C’est un fait vieux de près de six ans qui a attendri les fans d’art de Twitter ce week-end. La galeriste et commissaire d’exposition Yoyo Maeght a partagé le souvenir de cartels d’exposition découverts par un gardien du Centre Pompidou en 2017. Alors qu’il observait les œuvres de l’exposition du moment, dédiée à Cy Twombly, le gardien avait repéré des étiquettes, ressemblant comme deux gouttes d’eau à celles qui accompagnent les œuvres d’art, qui décrivaient des objets anodins du musée, comme un extincteur ou une prise électrique.
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Les photos s’étaient bien vite retrouvées sur les réseaux sociaux et avaient bien fait rire autant la Toile que le Centre Pompidou, toujours prompt à célébrer, au premier comme au second degré, l’art contemporain. Au bout d’une semaine de mystères, l’auteur de ce projet amateur avait révélé son identité : il s’agirait d’un certain Cyprien Desrez, étudiant de l’école supérieure des arts et médias de Caen qui expliquait alors vouloir “faire de la place aux petites histoires”, et “donner sa place au peu, comme ces extincteurs toujours un peu oubliés, ou ces prises électriques sans cesse recouvertes de peinture blanche, comme si un jour, elles pouvaient finir par disparaître”.
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L’initiative ne visait pas à se moquer des expositions d’art contemporain mais offrait plutôt un joli clin d’œil au ready-made, ces objets du quotidien promus au rang d’œuvres d’art grâce au dessein d’un·e artiste qui se le réapproprie. Une des œuvres ready-made les plus célèbres est bien sûr la Fontaine de Marcel Duchamp. C’est parce qu’il expose un urinoir renversé, daté et signé, dans un musée que l’objet perd sa fonction première et devient œuvre d’art.
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En 2017, Cyprien Desrez proposait ainsi, grâce à une série de blagues, une question vieille comme le monde : qu’est-ce qui est de l’art, qu’est-ce qui n’en est pas et qui le décide ? Six ans plus tard, l’initiative fait toujours se gausser le petit monde de l’art contemporain.
Édit : Coup de théâtre ce mercredi 1er février où nous entrons finalement en contact avec Cyprien Desrez qui revient, en riant, sur cette affaire. L’artiste avait bien revendiqué la paternité du projet à l’époque, pourtant, il ne s’agissait pas de lui. Contacté par une journaliste après un quiproquo, il avait voulu mettre en avant les “petites histoires” de notre quotidien tout en réfutant toute idée de moquerie de l’art contemporain – “bien qu’il y ait plein de choses regrettables dans l’art contemporain, il y a aussi plein de choses chouettes”. Le véritable auteur s’est rapproché de Cyprien Desrez en 2017 mais a affirmé vouloir conserver son anonymat. L’affaire se dote donc d’une nouvelle parure, toute absurde, facétieuse et réflexive, sur le monde de l’art contemporain.