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Ted Bundy vu par Ted Bundy, c’est un peu la promesse des quatre épisodes de ce docu-série proposé par Netflix, éprouvant à regarder, mais fascinant comme un bon polar. Percer les mystères qui se cachent derrière les yeux bleus de la bête, c’était la tâche de Joe Berlinger, créateur et réalisateur de ce docu-série intitulé Ted Bundy : autoportrait d’un tueur. Et l’homme est tellement passionné par le sujet qu’il sort, à deux jours d’intervalle, le film Extremely Wicked, Shockingly Evil and Vile, dans lequel Zac Efron interprète le rôle de… Ted Bundy.
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Le livre du journaliste et auteur Stephen Michaud, Ted Bundy: Conversations With a Killer, dont les enregistrements audio de ses interviews avec le serial killer sont autant de fenêtres sur la psyché glaçante de Bundy, a servi de terreau à ce docu-série. Le tueur avait accepté de discuter avec le journaliste lorsqu’il était dans le couloir de la mort, espérant ainsi réouvrir son dossier et, pourquoi pas, prouver son innocence.
Stephen Michaud était convaincu que “s’il était innocent, je tenais là une histoire incroyable et, s’il était bien coupable… ce serait quand même une histoire incroyable”. Plus de 100 heures d’enregistrements audio plus tard… on est effectivement face à une histoire incroyable.
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Un thriller avec des twists et un protagoniste qui, sur le papier, a tout pour captiver : extrêmement intelligent, charismatique, considéré par beaucoup comme “séduisant”, maître manipulateur, imprévisible… Ce docu-série nous rappelle que le mal absolu peut aussi se cacher derrière un physique enjôleur. Encore aujourd’hui, Ted Bundy fascine… et séduit.
Même après avoir avoué le meurtre d’au moins trente femmes sur une période allant de 1973 à 1978. Même après avoir décrit les sévices qu’il leur faisait subir, à elle ou à leur corps sans vie. Même après avoir admis qu’il en avait décapité certaines, et qu’il avait conservé les têtes dans son frigo. Tout, dans cette histoire, donne la nausée.
La traque de Ted Bundy, c’est un de ces contes terrifiants que l’on raconte aux jeunes filles pour qu’elles ne s’aventurent pas trop loin des sentiers balisés, ne rentrent pas trop tard, ne boivent pas trop, ne quittent pas l’enceinte rassurante du foyer. Croquemitaine du vingtième siècle.
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En réalité, ce monstre là pouvait frapper partout, jusque dans les résidences d’étudiantes pendant que les dizaines de camarades de ses victimes dormaient à quelques mètres à peine. Un agent du FBI l’a même baptisé le “Jack l’éventreur des États Unis”.
Suspect numéro 1 de meurtres commis dans différents états, et donc sous le couvert de plusieurs juridictions, les services de police et le FBI ont eu bien du mal à mettre la main sur cet homme caméléon, surtout à une époque où il n’y avait pas d’internet, et pas de base de données nationale consultable en quelques clics. Mais même lorsqu’ils ont enfin mis la main sur lui, Ted Bundy s’est échappé 2 fois de sa cellule et une fois du bâtiment où se tenait son procès, profitant d’une pause lors de l’audience et de la présence très insuffisante des forces de l’ordre.
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Ted Bundy aurait pu faire l’objet d’une saison entière de Mindhunter. La série de Netflix, inspirée de véritables entretiens avec d’authentiques serial killers, partage d’ailleurs bien plus, avec ce docu-série, qu’un intérêt morbide pour la psyché de ces tueurs. L’action de Mindhunter se déroule en 1977, à une époque où le terme “serial killer” n’existe pas encore pour désigner ces meurtres dont les motifs se répètent.
Dans le livre qui a inspiré la série, Mindhunter: Inside the FBI’s Elite Serial Crime Unit, l’agent du FBI Bill Hagmaier rejoint la Behavioral Science Unit, et est alors chargé d’interviewer Ted Bundy dans le couloir de la mort. Cette unité très spéciale, qui décortique et analyse les comportements de ces tueurs hors norme, a été créée par les agents Holden Ford et Bill Tench ainsi que la psychologue Wendy Carr (les trois sont au cœur de la série de David Fincher). C’est là qu’a été éprouvée la science du profilage et que le terme de “serial killer” est né.
Bill Hagmaier, que l’on voit dans le docu-série, a d’abord recueilli des “conseils” de la part de Ted Bundy. D’une intelligence clairement supérieure à la norme, le tueur se gardait bien de tout commentaire qui pourrait l’incriminer. Aussi, il commentait d’autres crimes, et offrait à l’agent une perspective unique du point de vue d’un meurtrier. À ce stade là, il maintenait toujours son innocence, mais ne pouvait résister à l’appel des coupures de journaux décrivant des crimes sordides, et voulait faire profiter Bill Hagmaier de son analyse sur la question :
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“Il parlait beaucoup du fait que les serial killers retournaient sur la scène du crime. Il disait aussi qu’ils laissaient derrière eux des preuves qui n’avaient rien à voir avec la scène de crime, et la police pouvait facilement passer à côté. Il a confirmé des tas de choses que l’on soupçonnait sur les tueurs en série, mais il nous a aussi donné plein de pistes de réflexion”.
C’est finalement à deux jours de son exécution que Ted Bundy a avoué à Bill Hagmaier, accompagné ce jour-là de l’inspecteur Bob Keppel, avoir assassiné une trentaine de femmes entre 1973 et 1978. Il est mort sur la chaise électrique le 24 juillet 1989, dans la prison du conté de Bradford en Floride. Le véritable nombre de ses victimes reste un mystère, mais on le soupçonne d’être plus élevé que la trentaine qu’il a admise.
Les quatre épisodes du docu-série Ted Bundy : autoportrait d’un tueur sont disponibles sur Netflix.