Au Musée du quai Branly, un scanner révèle les secrets des œuvres d’art

Publié le par Konbini arts,

© Philippe Charlier/Musée du quai Branly – Jacques Chirac

Dents, ossements, cheveux... Voilà ce qui pourrait se cacher dans les œuvres scannées au Musée du quai Branly – Jacques Chirac.

A voir aussi sur Konbini

Première mondiale : du 13 au 20 mai, le Musée du quai Branly – Jacques Chirac a accueilli un scanner portatif médical de 1,5 tonne pour une série d’examens scientifiques sur près de 150 objets d’art anciens, issus de ses collections.

Publicité

© Thibaut Chapotot

Publicité

Ce lundi 20 mai, nous avons pu assister à une séance d’imagerie médicale. Focus sur quatre objets pleins de mystères, commentés par Philippe Charlier, directeur du département de la recherche et de l’enseignement au musée.

Fétiche nkisi, figurine magique zoomorphe, XIXe siècle, bois, matériaux organiques, talisman à vertu apotropaïque. (© Philippe Charlier/Musée du quai Branly – Jacques Chirac)

Publicité

On était loin d’imaginer qu’on trouverait des conduits secrets dans cette statue congolaise ancienne. Et pourtant…

Scan du fétiche nkisi. (© Philippe Charlier/Musée du quai Branly – Jacques Chirac)

“Il y [a] des charges magiques au niveau du dos et à l’arrière du crâne, mais en plus des conduits insoupçonnés exist[ent] entre la bouche, la cavité crânienne, et la charge magique du dos, reproduisant un tube digestif ouvert de la bouche jusqu’à l’anus en passant par les intestins. Comme une reproduction de l’anatomie animale à l’intérieur de la statue. Comme si elle était ‘animée’ et que les offrandes faites dans la bouche avaient un circuit intérieur jusqu’à une émission quelques heures/jours plus tard.”

Publicité

Scan du fétiche nkisi. (© Philippe Charlier/Musée du quai Branly – Jacques Chirac)

“Chien assis portant sur le dos une charge magique, autrefois fermée par un miroir disparu.”

Boli, objet cultuel composite, Mali, avant 1910, bois, sang coagulé, perles. Lié au culte du Kono. (© Claude Germain/Musée du quai Branly – Jacques Chirac)

Publicité

“Cylindre en bois recouvert de sang coagulé, noir ; renflement cylindrique sur une face, au centre, se terminant en deux cornes ; ‘collier’ de perles jaunes au-dessus des cornes.”

Scan du boli. (© Philippe Charlier/Musée du quai Branly – Jacques Chirac)

“Sang d’animal coagulé, bois, cire, terre, fibres végétales, matériaux organiques, de 70 cm de grand-axe : probablement le type d’objet magique le plus respecté en Afrique subsaharienne, dont on ignore la constitution intérieure. De quoi est-il fait ? Quelle est sa constitution interne ?”

Publicité

Masque zoomorphe, kebul, ejumba, avant 1756. Vannerie d’écorce, cornes de bœuf, coquillages, graines d’abrus. Masque de vannerie en forme de tête de buffle, cornes (autrefois couvert de graines rouges), réalisé par les jeunes gens et portés à la sortie de l’initiation. Il représente les bœufs et le troupeau, rappelant les forces de la terre et du ciel. Coiffure de circoncis, portée lors de l’initiation “bukut”. Masque heaume en écorce tressée en larges damiers ; forme allongée avec arête centrale. Sommet surmonté de deux cornes de bœuf, deux trous circulaires pour les yeux près de l’arête centrale. Base bordée de rotin. (© Patrick Gries/Musée du quai Branly – Jacques Chirac)

“Comment est-il constitué ? Ses cornes sont-elles vides ou pleines ?”

Scan du masque zoomorphe. (© Philippe Charlier/Musée du quai Branly – Jacques Chirac)

“Sur ce masque africain connu comme étant le plus vieux, on a trouvé des traces de fragments de manuscrits arabes. […] Un papier portant des caractères arabes (amulette) était collé sur cet enduit, sous les cornes.”

Scan du masque zoomorphe. (© Philippe Charlier/quai Branly – Jacques Chirac)

“[On peut aussi voir] un enduit noir qui devait autrefois le recouvrir, des cornes de vache, une sorte de résine, peut-être même du miel, servant de liant à l’ensemble.”

Masque du Komo, début du XXe siècle, bois, peau, poils et crocs de phacochère, piquants de porc-épic. Masque casque de la société d’initiation masculine du Komo. Les femmes et les non-initiés n’ont pas le droit d’assister à la sortie de ce masque. (© Claude Germain/Musée du quai Branly – Jacques Chirac)
Scan du masque du Komo. (© Philippe Charlier/Musée du quai Branly)

“Pourvu de quatre cornes et d’un muffle pointu, recouvert d’une peau cousue avec des poils de phacochère ; de crocs de phacochère.”

Scan du masque du Komo. (© Philippe Charlier/Musée du quai Branly)

“[Les] cornes [sont] remplies de poudre et ‘médicaments’.”

Scan du masque du Komo. (© Philippe Charlier/Musée du quai Branly)
Scan du masque du Komo. (© Philippe Charlier/Musée du quai Branly)

C’est la première fois au monde qu’un scanner de ce type est utilisé pour une étude muséographique : jamais un scanner utilisé initialement dans les blocs opératoires et hôpitaux n’avait été exploité pour des biens culturels dans un musée, avant cela.

Y a-t-il des conduits intérieurs cachés dans d’autres statues ou de la terre provenant de sites sacrés nichée parmi les nombreuses sculptures analysées lors de cette opération ? Des os, bijoux, graines, dents ou cheveux peuvent-ils se trouver dans des vases anciens ? Tous les secrets que renferment des œuvres anciennes pourraient apporter de nouvelles interprétations à leur histoire.

© Thibaut Chapotot