Documenter l’Algérie, le défi du jeune photographe prometteur Fethi Sahraoui

Publié le par Lise Lanot,

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Le photographe algérien Fethi Sahraoui immortalise son pays et ses habitants grâce à son téléphone portable, des stades aux camps du Sahara. 

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Né en 1993 en Algérie, Fethi Sahraoui est un photographe documentaire autodidacte. Passionné de cinéma, le jeune homme, qui étudie la civilisation américaine à l’université de Mascara, s’achète son premier appareil photo à 19 ans et affirme sa “quête de documenter l’Algérie”. Depuis plus d’un an, il travaille sur son premier long projet : Stadiumphilia. 

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Le photographe annonce : “Il ne s’agit pas de football, il s’agit du stade en lui-même”. Le foot est un des sports les plus populaires en Algérie et toutes les deux semaines, les équipes locales se rencontrent sur le terrain, ajoute-t-il. Les habitants, notamment les jeunes, se précipitent aux abords des stades afin de regarder les matchs. Fathi Sahraoui explique que, si la loi algérienne ne permet en théorie pas aux mineurs d’entrer à l’intérieur du stade, la pratique est toute autre et “un garçon de 14 ans peut s’acheter un ticket et entrer sans aucun contrôle”. Le jeune photographe affirme :

“En regardant attentivement ces enfants, on comprend qu’ils ne sont pas seulement là pour le football. Le stade est juste une brèche qui leur permet d’échapper aux pressions de la société.”

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Avec des clichés en noir et blanc, il immortalise les jeunes pris de ferveur aux abords et à l’intérieur des stades. Le photographe se fond dans les groupes, capte des regards intenses de face ou se fait tout petit en immortalisant certains sujets en contre-plongée. Au milieu des multitudes de visages, Fethi Sahraoui parvient à capter un regard, un sourire ou un langage corporel.

Un prix pour récompenser l’art contemporain arabe

Si Stadiumphilia est son plus long projet en cours, ce n’est pas son premier. Sa série Mercedes Island, qui présente ses images des camps sahraouis prises au Smartphone, ont tapé dans l’œil des amis de l’Institut du monde arabe, qui l’ont récompensé du prix Saima pour l’art contemporain arabe.

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Le concours, dont l’objectif est “d’œuvrer à la visibilité et à la reconnaissance de la création contemporaine arabe émergente”, proposait aux candidats de travailler autour du thème “Sahara, espaces de circulations”. C’est “l’impression d’insularité spatiale et temporelle” des images de Fethi Sahraoui que l’Institut du monde arabe a voulu récompenser.

“Ce n’est que très récemment que je me suis souvenu comment j’avais commencé à m’intéresser au monde de la photographie. C’est grâce à un hobby de mon enfance. En fouillant dans le dictionnaire des noms propres de la bibliothèque familiale, j’ai vu pour la première fois une photo de Robert Capa, Mort d’un soldat républicain, et une autre photo de Robert Doisneau. J’avais à peine 13 ans. Nourri par ma passion du 7e art, j’ai développé un grand intérêt pour la photo.”

Des photos prises à l’iPhone

C’est avec son Smartphone que le photographe a pris les images de Stadiumphilia ainsi que les photos qui lui ont permis de gagner le prix de l’IMA. Pourtant, Fethi Sahraoui nous raconte que cela n’a pas toujours été son outil de prédilection. Auparavant, il utilisait un Nikon D700, “un appareil de guerre”. Le choix d’opérer au mobile s’est produit il y a environ deux ans :

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“Ce n’était pas un choix facile, mais je me sens plus à l’aise avec mon téléphone, que ce soit pour photographier les gens ou qu’il s’agisse de ma composition, apparemment le format carré me va bien. […] J’ai commencé à l’utiliser en 2015, lors d’un workshop de quinze jours avec le photographe Bruno Boudjelal de l’agence Vu.

Au début c’était par curiosité, mais aussi parce que j’étais obligé de produire quelque chose sur place. Le résultat était assez décevant, mais après être rentré chez moi, j’ai persévéré et mon aventure avec le Smartphone a commencé.”

Le jeune homme ajoute que, de toute façon, un gros appareil photo n’aurait pas été pratique au sein du stade, “pas possible” ajoute-t-il même. Tant mieux, le résultat est d’autant plus prenant, tant il semble nous emmener au cœur des petits groupes de supporters.

Le jeune homme fait également partie du collectif 220, qui réunit sept photographes algériens issus de différentes régions du pays : “Chacun de nous a des visions différentes mais cela ne nous empêche pas de collaborer et de nous entraider.” L’horizon de la photographie algérienne semble bien prometteur.

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Vous pouvez retrouver le travail de Fethi Sahraoui sur son compte Instagram.