Rencontre : Lois Bielefeld s’est fait inviter à la table de 80 familles américaines

Publié le par Lise Lanot,

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Pendant près de trois ans, la photographe Lois Bielefeld a immortalisé les petites habitudes de dizaines de familles à l’heure du dîner.

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De 2013 à 2015, la photographe américaine Lois Bielefeld a parcouru les États-Unis afin d’immortaliser des familles à l’heure du souper. Avec Weeknight Dinners, elle propose une série pleine de simplicité et d’authenticité, qui nous fait entrer dans la vie d’individus très divers sans regard voyeur ou déplacé.

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Du Wisconsin au Texas en passant par l’Illinois, New York et le Mississippi, Lois Bielefeld a parcouru le pays afin de photographier un moment-clé de la journée, le repas du soir. Elle a aussi voyagé au Luxembourg afin d’immortaliser des habitudes européennes. Entre moments de retrouvailles familiales ou de solitude devant la télé, la série est assez désarmante de sensibilité.

En capturant aussi bien des regards dirigés vers l’objectif qu’absorbés par les assiettes, la photographe parvient à nous faire entrer dans des petits moments du quotidien. Photographe du réel, Lois Bielefeld nous fait entrer dans l’intimité de ces foyers.

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Cheese | Peux-tu nous parler de ta série Weeknight Dinners (“Les dîners de la semaine”) ?

Lois Bielefeld | Tout le monde mange et a une sorte de routine du soir. Personnellement, j’ai toujours adoré la nourriture et ma famille dînait au complet tous les soirs. Déjà toute jeune, je me suis rendue compte que la nourriture rapprochait les gens et permettait d’explorer différentes cultures.

Je me suis intéressée à l’idée d’observer les habitudes des gens et leurs rituels du soir. J’ai photographié mon projet Weeknight Dinners du lundi au jeudi soir, parce que je voulais immortaliser ces routines mises en place quand on n’a pas forcément le temps de traîner. Je ne voulais pas travailler le week-end parce que les habitudes ne sont pas les mêmes, les gens sont moins pressés. J’apprécie particulièrement de travailler sous forme de séries puisque j’aime me concentrer sur les similarités et les différences entre les gens sur un sujet commun.

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Où as-tu pris ces photos ? As-tu beaucoup voyagé dans le cadre de ce projet ? 

J’ai travaillé sur le projet de 2013 à 2015, période pendant laquelle j’ai photographié 78 portraits, la majorité aux États-Unis et une quinzaine au Luxembourg. La plupart du temps, quand je commence une nouvelle série, je contacte les gens que je connais, ou des gens que j’ai déjà photographiés pour des séries précédentes. J’adore voir ce qu’est devenue la vie des gens au fil du temps, et parfois des lieux.

Puis, au fur et à mesure que le projet avance, je commence à photographier des inconnus. Ce sont parfois des inconnus sur lesquels je tombe dans la rue ou des gens que l’on me recommande. J’ai parfois trouvé des modèles grâce à des petites annonces sur des forums.

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Passes-tu beaucoup de temps avec tes modèles avant de les prendre en photo ? 

Dès qu’un modèle de “famille” accepte d’être photographié, je prévois un rendez-vous. J’essaie autant que possible de caler ce rendez-vous à l’heure où les familles dînent habituellement afin de coller à leur routine. J’arrive environ trois quarts d’heure à l’avance pour poser des questions aux gens sur ce qu’ils mangent et qui s’assoit où. Pendant que j’installe mon matériel, ils préparent leurs repas. Je m’occupe aussi de l’éclairage, même si je tente le plus possible de maintenir l’atmosphère de la lumière ambiante.

Une fois que j’ai éclairé la pièce et que la nourriture est prête, tout le monde s’installe à sa place habituelle. Le portrait fait, quelques-uns des modèles m’invitent à leur table. Ces invitations étaient particulièrement bienvenues au Luxembourg puisque vivre temporairement dans un autre pays peut être une expérience assez solitaire. Il y a quelque chose d’assez intime dans le fait de partager un repas avec quelqu’un dans sa maison – et d’autant plus quand c’est un repas qui fait partie d’une routine, et pas quelque chose de particulièrement spectaculaire.

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Tes photos ont vraiment l’air de résulter d’une expérience intime. Comment as-tu fait pour mettre les gens autant à l’aise ?

Mon projet est simple et direct. Je demande aux sujets de préparer ce qu’ils mangeraient habituellement un soir de semaine, rien qui ne sorte de l’ordinaire. Mais je ne peux pas contrôler comment les gens veulent se présenter. Certaines personnes préparaient parfois un repas sophistiqué servi dans de la vaisselle en porcelaine par exemple. Mais cela aussi est très intéressant : la façon dont les gens veulent être représentés, parfois à l’opposé de leur routine quotidienne.

Pendant que je les photographie, je fais souvent des pauses pour leur poser des questions : cuisinent-ils ? Qui cuisine ? Pourquoi mangent-ils à cet endroit en particulier ? Mangent-ils toujours ensemble ? Qui s’occupe des courses et de planifier les repas ? Je trouve que cela aide les gens à se sentir à l’aise et évite qu’ils ne se sentent figés et mal à l’aise. Je prends une trentaine d’images et remballe tout lorsqu’ils finissent leur repas.

Vous pouvez suivre Lois Bielefeld sur son compte Instagram.

Lois est représentée par la Portrait Society Gallery.