Un collectif de photoreporters part à la rencontre de passionnées du ballon rond en vue de la Coupe du monde 2019.
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Un an après la victoire des Bleus lors de la Coupe du monde masculine de football, le France accueillera en juin 2019 la Coupe du monde féminine du ballon rond. Largement moins médiatisé, le foot féminin suscite pourtant l’engouement de beaucoup de personnes à travers le monde et, au fil du temps, de plus en plus d’équipes se créent. Face à ce pan minoré du sport, le monde du foot commence doucement à réagir et à renverser la vapeur et, en cette fin 2018, la joueuse de l’Olympique lyonnais Ada Hegerberg a remporté le premier Ballon d’or féminin. Elle a profité de son discours pour transmettre un message aux petites filles du monde entier : “S’il vous plaît, croyez en vous.”
Afin de donner un coup de projecteur sur ces femmes joueuses, coaches, arbitres, journalistes et spectatrices passionnées de football, un collectif de photographes et de reporters, Huma, a décidé de partir à leur rencontre aux quatre coins de la planète, et d’en rapporter What the Foot?!, un patchwork d’images et de textes consacrés à ces femmes.
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Plus qu’un sport, un moyen de revendications et d’émancipation
De l’Allemagne à la Cisjordanie en passant par la Côte d’Ivoire, la Belgique, l’Argentine, la Chine ou le Bénin, les photographies du collectif nous font rapidement prendre conscience que, dans bien des cas, le football est bien loin de seulement représenter une pratique sportive. Pour ces femmes, les entraînements peuvent porter des revendications sociales. En Argentine, par exemple, grâce notamment à l’association Futbol militante, le foot “se fait militant quand il permet aux filles de tous milieux de se réapproprier l’espace public”, explique Huma.
Le collectif poursuit son tour du monde footballistique en racontant que certains chefs d’État accompagnent les rêves de ballon rond. En Chine, le président Xi Jinping serait fan du sport et soutiendrait la coach Quian Hui, devenue “marraine du foot féminin”, tandis qu’en Jordanie, le prince Ali soutiendrait les efforts de celles, “voilées ou non”, qui démocratisent la pratique du foot à travers tout le pays, de la capitale aux camps de réfugié·e·s. Si l’association entre femmes et football n’est pas toujours appréciée à sa juste valeur, n’oublions pas qu’elle est parfois carrément prohibée. Ainsi, rapporte Huma, en Iran des “femmes se travestissent en homme pour vivre la ferveur des gradins qui leur sont interdits”.
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Afin de faire rayonner la détermination de ces femmes qui vibrent à l’unisson pour une même pratique à des milliers de kilomètres les unes des autres, le collectif prépare une expo photo ouverte à tous ainsi que des publications (magazines et livres). Pour le moment, les photographes ont pu suivre les histoires de joueuses belges, ivoiriennes et jordaniennes. Pour partir à la rencontre de nombreuses autres footballeuses et raconter leurs histoires, les photojournalistes en question ont mis en place une cagnotte participative, ouverte jusqu’au 19 décembre 2018.
Photographe, footballeuse et membre d’Huma, Virginie Nguyen Hoang est à l’origine du projet. Après avoir photographié des compatriotes belges, elle part bientôt immortaliser des joueuses cairotes. Nous avons pu lui poser quelques questions afin de savoir où en était ce beau projet.
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Cheese | Bonjour Virginie, alors c’est bientôt le grand départ pour l’Égypte ?
Virginie Nguyen Hoang | Oui, je pars le 9 décembre en Égypte avec Valentine Van Vyve, une des rédactrices du projet. Nous y restons une semaine pour suivre une équipe de footballeuses amatrice qui joue au foot dans un quartier populaire du Caire. Elles font figure d’exception car il est très rare que les femmes égyptiennes osent pratiquer un sport en plein air au regard de tout le monde. Ce reportage se situe tout à fait dans l’optique de tout le projet, c’est-à-dire de montrer qu’à travers le football, des femmes s’affirment et proclament l’égalité des genres.
Tu as déjà effectué des reportages dans le cadre du projet ?
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Personnellement, j’ai commencé un reportage en Belgique avec Aurélie Moreau, également rédactrice du projet. Nous suivons la seule équipe entièrement féminine de “G-Voetball”, qui est la ligue de football pour les personnes handicapées mentales. Lors des matches de championnat, ces footballeuses affrontent des équipes d’hommes ou des équipes mixtes, mais c’est très rare.
Le fait d’affronter des hommes à chaque match les renforce mentalement, elles n’ont pas froid aux yeux et certainement pas peur d’affronter des hommes. Depuis le mois de septembre, nous les suivons donc à des matchs, des entraînements mais aussi chez elles, lorsqu’elles regardent des matchs de foot ensemble.
Qu’est-ce que tu aimerais transmettre avec tes photos ?
J’aimerais montrer que les femmes ont autant leur place dans le milieu footballistique que les hommes. Il y a encore trop d’inégalités entre hommes et femmes dans ce milieu et l’exemple du foot se reflète dans plein d’autres secteurs et sociétés. Ce n’est pas qu’un projet sur le foot en tant que sport, mais davantage un projet social sur l’impact de ce sport sur la vie de certaines femmes dans le monde.
J’aimerais aussi transmettre un message positif à travers l’optimisme, la dignité et l’engagement de toutes ces footballeuses, coaches, supportrices et journalistes passionnées du ballon rond. Je pense que cette envie ne vient pas que de moi mais de tous les membres de ce projet. Étant moi-même joueuse depuis 15 ans, je m’identifie à beaucoup de ces footballeuses rencontrées sur les terrains.
Tu passes beaucoup de temps avec les filles lors des reportages ?
Cela dépend des pays où je vais. En Belgique, par exemple, vu que c’est là où je suis basée, je passerai beaucoup plus de temps à suivre une fille qu’en Égypte. C’est une question de temps et de finances. Bien sûr, plus je passe de temps avec les filles, mieux c’est, mais malheureusement, il y a toujours cet aspect financier qui ne nous permet pas tout le temps de pouvoir rester longtemps dans un pays.