C’est une belle archive qui nous vient de l’Ina. Un court reportage, récemment partagé sur leur compte Twitter, revient sur ce qui a inspiré le personnage obsessionnel de Nino (incarné par Mathieu Kassovitz) dans Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain.
Publicité
Dans le film de Jean-Pierre Jeunet, Nino, qui travaille à “Palace Vidéo, roi du porno” et à la Foire du Trône, est un grand collectionneur à ses heures perdues, de petites choses, de petits riens qui font le quotidien. On apprend qu’il a collecté par le passé les empreintes de pas dans le ciment et les éclats de rire étranges. Sa dernière lubie : collectionner les planches de photos abandonnées dans les photomatons du métro parisien. À plusieurs reprises, Nino apprécie gratter le sol, sous le photomaton, pour découvrir des photographies d’identité abandonnées.
Publicité
L’obsession photographique de ce personnage n’est pas le fruit de l’imagination du réalisateur français. Elle est en réalité inspirée d’une histoire réelle : celle de l’écrivain Michel Folco qui, au début des années 1980, allait à la quête des “photos laissées près des de photomatons… jusqu’au jour où il fit une drôle de découverte”, raconte l’Ina. Comme Nino, Folco a retrouvé de nombreuses photos déchirées (et pourtant parfaites) du même inconnu, pendant des mois, abandonnées dans tous les photomatons de Paris. Et c’en est devenu son obsession.
Publicité
“La première fois, je ne me suis pas inquiété, la deuxième fois, je me suis posé des questions, et la troisième fois, ça m’a vraiment intrigué. J’avais imaginé une psychose, que c’était une forme de suicide. Plutôt que de se tirer une balle dans la tête, il préférait déchirer sa photo.”
Dans l’archive de l’Ina, nous voyons l’écrivain en pleine action, guettant, dans la cabine et sur les côtés de la cabine du photomaton, des photos orphelines. Il collait ses trouvailles dans des carnets, s’interrogeant : pourquoi les gens jettent-ils donc leur propre image et leurs photos d’identité ratées ?
Publicité
Il se prend à imaginer des histoires pour chaque portrait, à imaginer les vies menées par ces personnes qui lui sont étrangères. L’enquête photographique de Folco s’est dénouée de la même manière que Nino : il s’agissait tout simplement du réparateur du photomaton parisien, testant par-ci, par-là, les machines.