L’artiste Fred Ebami revisite le pop art à travers des œuvres engagées

Publié le par Konbini avec AFP,

© Yasmine Canga-Valles/AFPTV/AFP

"Je ne suis pas ton exotisme."

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Ce n’est pas la Tomato Soup immortalisée en 1962 par le peintre américain Andy Warhol, mais bien une Pepper Soup que l’on trouve sur l’une des toiles exposées dans une galerie de Lagos par le pop artiste Fred Ebami. Soit, “cette soupe pimentée que l’on partage en famille au Cameroun et au Nigeria”, explique-t-il.

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À 45 ans, l’artiste franco-camerounais présente pour la première fois son travail dans la bouillonnante mégalopole du Nigeria, pays le plus peuplé du continent africain et rayonnante puissance culturelle. De la chanteuse Nina Simone au boxeur Mohamed Ali : ses portraits colorés, dessinés à la souris sur Photoshop et repeints à la gouache, rendent un vibrant hommage aux icônes africaines et afro-américaines.

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On y décèle immédiatement l’influence de deux grands noms du pop art, le mouvement artistique né aux États-Unis et au Royaume-Uni à la fin des années 1950 dont Fred Ebami se réclame. D’abord, celle de Roy Lichtenstein, auquel il emprunte les traits et les couleurs pour portraitiser “les icônes qui [l’]inspirent”, d’après les mots du natif de Villeneuve-la-Garenne, en région parisienne, qui était passionné de mangas et de bandes dessinées quand il était plus jeune.

La seconde influence est celle d’Andy Warhol : en quatre tableaux il décline la célébrissime boîte de conserve… À sa façon, “un peu plus pimentée”, lance en rigolant Fred Ebami, qui a grandi en partie au Cameroun, mais a aussi vécu aux États-Unis et au Royaume-Uni. “Le pop art s’inspire de la culture populaire et il est une critique de la société de consommation. Moi je veux aussi le prendre à contre-pied”, souligne-t-il.

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“Ce que je veux c’est rendre l’art accessible à tous”, affirme l’artiste. Il expose également à Brest en France, actuellement, mais il a toujours diffusé largement ses œuvres numériques sur les réseaux sociaux.

“Je ne suis pas ton exotisme”

“Je ne pas veux seulement que mon travail soit exposé dans une galerie, je veux qu’il touche un maximum de personnes”, ajoute-t-il. Cibler les masses ne l’empêche pas d’aborder des sujets davantage politiques, pour “provoquer un débat, la discussion”, dit-il.

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Comme lorsqu’en octobre 2020, alors qu’un large mouvement contre les violences policières s’empare du sud du Nigeria et est réprimé dans le sang, il réalise un portrait de la militante nigériane Aisha Yesufu qui brandit son poing en l’air, accompagné du slogan “Stop the bleeding” (“Arrêtez l’hémorragie”).

“La question des violences policières ne concerne pas que le Nigeria. On la retrouve ailleurs en Afrique, mais aussi [en Europe], aux États-Unis. Je trouvais important d’apporter mon soutien”, lâche l’artiste. Par son art, Fred Ebami veut également rendre hommage aux femmes noires qui se battent pour dénoncer les représentations stéréotypées héritées de la colonisation et qu’elles subissent encore aujourd’hui.

À Lagos, la toile qui attire le plus l’attention du public n’est pas le portrait de la militante Angela Davis, ni celle de Kanye West, vêtu du costume du dictateur zaïrois Mobutu, mais la seule qui représente un inconnu. Une femme noire, sur fond coloré, avec une inscription en lettres capitales : “NOT YOUR EXOTISM” (“Je ne suis pas ton exotisme”).

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Avec AFP.