Si le Covid-19 génère incertitudes et peurs de faillite dans les galeries d’art, les client·e·s continuent malgré tout à les fréquenter et à acheter, recourant toutefois de plus en plus aux ventes en ligne, relèvent des galeristes interrogé·e·s par l’AFP. Ce constat rejoint celui des grandes maisons d’enchères, où les collectionneur·se·s viennent nombreux·ses et où les ventes réalisent de bons chiffres.
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“Cet été, la demande a été ferme, importante, nombreuse, assure Daniel Templon, dont la galerie internationale est implantée en Asie et en Amérique, bien meilleure que dans les crises de 1974 et 1991 où elle s’était durablement écroulée.” Selon lui, “il n’y a pas de galeries qui ont disparu”. Il ne minimise pas les risques, mais relève que le tsunami annoncé n’a pas eu lieu. Pas encore…
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La prestigieuse galeriste parisienne Catherine Obadia juge “petit” le préjudice : “On a continué de vendre en ligne et on a pu voir à la galerie tous nos collectionneurs qui n’ont pas voyagé. Ils étaient bien contents de venir nous voir, ils savaient que nous n’étions pas dans les foires.” Car les grandes foires de Bâle, de Bruxelles, de Shanghai, de Miami ou de Londres ont été annulées face au risque sanitaire. Seul “Art Paris” s’est tenue du 10 au 13 septembre au Grand Palais.
La Fiac, principal rendez-vous parisien d’art contemporain prévu en octobre, a quant à elle été annulée. Mme Obadia est philosophe : “L’un dans l’autre, on a moins de frais dans les transports, dans les foires.” L’intérêt pour les foires varie selon le profil des galeries. À la galerie historique Vallois, qui fête ses trente ans rue de Seine, 70 % du chiffre d’affaires se réalise en galerie, 30 % dans les foires, relève sa directrice Marianne Le Métayer.
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D’autres, comme Templon, comptent au contraire plus sur les foires pour leur visibilité. Une des bouées de sauvetage pour les galeries, petites et grandes, a été le recours croissant aux ventes en ligne, même si c’est contraire à leur ADN et que certaines s’y refusent.
“Je viens de vendre une toile sur WhatsApp à un collectionneur à Londres.” Florian Azzopardi, d’Afikaris, jeune galerie spécialisée dans l’art du continent africain, sur son stand à “Art Paris”, se frotte les mains. Et Jason Cori, directeur au très sélect White Cube, le confirme : proposer des photos en ligne est “l’unique moyen de continuer à faire des affaires”.
Navigation à vue
Pour l’avenir, “on navigue à vue”, répète-t-on d’une galerie à l’autre. Ce sont notamment les incertitudes sur les foires de l’hiver et du printemps, sur les dispositifs de distanciation dans les lieux clos. “Il faut souvent deux ou trois mois pour faire venir des collectionneurs, chaque arrêt brutal nous obligeant à recommencer. Une bonne rencontre, ça tient à peu de chose !”, constate Cyrille Catherin, galeriste à Francfort qui expose des artistes chinois à “Art Paris”.
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Emprunts, dettes auprès des artistes, frais de fonctionnement, loyers peuvent aussi se cumuler négativement. 166 galeries dans toute la France se sont préparées cette semaine pour “Un dimanche à la galerie”, qu’organise Marion Papillon à la tête du syndicat professionnel, le Comité professionnel des galeries d’art (GPGA).
Pour cette sixième édition, les galeristes vont expliquer leur credo aux acheteur·se·s et curieux·ses : que la galerie est un espace de rencontres et un passage incontournable pour se faire connaître et acquérir une cote. Marion Papillon en appelle aux pouvoirs publics pour soutenir les galeries, clé de voûte d’un système auquel des milliers d’emplois (encadreur·se·s, restaurateur·rice·s, commissaires, artisan·e·s, éditeur·rice·s, juristes) sont liés.
Elle leur demande de maintenir les budgets d’acquisition des musées et des Frac (Fonds régionaux d’art contemporain) et les dispositifs pour favoriser les acquisitions par les entreprises, en les élargissant aux professions libérales comme les avocats. Elle suggère aussi que des prêts à taux zéro bénéficient à l’acquisition d’œuvres.
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