Les pochoirs d’Epsylon Point, le blase de Bando, les icônes pixelisées et virales d’Invader, les collages monumentaux de JR… Depuis les années 1970, les rues de Paris évoluent au gré des graffitis, collages et œuvres de street artistes toujours plus créatif·ve·s.
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L’exposition “Capitale(s)”, visible à l’Hôtel de Ville de Paris jusqu’au 11 février 2023, rend hommage aux précurseur·se·s du mouvement et à celles et ceux qui ont contribué à façonner l’histoire du street art parisien à coups de bombes et de rouleaux. L’occasion de revenir sur cinq artistes iconiques qui ont fait des rues, des rames de métro et des façades de Paris leur terrain de jeu pour transformer la ville en œuvre d’art mouvante à ciel ouvert.
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Ernest Pignon-Ernest
Considéré comme l’un des précurseurs du street art, Ernest Pignon-Ernest évolue, à l’aube des années 1960, au sein d’une nouvelle génération d’artistes et de poètes à Nice. Dans sa pratique picturale, l’artiste s’inspire du Greco, de Francis Bacon, de l’actualité, et débute avec une première intervention au pochoir sur le plateau d’Albion, avant de juger ce procédé “trop pauvre graphiquement”.
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Ernest Pignon-Ernest se tourne alors vers la sérigraphie et le dessin au fusain, à la pierre noire et à la gomme, et aborde dans ses œuvres des sujets sociétaux et politiques à l’instar de l’avortement, l’immigration ou l’apartheid. À la nuit tombée, il colle ses dessins grandeur nature sur les murs et les cabines téléphoniques.
“Quand on intervient dans la cité, il faut avoir une grande conscience que l’on y partage de l’espace, de l’histoire, du vécu, du symbolique. Cela exige quelque chose qui est de l’ordre d’une conscience civique”, déclare l’artiste à L’Humanité en 2019. Si Ernest Pignon-Ernest transforme les rues en galeries d’art éphémères, il sait ses collages voués à disparaître et tient au caractère non figé de ses images.
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Miss.Tic
Première street artiste femme identifiée dans l’Hexagone, Radhia Novat, plus connue sous le nom de Miss.Tic, est célèbre pour ses silhouettes féminines longilignes réalisées au pochoir et les poèmes lyriques similaires à des jeux de mots qui les accompagnent. Issue du théâtre de rue, la Parisienne découvre le graffiti aux États-Unis et se laisse séduire par cet art qui s’affiche sur les murs.
Considérée comme l’une des pionnières de l’art du pochoir, elle commence à graffer en 1985, dans le quartier de la Butte Montmartre dont elle est originaire et dans le 13e arrondissement. Elle s’inspire de la sorcière Miss Tick du Journal de Mickey pour son pseudonyme. “Je me suis dit d’abord : je vais écrire des poèmes. Puis, il faut des images, avec les poèmes. J’ai commencé par des autoportraits, puis j’ai continué vers les autres femmes” raconte l’artiste à l’AFP en 2011.
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Arrêtée en 1997 pour ses pochoirs, que les autorités considéraient comme de la détérioration de biens, Miss.Tic attire l’attention de maisons de couture comme Kenzo et Louis Vuitton, qui l’approchent pour des collaborations. Décédée en mai 2022, l’artiste a marqué les rues de la capitale avec ses héroïnes féministes et teintées de mystère.
Ash
Membre du groupe des BBC (Bad Boys Crew) aux côtés de JayOne, Echo, JonOne, Skki, Ash fait partie des précurseurs du graffiti en France, et plus largement en Europe. Importé des États-Unis par Bando, le graffiti marque un tournant dans le street art, et s’inspire des lettrages et des fresques qui s’affichent dans le métro new-yorkais.
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C’est sur les palissades de travaux au Louvre et près du musée national d’art moderne, à Paris, qu’Ash commence à graffer dans les années 1980. Dès 1984, l’artiste inaugure le terrain vague de La Chapelle, où il vient graffer. Deux ans plus tard, le spot devient un lieu mythique du mouvement hip-hop, notamment avec les célèbres free jams organisées par Dee Nasty.
Si le graffiti traditionnel consiste à taguer son blase en portant une attention particulière au lettrage et au style de l’écriture, Ash et son crew revendiquent également une approche artistique. Désormais installé à Copenhague, le graffeur n’a pas seulement investi l’espace public, il a été exposé dans de nombreuses expositions et galeries.
Zevs
Enfant d’artistes, Zevs naît à Saverne et débute le graffiti à Paris dans les années 1990. L’artiste, dont le blase se prononce “Zeus”, choisit son pseudonyme par rapport au RER A “ZEUS” qui manque de le tuer en 1992, en pleine session dans un tunnel. Outre cette référence, son pseudo est également l’acronyme de “Zone d’Expérimentation Visuelle et Sonore”.
Après la création du collectif @nonymous qu’il forme avec Invader, il se détourne du graffiti traditionnel et se livre à une pratique plus conceptuelle, qui joue avec le mobilier urbain et interroge l’espace public, le lien entre l’art et le consumérisme.
Au sol et sur les murs, il peint l’ombre du mobilier urbain à la peinture réfléchissante ou à l’aérosol argenté. Dès 2001, avec ses Visual Attacks, il coule de la peinture rouge sur des mannequins et panneaux publicitaires dans différentes villes, et les “liquide” à travers son art. Il s’en prend ensuite aux logos de multinationales avec ses fameux Liquidated Logos, dont les lettres saignent de la peinture.
Kashink
Réputée pour son style graphique haut en couleur, Kashink donne vie à des monstres non genrés protéiformes à deux paires d’yeux. Originaire de la banlieue parisienne, la Française se destinait initialement à une carrière de tatoueuse, mais débarque finalement dans le milieu du street art par le biais des stickers, avant de peindre les rues de la capitale à la bombe dès le milieu des années 2000.
Inspirée du peintre et sculpteur colombien Fernard Botero, des plasticiens londoniens Gilbert et Georges ou encore de Frida Kahlo (Kashink porte la moustache), la street artiste est aussi une activiste optimiste, et milite notamment en faveur des droits LGBTQIA+. En 2012, elle entame son projet 50 Cakes of Gay dans le 10e arrondissement de la capitale, en réaction aux manifestations contre le mariage pour tous.
L’exposition “Capitale(s)” est à voir à l’Hôtel de Ville de Paris jusqu’au 11 février 2023.