Des portraits pris en noir et blanc, teintés d’une certaine mélancolie, des portraits et encore des portraits mais que cherche Judith Joy Ross dans cette accumulation de visages de femmes et d’hommes ? Née en 1946 dans la cité minière de Hazleton, en Pennsylvanie, aux États-Unis, Judith Joy Ross est reconnue comme l’une des plus grandes portraitistes de son temps. À Paris, le Bal revient sur les portraits de Judith Joy Ross pris entre 1978 et 2015, dans une exposition monographique.
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Pour l’historienne de l’art Svetlana Alpers : “Si, à bien des égards, Judith Joy Ross pourrait être considérée comme une photographe de rue ou comme une portraitiste de studio, en réalité, sa pratique ne cadre pas avec les attendus de ces deux genres.” Judith Joy Ross choisit d’abord ses sujets, ses lieux qu’elle appelle “des occasions” : Eurana Park, la Réserve naturelle d’Eagle Rock, les visiteur·se·s du Mémorial de la guerre du Vietnam, des élu·e·s du Congrès, les enfants dans l’école publique d’Hazelton, les réservistes de l’armée états-unienne…
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“Judith Joy Ross ne déambule pas avec son appareil photo à la recherche de modèles, et n’invite personne à poser dans son studio”, poursuit Svetlana Alpers. Elle crée en quelque sorte un “studio imaginaire” entre elle et les sujets photographiés. “Toute ma vie, j’ai voulu être artiste, mais jusqu’à ce que je découvre la photographie, je ne savais pas très bien ce que ça voulait dire. Avec l’appareil photo, j’ai trouvé un moyen de me connecter au monde. Les gens sont devenus mon sujet – la vie des gens ! C’étaient des inconnus mais je pouvais à présent les connaître”, raconte la photographe.
Les connaître, prendre le temps, être photographié·e par Judith Joy Ross, c’est “une occasion rare de percevoir son ‘être au monde'”, écrit Svetlana Alpers dans le livre de l’exposition. Munie de sa chambre photographique, Judith Joy Ross parle d’une certaine affection, parfois palpable, mais qui apparaît juste le temps de la prise de vue, pour ensuite disparaître.
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Ce qui guide la photographe, c’est l’indignation, la colère face à une Amérique va-t-en-guerre, c’est porter son attention sur tous les citoyen·ne·s par-delà la fracture sociale, c’est photographier les enfants, leur insouciance, leur candeur, c’est se laisser se guider par ses envies, ses intuitions qui la mènent généralement à immortaliser les individus auxquels les photographes ne s’intéressent pas habituellement.
Dans chacun des portraits de Judith Joy Ross, on retrouve un peu d’elle et ce n’est pas un hasard pour celle qui dit à propos de ses images, qu’elles “racontent quelque chose qui fait écho à nos propres vies” : “Pourtant, ce sont bien des portraits d’inconnus. La frontière entre eux et nous se brouille. Finalement, de qui cette photographie est-elle l’histoire ? La nôtre.”
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“Judith Joy Ross – Photographies 1978 – 2015“, une exposition à voir au Bal (Paris) jusu’au 18 septembre 2022.