Dimanche 15 août, les talibans s’emparaient de Kaboul et le président du pays fuyait à l’étranger. Tandis que des scènes de désespoir nous parviennent au compte-gouttes via les réseaux sociaux, voici quatre comptes Instagram de photographes qui documentent la situation et partagent leur effroi avec le reste du monde.
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Aryan Musleh a lancé son compte Everyday Afghanistan il y a précisément “six ans et dix mois”. Âgé de seulement 17 ans alors, le jeune homme souhaitait montrer un visage positif de son pays et de sa population en compilant les images de photographes de sa génération. Son compte est, malheureusement, devenu plus personnel. Aryan Musleh partage son incompréhension, son effroi et sa peur au jour le jour, lorsqu’il parvient à mettre en mots la tempête d’émotions qui le secoue depuis la victoire des talibans.
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“Un jour, tu te réveilles et il pleut des missiles au-dessus de Kaboul. Photo et texte de Farshad Usyan.”
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“#LaVieDansL’Incertitude : j’écris ça avec les mains qui tremblent et le cœur lourd pour notre futur si incertain. Je n’avais jamais imaginé écrire un jour ma propre histoire sur ce compte que j’ai créé pour raconter les histoires qu’on ne dit pas et qu’on n’entend pas de mon peuple, pour montrer des images inédites de mon Afghanistan, invisibilisées par des décennies de guerre et d’instabilité. Mais c’est arrivé, et maintenant, je fais partie de cette triste histoire.
Pour la première fois de ma vie, je suis sans voix, perdu et inquiet. Pas seulement pour ce qui est à venir mais pour ce qui arrive à l’Afghanistan depuis ces dernières heures. Tout est arrivé si vite. […]
Il y a six ans et dix mois, j’ai créé cette page alors que je n’avais que 17 ans, pour jouer un rôle et changer le visage hideux du pays qui était montré sur les réseaux sociaux. Les réalités étaient mises à l’écart et je n’en pouvais plus de tous les stéréotypes et clichés. Je savais que ce serait un long chemin parce que je pouvais à peine trouver une photo montrant un côté positif du pays.
Seule une poignée de photographes partageaient leur travail et leurs histoires sur Instagram et les sources montrant un nouveau visage – plaisant et inspirant – étaient rares. Cependant, je n’ai pas laissé tomber mon rêve et ça a fini par marcher en quelque sorte. Aujourd’hui, des douzaines de jeunes hommes et femmes afghanes poursuivent le même objectif et contribuent à cette cause.
Mais depuis hier, je suis rempli d’incertitudes et d’inquiétudes quant à ce qui va arriver à tout ce qu’on est parvenus à faire jusqu’ici, et à ce qu’on allait encore faire dans les années à venir. Devons-nous suspendre notre activité quelque temps ? Mais combien de temps ? Ça pourrait durer pour toujours ! Je pouvais à peine choisir une photo du pays hier, ces photos remplies de joie et d’espoir pour un futur meilleur, meilleur que ce qui leur était arrivé. Je continuerai à écrire aussi longtemps que je le peux.”
Omer Khan a grandi à Kaboul, où il a étudié le journalisme. Son amour pour son pays l’a poussé à le traverser de long en large afin de montrer, non pas “la guerre, un visage déjà connu par la plupart des gens”, mais “la beauté et la gloire qui existent dans ce pays et que rien n’a été capable de faire disparaître”.
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Fièrement, le photographe affirme son amour pour “[son] pays et [son] peuple”. Il partage ses images sur son compte ainsi que des stories montrant le quotidien de ces derniers jours de terreur, qu’il s’agisse d’images de talibans armés ou de manifestations de femmes afghanes.
“Kaboul ces derniers jours, sous le contrôle des talibans.”
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“Des personnes réfugiées venant de Kunduz. Des centaines de personnes sont rassemblées dans un parc de Kaboul après avoir fui les combats du nord de l’Afghanistan.”
Sur son compte Instagram, Farshad Usyan partage des images prises au téléphone. Ses publications sont assorties de courtes légendes où il décrit les transformations subies par différentes zones du pays. Celui qui est passé par des études de médecine s’est consacré à la photo afin de poursuivre “la tâche de son frère, photographe de l’AFP, mort brutalement”, soulignait Polka Magazine.
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“Avec ses murs fortifiés anti-explosions, le quartier diplomatique de Wazir Akbar Khan à Kaboul était appelé ‘zone verte’, étant protégé des attaques terroristes et des talibans. Désormais, il est protégé par le réseau Haqqani, constitué de talibans.”
“La ville de Mazâr-e Charîf, un important pôle commercial au nord du pays, est tombée aux mains des talibans. Atta Mohammad Noor et Marshal Dostum auraient fui en Ouzbekistan.”
Le photojournaliste Barialai Khoshhal envisage la photographie comme un moyen de “communiquer à travers les langues et les cultures”. Son compte, nous confie-t-il, lui permet de “montrer la beauté cachée” de son pays, et de partager des informations concernant des besoins humanitaires (à l’instar de cette cagnotte destinée aux familles réfugiées de Kandahar).
Spécialisé dans le travail documentaire, le photographe de 23 ans souhaite avant toute chose “rencontrer de nouvelles personnes et raconter leur histoire afin de donner du courage et de l’espoir aux autres”.
“Regardez ce que la guerre nous a apporté ! Voici l’université de Bost, l’une des meilleures d’Afghanistan. C’était l’endroit où les jeunes générations pouvaient recevoir un enseignement supérieur. C’est déchirant de voir ces lieux académiques dans cette situation. C’était un endroit où des personnalités se formaient. Ils l’utilisent pour leurs sales guerres.
Ils ont peur de nous, de notre éducation. Ils veulent nous garder dans l’obscurité pour qu’on ne puisse pas les arrêter, ils veulent nous faire taire pour qu’on ne parle pas de leurs sales affaires, qu’on ne puisse demander nos droits fondamentaux, des droits humains. Ils veulent nous ramener à l’âge de pierre.
Aux dirigeants internationaux qui nous ont fait ça : HONTE SUR VOUS. Les photos viennent de la page de l’université de Bost. PS : le gouvernement et les talibans sont tous deux responsables de ce crime et on ne leur pardonnera jamais.”
“Je suis désespérément coincé à Kaboul avec ma famille. Comme moi, des centaines d’autres journalistes sont coincés ici. S’il vous plaît, priez pour notre sécurité.”
Nous pouvons également citer les noms d’Everyday Kabul, des photographes Kiana Hayeri, Jim Huylebroek, Fatimah Hossaini, Khyber Khan, de la journaliste Lynzy Billing ou encore du militant Omar Haidari, entre bien d’autres.
L’artiste Kubra Khademi, désormais basée en France, a récemment partagé une lettre ouverte dénonçant “l’annonce catastrophique des talibans sur l’esclavage sexuel et le nettoyage ethnique en Afghanistan”.