National Geographic met en couverture une petite fille transgenre

Publié le par Donnia Ghezlane-Lala,

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En titrant “Gender Revolution” son numéro de janvier, le magazine National Geographic met en avant les personnes transgenres à travers le visage d’Avery Jackson, âgée de 9 ans.

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Après les couvertures de Vanity Fair, Time, Harper’s Bazaar, Women’s Running et Men’s Health, c’est une première pour le magazine National Geographic qui risque de rester dans les annales avec sa récente couverture du numéro de janvier 2017, déjà en kiosques : on y voit la jeune Avery Jackson, une enfant transgenre photographiée par Robin Hammond.

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Un numéro spécial consacré à la question du genre

Deux couvertures ont été pensées pour ce numéro consacré à la transidentité : une pour la “une” et une autre pour la quatrième de couverture. La première montre Avery Jackson tandis que la seconde présente un groupe de jeunes rendant compte de toute la diversité du spectre du genre (ci-dessous). C’est de la diversité dont le magazine voulait parler en abordant les problématiques culturelles, sociales, biologiques et personnelles et en mettant en avant les personnes transgenres, intersexes, non-binaires, gender fluids, androgynes et bien d’autres. La rédactrice en chef de National Geographic, Susan Goldberg, explique à NBC Out que la rédaction a décidé de prendre la parole sur le sujet en voyant l’omniprésence du débat national autour du genre :

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“Nous voulons porter un regard sur les rôles traditionnels du genre, à travers le monde, mais nous voulons aussi regarder le genre comme un spectre. L’actualité des célébrités est très couverte, mais on ne s’est jamais vraiment intéressé au quotidien de vraies personnes qui font face tous les jours à la transphobie, dans des salles de classe ou sur leur lieu de travail. National Geographic a aujourd’hui presque 130 ans, et on a eu l’habitude de parler de cultures, de sociétés, de problèmes sociaux durant toutes ces années. On s’est rendus compte en écoutant les débats nationaux et la conversation publique que le genre était au cœur de l’attention, notamment dans les médias.”

Le numéro inclut des articles comme “Dangerous Lives of Girls” (“La vie dangereuse des filles”) qui suit le quotidien de femmes de Sierra Leone, “Rethinking Gender” (“Repenser le genre”) qui examine comment la science peut aider à “naviguer dans le paysage changeant de la transidentité”, ou encore “How Today’s Toys May Be Harming Your Daughter’s Brain” (“Comment les jouets d’aujourd’hui peuvent affecter l’esprit de votre fille”). Les journalistes ont interrogé plus de 100 enfants et adolescents dans le monde entier pour recueillir des témoignages complémentaires ou différents. Goldberg précise :

“Les jeunes sont flexibles, intelligents et observateurs, ils n’ont pas de voile social. Ils vous diront facilement ce qu’ils pensent et avec une réelle réflexion sur l’état de nos sociétés. Il est compliqué d’avoir des réponses plus candides avec des adultes. On voulait vraiment comprendre comment le genre agit dans notre société, quelles sont les limites ou le manque de limites que ces jeunes pensent avoir à cause de leur genre. Il y a des tonnes de filles dans le monde qui sentent qu’elles ne sont pas traitées de la même manière que les hommes. Il est triste de voir en 2017 des filles de 9 ans, peu importe où elles habitent, vous dire qu’elles sentent leur potentiel limité.”

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… et un documentaire

Outre l’éditorial, le magazine va également sortir un documentaire de deux heures intitulé Gender Revolution: A Journey with Katie Couric et qui traitera de “tout ce qu’on a envie de savoir sur le genre mais qu’on n’a jamais osé demander”. Il sera disponible sur le site dès le 6 février 2017 mais en attendant, le média a décidé de révéler des petits teasers et infos autour du documentaire dès le 3 janvier 2017.

On sait déjà que le film comportera des interviews de parents d’enfants transgenres, de Kristina Olson (fondatrice du TransYouth Project), de Georgiann Davis (une activiste pour les personnes intersexes) et de Gavin Grimm (un homme qui défend les droits des personnes transgenres à la Cour Suprême des États-Unis pour faire en sorte qu’elles obtiennent des toilettes spécifiques). Ce film se penchera sur les gender fluids, sur la génétique, la chimie, la neurologie et la culture moderne. Katie Couric a déclaré que ce documentaire ira explorer les pourquoi du comment et les définitions de tous ces termes ainsi que de leurs nuances accompagnées d’histoires intimes de personnes transgenres :

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“Il est difficile de ne pas entendre parler de genre ces temps-ci. Dès qu’on allume notre télévision, qu’on regarde notre téléphone ou Twitter, on voit une nouvelle news où nos préjugés sur le genre et nos définitions ont des conséquences dans notre société. Je me suis lancée dans un projet pour m’éduquer moi-même, sur ces jeunes qui vivent cela tous les jours, en interrogeant leurs expériences humaines et sincères. Parce que le premier pas vers la tolérance est la compréhension.”

La rédactrice en chef espère que les lecteurs ouvriront les yeux sur ces questions de genre, apprendront des choses en assimilant tout le spectre et que ceux qui ne s’identifient pas à un genre “traditionnel” liront ce numéro et regarderont le documentaire. Elle remercie aussi tous ces enfants qui ont laissé les journalistes entrer dans leur intimité.

Avery Jackson, 9 ans

Il y a quelques années, Avery Jackson a annoncé à ses parents qu’elle voulait être une fille : “Ce qu’il y a de bien avec le fait d’être devenue une fille, c’est que je ne suis plus obligée de faire semblant d’être un garçon”, confie-t-elle à National Geographic — citation qui figure sur la couverture de ce numéro spécial. Elle commence sa transition sous les conseils des psychologues qui avertissent ses parents des conséquences du reniement : ne pas laisser un enfant s’épanouir dans le genre dans lequel il se reconnaît mène bien souvent à des suicides durant l’adolescence. Dans la vidéo ci-dessous, où Avery raconte son histoire, elle dit qu’elle aimait se déguiser avec des robes de filles alors qu’elle était à l’école primaire :

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“Cela me rendait heureuse. Quand je me déguisais en animal ou en princesse, cela ne voulait pas dire que j’étais réellement un animal ou une princesse. Mais je n’osais pas avouer à mes parents que j’aimais être une fille car j’avais peur qu’ils ne m’acceptent pas et qu’ils ne m’aiment plus. J’ai fini par leur dire car c’était trop frustrant et je ne pouvais plus contenir ça en moi. Ça me brisait le cœur de ne pas pouvoir être qui j’étais vraiment, de voir les gens me traiter comme un garçon.”

Avery a été facilement acceptée par ses amis à l’école mais pas par leurs parents qui voyaient sa transition comme une maladie contagieuse. Elle a dû quitter son école pour finir sa transition et aller dans une autre école pour se faire de nouveaux amis. Avery finit sur cette note : “Être transgenre peut être difficile mais au moins, vous pouvez être qui vous voulez.” Habituée à faire des discours publiques et à apparaître dans les médias pour partager l’histoire de sa fille, Debi Jackson déclare dans une vidéo touchante pour Listen to Your Mother : “Les gens se fient souvent à l’apparence mais s’il vous plaît, regardez le cœur. Ma fille est une fille dans son cœur. Elle le sait, Dieu le sait et c’est suffisant pour moi.” Vu les problèmes auxquels la communauté LGBTQ fait face, nous saluons cette “une” qui arrive à un moment où les mentalités doivent enfin évoluer radicalement.