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Pendant six mois, le photographe italien Eugenio Grosso a parcouru les terres kurdes situées au nord de l’Irak afin d’immortaliser les peshmergas, ces soldats qui combattent les troupes de Daesh depuis 2014, ainsi que leurs familles. Le photographe s’est intéressé à la diversité des cultures et des habitants.
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Le peuple kurde, apatride, tente de trouver sa place entre quatre pays, sous le nom de Kurdistan – bien qu’un tel État ne soit pas reconnu de façon internationale. En plus d’une importante diaspora qui s’étend de l’Australie aux États-Unis, en passant par les pays de l’ex-URSS et l’Europe, comme le précisaient les “Décodeurs” du journal Le Monde en 2014, le peuple kurde est “écartelé” entre l’est de la Syrie, le nord-ouest de l’Iran, l’est de la Turquie et le nord de l’Irak.
Entre combats et scènes de la vie quotidienne
Dans son livre intitulé Kurdistan Memories, Eugenio Grosso a réuni des témoignages rassemblés lors de ses six mois passés au plus près de l’intimité de ceux qui apparaissent sur ses images. Rarement sous la lumière médiatique, en dehors des coups d’éclat de leur rébellion face aux djihadistes, les Kurdes voient leur quotidien rythmé par leur inlassable combat pour préserver leur territoire contre l’organisation État islamique.
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C’est pourquoi le jeune artiste ne s’est pas seulement intéressé aux scènes de combat et de stratégie des soldats mais a aussi braqué son objectif sur des moments plus heureux, notamment des célébrations (Newroz par exemple, le Nouvel An kurde, lors du premier jour du printemps) ou des retrouvailles entre ami·e·s au café du coin. Les horreurs des combats ne sont jamais loin, puisque le photographe intègre dans ses compositions des ruines, des impacts de balle et autres traces de la lutte incessante qui se joue en arrière-plan de leur vie.
En complément de ses photographies, Eugenio Grosso a parsemé son ouvrage de morceaux choisis de son journal de bord, tenu pendant quelques mois. Les extraits permettent de remettre en contexte les images présentées et de parfois rendre plus tangibles les histoires des personnages photographiés.
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“Nous sommes arrivés à Qaraqosh tôt le matin, entre 8 et 9 heures, et nous sommes allés directement à la chapelle. Pendant l’occupation, les combattants avaient fait de ce dernier une mosquée qui leur servait aussi de baraquement. Le sol du couloir était rempli de matelas éventrés, des câbles pendaient du plafond comme des lianes dans une jungle.
Les spécialistes en explosif ont dû couper tous les câbles du système électrique ainsi que les matelas pour être sûr qu’aucun engin explosif n’avait été caché dans le bâtiment. J’ai enjambé les matelas et me suis dirigé vers un rai de lumière qui émanait de la porte d’une des chambres.
À l’intérieur de la salle rose, je me suis rendu compte que ce qui avait autrefois été une salle de classe pour les enfants du coin était devenu une chambre pour les soldats. Des traces de leur présence étaient visibles partout : des restes de nourriture, des bouteilles d’eau, des bouts de leur barbe qu’ils avaient coupée lorsqu’ils s’étaient rendu compte que leur bataille était perdue d’avance. Il y avait aussi des vêtements sur lesquels il était inscrit : ‘Soldats de l’État islamique de la Syrie et de l’Irak’.”
Au fil de ses images et de ses mots, Eugenio Grosse raconte une histoire à ses lecteurs. Une histoire malheureusement bien trop réelle qui menace et tue le Moyen-Orient.
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Kurdistan Memories d’Eugenio Grosso est disponible aux éditions Kehrer.