travaillé avec le cartel de Medellin de Pablo Escobar, devenant même son associé mexicain principal.
 
La rencontre entre les deux hommes, savoureuse, est en revanche hypothétique. Ils ont pu passer par leurs lieutenants respectifs. Mais elle s’appuie en tout cas sur une réalité historique. Tout comme la menace d’Escobar de jeter Félix “aux hippopotames”. Le parrain en était dingue et en possédait cinq, qu’il a laissés à la Colombie. Un héritage insolite, devenu encombrant, puisqu’ils se sont reproduits et sont maintenant une quarantaine. On peut aussi voir ça comme une incroyable métaphore animalière de la multiplication des barons de la drogue au fil du temps. Des hippopotames plutôt coriaces, et toujours plus nombreux.