Attention, cet article contient des spoilers sur les quatre premiers épisodes de And just like that.
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Que vous soyez fans ou non de la cultissime Sex and the city, si vous suivez un tant soit peu l’actualité sérielle, vous n’êtes pas sans savoir que Carrie, Charlotte et Miranda viennent d’effectuer un retour tonitruant avec And just like that, la suite qui se déroule une dizaine d’années après le dernier film Sex and the City 2, sorti dans les salles obscures en 2010.
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Il était temps de retrouver les copines pionnières, celles par qui on a entendu parler pour la première fois de sextoy (remember le “magic rabbit”, les vraies savent) et de date d’un soir complètement foireux, à la fin des années 90 sur HBO. Vingt ans plus tard, les temps ont changé, les comptes Insta sur la sexualité féminine dans sous ses états sont aussi nombreux que les paires de Manolo Blahnik dans le dressing de Carrie ; et nous allons suivre les péripéties non plus d’une bande de trentenaires mais de cinquantenaires. Et rien que ça, ça dérange, en témoigne les jugements à l’emporte-pièce qui fleurissent sur les réseaux sociaux, sur le physique de nos trois héroïnes, scruté de la tête aux pieds dans une société patriarcale qui refuse de voir les femmes vieillir. Dans ce contexte, voir revenir Carrie, Miranda et Charlotte toutes pomponnées et prêtes à se livrer sur leurs états d’âme, leurs aspirations et leurs vies sexuelles, a déjà quelque chose de joyeusement subversif.
D’un point de vue sociétal donc, la série tombe à point nommé à une époque où les stars féminines ayant dépassé la quarantaine s’imposent dans la conversation médiatique et ne se laissent ni invisibilisées ni moquée. Le dernier exemple en date est celui de Madonna, 63 ans, qui a fièrement mis en ligne des photos sexy sur Insta et a répondu aux attaques misogynes de 50 Cent. Ok, mais une série pertinente sociétalement est-elle forcément bonne ? On ne va pas se mentir, la majorité du premier épisode de cette suite très attendue est un peu… dure à regarder. Il manque de rythme – surtout en comparaison avec la série originale, au format plus court et plein de pep’s, laisse un sentiment artificiel et d’un point de vue fashion, les trois protagonistes sont attifées d’une overdose de robes, de fleurs et de couleurs.
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Un choix narratif radical
Les scénaristes se sont également empressés de s’attaquer au “Samantha Gate”, au point que son prénom se trouve cité au bout d’1min30 d’épisode ! Les fans ont été divisés face aux explications narratives de l’absence de ce personnage si iconique (dans la vraie vie, Kim Cattrall a refusé de reprendre son rôle et est brouillée avec Sarah Jessica Parker, au cas où vous n’auriez pas suivi ce drama). Il n’a pas été tué : le personnage se serait brouillé avec ses amies, et en particulier Carrie, pour des raisons pro. Et aux dernières nouvelles, Samantha vit à Londres. Une façon de laisser la porte ouverte à un éventuel retour (en saison 2 ?) mais aussi de valoriser le personnage de SJP qui est décrit dans la série comme victime de la tornade Samantha… Par sûre du tout donc que cette storyline donne envie à Kim Cattrall de revenir voir ses copines new-yorkaises !
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Si les scénaristes ont évité une mort avec Samantha, c’était pour mieux en préparer une autre, vécue par comme un énorme choc par les fans la semaine dernière. En effet, ce premier épisode se termine par la mort soudaine de rien de moins que Mister Big (Chris Noth), le grand amour de Carrie et époux. Au-delà de la mise en scène mélodramatique – qui a créé de brûlants débats sur les réseaux sociaux, nous a fait hurler devant notre écran “Carrie, appelle les urgences NOW !!!!” et s’est conclu par une parodie hilarante de la marque de vélo américaine Peloton – le choix de faire disparaître ce personnage aussi culte que problématique se comprend parfaitement.
Cette figure à la fois du bad boy et du boomer qui détient le pouvoir financier semble aujourd’hui anachronique dans une série centrée sur des femmes. Et puis cette mort va permettre d’explorer des thématiques passionnantes, comme la gestion d’un deuil à un âge où l’on commence effectivement à perdre ses proches. Et la façon dont Carrie gère cette perte est sincèrement écrite : sa personnalité control freak fait qu’elle se bloque émotionnellement pendant quelque temps ; les larmes de son amie Charlotte la mettent mal à l’aise voir carrément en colère. Elle dort les premiers jours suivant la mort de Mister Big avec Miranda, et cette amitié n’a jamais été aussi bouleversante.
Être ou ne pas être (woke)
Ce choix narratif permet aussi à And just like that de poser son univers. Non, cette suite ne sera pas une resucée de Sex and the city. Le format est plus long – 45 minutes vs 30 minutes – comme l’action, parce que ses héroïnes se trouvent à un autre moment de leur vie. Si des touches d’humour sont évidemment bien présentes, le ton est globalement plus sombre et sérieux.
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Passés ces premiers épisodes, où se mêlent tristesse et nostalgie, la série se tourne vers le présent de ses protagonistes, notamment celui de Miranda, en passe de bouleverser sa vie. Vivant en colocation avec Steve, notre avocate de feu reprend des études sur les droits des femmes avec enthousiasme, et dans le même temps, une nouvelle rencontre potentiellement romantique va l’éveiller à de nouvelles possibilités amoureuses. Cet arc-là apparaît couler de source pour ce personnage qui nous file des vibes lesbiennes depuis toujours. Alors évidemment, certain·e·s reprocheront à And just like that de verser dans l’opportunisme, en affichant un progressisme trop in your face dans ses storylines.
Il est vrai qu’entre Carrie embauchée sur un podcast animé par l’humoriste non-binaire Che Diaz (Sara Ramirez, convaincant·e dans son premier rôle post coming out), Miranda qui enchaîne les “bourdes” sur les cheveux de sa nouvelle prof de droit noire et Charlotte qui se lie d’amitié avec une femme au foyer racisée (Nicole Ari Parker dans le rôle pour le moment un poil fade de Lisa Todd Wexley), la série paraît chargée côté sujets progressistes. Cela dit, SATC se devait d’adresser le privilège blanc de ses héroïnes. Et la série a pris le parti d’assumer que Charlotte, Carrie et Miranda sont quelque part un peu des boomeuses.
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Elles n’ont pas toujours “les termes” de la Gen Z ou des Millenials, mais comme nos mères ou nos tantes, elles vivent dans cette société où des sujets comme les nouvelles formes que prennent le racisme (comme “le complexe du sauveur blanc”), la transidentité (abordée à travers le parcours d’un des enfants de Charlotte) ou les sexualités féminines dans toutes leurs diversités sont sur le devant de la scène. Elles font des bourdes, apprennent et se remettent en question.
And just like that ne sera pas parfaite, mais dans une société extrêmement polarisée, où on a du mal à accepter la contradiction, elle pourrait bien être la série qui essaie de réconcilier les générations de femmes. Son showrunner Michael Patrick King a visiblement été marqué par le tournant majeur post Me Too, car elle n’a effectivement pas grand-chose à voir avec les deux derniers films SATC, beaucoup plus bling-bling et frivole sur ces questions. Cette suite est finalement assez audacieuse, et il y a fort à parier qu’elle ne connaisse pas un succès égal à la série originale. Mais ces héroïnes ont des choses à nous dire, des choses à apprendre, et plein de nouvelles choses à vivre. Et on sera là pour les écouter.
Composée de dix épisodes, la première saison de And just like that est diffusée sur Salto en US+24.