Banksy est un Midas des temps modernes. Si tout ce qu’il touche se transforme en or, cela représente une sorte de malédiction pour celui qui passe son temps à s’élever contre le capitalisme, la propriété privée, la guerre et les oppressions. Ses œuvres finissent récupérées par des marques ou grandes entreprises et se retrouvent vendues des millions pour finir dans des collections privées ou dans des musées – initiatives que le street artiste abhorre.
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D’année en année, de saison en saison, Banksy ponctue l’apparition de ses œuvres militantes de coups d’éclat qui font trembler le monde de l’art et les médias. Retour sur cinq des plus grands coups de sa carrière – des événements le plus souvent cyniques, et toujours militants.
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Quand Banksy… encourageait le vol à l’étalage
Nombreuses sont les enseignes, personnalités, maisons d’enchères, et on en passe, à tenter de surfer sur la célébrité de Banksy. Le comble réside dans le fait que c’est la dimension disruptive de l’artiste que convoquent des marques tout sauf rebelles et plutôt bien capitalistes, bien propriétaires.
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En ce mois de novembre 2022, c’est la marque Guess qui s’est “allègrement” servie d’une des œuvres de Banksy sans son consentement, dans un de ses magasins londoniens. “Ça me semble donc normal de faire comme eux et d’aller voler leurs fringues”, a déclaré le street artiste sur son compte Instagram, invitant ses abonné·e·s à voler des vêtements dans la boutique en question.
De quoi rendre la monnaie de sa pièce à Guess – en lui offrant au passage “le plus de publicité que la marque n’ait jamais eue depuis 1993”, tel que le note un·e internaute en commentaire. Banksy est habitué aux galeries et entreprises qui utilisent son image pour leur profit, et il tente sans relâche de les dénoncer auprès de ses fans. Sur son site Pest Control, il prévient les internautes qu’aucune exposition n’est de son fait et qu’aucun autre organisme que Pest Control n’a le droit de vendre ses œuvres.
Quand Banksy… sauvait des vies
En août 2020, Banksy affrétait un navire pour porter secours à des migrant·e·s en Méditerranée. Baptisé Louise Michel, du nom de l’anarchiste française du XIXe siècle, le navire décoré d’un graffiti de l’artiste britannique était parti le 18 août 2020 du port espagnol de Burriana, près de Valence, sous le commandement de Pia Klemp, une militante allemande pour les droits humains connue pour avoir conduit plusieurs autres navires de sauvetage, dont le Sea-Watch 3. “Bonjour, Pia, j’ai lu ton histoire dans les journaux. Tu as l’air d’une dure à cuire”, lui avait-il écrit dans un mail.
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Après moins de trois jours en mer, le bateau avait été obligé de lancer un appel à l’aide, dénombrant “219 survivants sur un bateau de trente mètres de long” : “33 personnes sont toujours sur un canot de sauvetage et il y a une personne décédée dans un sac mortuaire.” Les appels sont longtemps restés ignorés : six heures ont passé sans que les autorités européennes ne viennent leur porter assistance. En janvier 2022, le Louise Michel était reparti en mer, secourant cette fois une trentaine de personnes le long des côtes libyennes.
Quand Banksy… détruisait ses œuvres
Impossible de revenir sur les plus beaux coups de Banksy sans noter sa fameuse œuvre autodétruite le 5 octobre 2018. Alors qu’une de ses créations les plus connues, Girl with Balloon, venait de trouver preneuse pour la coquette somme de 1,18 million d’euros, la petite fille au ballon rouge s’était mise à trembler, gronder, jusqu’à sortir de son cadre et s’autodétruire en passant dans une broyeuse cachée des années auparavant dans la partie inférieure du cadre.
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La mise en marche de la broyeuse est survenue de façon très dramatique, juste après l’annonce du prix final et le coup de marteau du commissaire-priseur. La toile n’avait été que partiellement déchiquetée puisque le cœur rouge qui s’envole dans les airs est resté intact.
Le gros million atteint par la vente de l’œuvre constituait alors un record pour Banksy, record depuis largement dépassé par… la même œuvre. En 2021, l’œuvre déchiquetée retrouvait le parquet des chambres d’enchères et atteignait les 16 millions de livres Sterling. Sur son compte Instagram, l’artiste avait accompagné la vidéo de l’acte d’une citation de Picasso : “Tout acte de création est d’abord un acte de destruction.”
Quand Banksy… ouvrait un hôtel en Palestine
En 2017, Banksy ouvrait l’hôtel avec “la pire vue du monde”. Situé à Bethléem, le Walled Off Hotel a été “mis en place et financé par Banksy” et est désormais un “business indépendant” où “tous les profits sont réinjectés dans des projets locaux”.
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Chaque tableau, chaque élément de décoration et du menu est une référence directe à la situation dramatique vécue par la population palestinienne. Le mur d’une des chambres présente un soldat israélien et un civil palestinien en pleine bataille d’oreillers, tandis que la “salle du piano” est décorée de façon coloniale afin de rappeler la façon dont la Grande-Bretagne s’est emparée de la Palestine en 1917. “Des scones et du thé tout chauds sont servis toute la journée dans de la porcelaine, et la salade Walled Off est à essayer”, insiste le site de l’hôtel, avec cynisme.
Équipé de chambres et d’un musée, l’hôtel représente un moyen supplémentaire pour Banksy de mettre en lumière, à l’international, la situation du peuple palestinien. Sur le site de l’établissement, il indique, concernant les visas, que les touristes peuvent aller où bon leur semble, “contrairement à la majorité du peuple palestinien”.
Quand Banksy… concurrençait Mickey Mouse
En 2015, le street artiste voyait déjà les choses en grand puisqu’il ouvrait Dismaland, un parc de “stupéfaction” pas vraiment familial, sur cinq semaines. Plutôt déprimant et très cynique, le parc visait à refléter les problématiques et atrocités de notre monde moderne.
En plus de l’exposition des travaux d’une cinquantaine d’artistes, des attractions étaient proposées au public. Celle intitulée “Les bateaux de migrants” était une sorte de mare aux canards où il était impossible de sauver les barques d’enfants et adultes à la dérive. Un manège de petits chevaux rappelait les scandales alimentaires des grosses entreprises tandis qu’un camion de police trempait dans une mare radioactive transformée en aire de jeux pour enfants.
Depuis 2015, Dismaland a gardé ses portes closes. Le parc a même été démantelé, puisque ses matériaux ont été acheminés jusqu’à Calais afin d’y construire des abris pour les personnes exilées, en attente dans la ville. Parvenant à conserver son anonymat, Banksy ne garde cependant jamais trop le silence. Avec un peu de patience, nous pourrons sûrement bientôt ajouter des points à cette liste – avec des œuvres en soutien à la révolution iranienne, peut-être ?