En 1936, la photographe Dorothea Lange prend en photo l’emblématique “Migrant Mother”, qui devient un symbole de la Grande Dépression. Soixante-dix ans plus tard, on revient sur l’histoire de cette image.
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En 1936, l’Amérique est touchée par la Grande Dépression depuis une petite décennie et la population souffre grandement de la pauvreté latente. La photographie de Dorothea Lange, “Migrant Mother”, devient un symbole de ces années douloureuses. La chaîne YouTube Today I Found Out a publié une vidéo (ci-dessous) revenant sur l’histoire de cette photo, afin de nous en apprendre un peu plus sur cette période, mais aussi sur la vérité que dissimule toujours un peu une image.
Le journaliste raconte que la femme qui apparaît sur la photo s’appelait Florence Owens Thompson. Mère de cinq enfants et enceinte d’un sixième quand son mari, Clio Owens, meurt, elle se retrouve sur la route avec ses enfants et un nouveau compagnon. Fermiers itinérants, la famille s’apprête à aller ramasser des laitues autour de la ville de San Joaquin quand elle rencontre Dorothea Lange.
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Le compagnon de Florence était alors parti avec deux des enfants “en ville”, afin d’aller y faire réparer une vieille radio, tandis que Florence attendait, assise sur le bord de la route avec ses autres enfants, près d’un camp de migrants (qui hébergeait environ 2 500 travailleurs). La photographe tombe sur ce visage assez fermé et émacié en rentrant chez elle, après une journée passée à photographier des travailleurs autour de Los Angeles.
S’arrêtant auprès de Florence, elle la convainc de poser pour cinq photos dont “Migrant Mother”, cette image qui deviendra emblématique de cette période de restriction, tant elle illustre la souffrance et les difficultés de cette époque, mieux que de longs discours. En 1960, l’artiste racontait à Popular Photography comment elle avait été attirée “comme un aimant” par la jeune mère :
“Je ne me souviens plus comment j’ai expliqué ma présence ou mon appareil photo à cette femme, mais je me rappelle qu’elle ne m’a posé aucune question. J’ai pris cinq photos, me rapprochant toujours plus de son visage. Je ne lui ai pas demandé son nom ou son histoire. Elle m’a donné son âge, elle m’a dit qu’elle avait 32 ans. Elle m’a dit qu’elle et sa famille vivaient grâce à des légumes gelés qui se trouvaient sur les champs alentour, et grâce à des oiseaux que ses enfants tuaient.
Elle venait de vendre les pneus de sa voiture pour acheter à manger. Elle était assise là, près de sa tente, avec ses enfants amassés auprès d’elle, et elle semblait savoir que mes photos pourraient l’aider, et donc elle m’a aidée en retour. Il y avait une sorte d’égalité dans l’échange.”
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Une célébrité rejetée puis appréciée
Au début, la famille de migrants n’était pas vraiment ravie de se retrouver sous les feux des projecteurs et assure d’ailleurs qu’elle n’avait jamais souhaité se retrouver si exposée. Selon les Thompson, la photographe leur avait même promis que l’image ne serait jamais publiée. Se retrouver ainsi sur les pages de magazines fut donc une expérience plutôt humiliante et ils espéraient que personne ne les reconnaisse. De plus, l’histoire racontée par la photographe pour accompagner la photo ne correspondait pas du tout à la réalité, notamment l’histoire des pneus vendus.
Cependant, ce rejet de leur célébrité n’a duré qu’un temps puisque celle-ci a ensuite pu les aider à guérir leur mère. Florence a en effet souffert d’une crise cardiaque quelques mois plus tard et, n’ayant pas les moyens de payer les frais médicaux qui l’auraient aidée, ses enfants ont organisé une collecte, profitant de la renommée de leur “Migrant Mother”, les aidant à rassembler plus de 25 000 dollars (l’équivalent de 58 000 dollars actuels et environ 51 800 euros).
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De son côté, Dorothea Lange n’a pas gagné beaucoup d’argent grâce à cette photo connue de tous. Comme le rappelle le site PetaPixel, c’est plutôt de la notoriété que l’image lui a apporté. Si la légende n’apporte pas de véracité à l’image, la douleur et la dureté qui se lisent dans le regard de cette femme ont beaucoup à raconter. Il y a soixante-dix ans comme maintenant.