Plus de 400 ans après sa création, une œuvre de la peintre Artemisia Gentileschi se voit offrir une deuxième jeunesse grâce au travail de restauration d’une équipe italienne. Le projet, intitulé Artemisia Up Close, présentera d’ici septembre 2023 des versions restaurées et numérisées d’Allégorie d’inclinaison, un nu (qui serait un autoportrait) peint par Artemisia Gentileschi vers ses 22 ans.
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Commissionnée par un membre de la famille de la peintre, l’œuvre n’avait jamais quitté le plafond de la Casa Buonarroti, où elle était accrochée depuis quatre siècles. Si Elizabeth Wicks, la conservatrice en chef du projet, a estimé que cela valait le coup de libérer le tableau de son cadre, c’est parce qu’Artemisia Gentileschi et son œuvre revêtent une modernité certaine, réactivées par les mouvements de libération des femmes et l’ère #MeToo.
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La peinture comme (re)prise du pouvoir
Allégorie d’inclinaison date de 1616. À ce moment, Artemisia Gentileschi avait quitté Rome pour Florence après avoir gagné le procès qui l’opposait à son violeur et ancien mentor artistique. Le peintre Agostino Tassi, aidé d’un autre homme, a violé l’artiste lorsqu’elle était âgée de 18 ans, alors que le duo travaillait sur des fresques. Témoin directe de cet événement traumatique, une amie d’Artemisia Gentileschi a refusé de lui porter secours.
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Pour “rétablir son honneur”, Agostino Tassi promet d’épouser Artemisia Gentileschi, promesse qu’il n’a jamais tenue et qui a convaincu le père de la jeune artiste de lui intenter un procès. Lors du procès, la peintre a dû subir un examen gynécologique pour prouver qu’elle n’était plus vierge.
“N’importe qui aurait été brisée par cette expérience. Mais Artemisia a rebondi. Elle est venue à Florence. Elle y a reçu cette merveilleuse commission d’un grand nu pour le plafond de la Casa Buonarroti. Je pense que c’est son moyen de dire aux gens : ‘Voilà ce dont je suis capable’“, analyse Elizabeth Wicks auprès du Guardian. Artemisia Gentileschi est devenue l’une des peintres les plus influentes de sa génération, travaillant pour une clientèle internationale et pour la cour du roi d’Angleterre Charles Ier à une époque où les artistes femmes étaient bien rares et négligées.
Forte de son caractère et de son art, Artemisia Gentileschi a traité de son viol dans ses œuvres, à travers les histoires d’autres femmes – à l’instar de son Judith décapitant Holopherne – ou grâce à ce nu d’une grande puissance. “Grâce à elle, on peut parler de l’importance de restaurer des œuvres et les histoires de femmes”, conclut Linda Falcone, membre du projet Artemisia Up Close. De star du XVIIe à star du XXIe siècle, il n’y a qu’un pas pour l’artiste.
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