Révolutionnaires, pacifistes, travailleuses en grève, artistes, politiciennes, intellectuelles… Nombreuses sont celles qui, à travers les siècles, ont œuvré à l’émancipation des femmes. Au musée Carnavalet, l’exposition “Parisiennes citoyennes !”, visible jusqu’au 29 janvier 2023, met en lumière ces Parisiennes féministes, connues ou anonymes, qui ont marqué notre Histoire.
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De la Révolution française à la loi sur la parité votée en l’an 2000, retour sur cinq artistes de la capitale, leur vie, leurs luttes et leur œuvre.
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Hélène Bertaux (1825 – 1909)
Née en 1825 et formée dans sa jeunesse à la sculpture par son beau-père le sculpteur Pierre Hébert, Hélène Bertaux se distingue rapidement par ses modelages et statues. Dans un siècle qui ne laisse aux femmes qu’une place de muse ou de modèle dans les milieux artistiques, Hélène Bertaux est exposée au Salon sous le nom de son second mari.
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“Madame Léon Bertaux” y est médaillée plusieurs fois, ainsi qu’à l’Exposition universelle de 1889 où elle présente son œuvre Psyché sous l’empire du mystère qui lui vaut une médaille d’or. Au Salon toujours, Hélène Bertaux présente pour la première fois un nu masculin en 1864.
Alors que les Beaux-Arts de Paris sont interdits aux femmes, la sculptrice ouvre en 1873 un cours de modelage qui leur est réservé dans le 8e arrondissement et continue de leur faciliter l’accès aux carrières artistiques avec l’Union des femmes peintres et sculpteurs, première association du genre, qu’elle crée en 1881.
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Colette (1873 – 1954)
Initiée à l’écriture par le biais de son premier mari qu’elle rencontre adolescente, la jeune femme, originaire de Saint-Sauveur-en-Puisaye, quitte l’Yonne pour Paris. Dans la capitale, elle goûte à la liberté, adopte les cheveux courts de la mode dite “garçonne”, écrit et se livre à des performances de mime, légèrement dévêtue, dans les théâtres de la Ville. Après son divorce, Colette fréquente des hommes comme des femmes et revendique sa bisexualité, qui occupe une place centrale dans son art.
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En 1906, année de sa séparation avec son premier époux, l’une de ses représentations au Moulin Rouge avec son amante, la marquise de Belbeuf, dans laquelle les deux femmes s’embrassent, fait scandale et déclenche l’intervention du préfet de police de Paris. L’œuvre de Colette explore le genre, “ces plaisirs que l’on nomme, à la légère, physiques”, “l’être femelle” et “l’hermaphrodisme mental”.
Lili Elbe (1882 – 1931)
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C’est à l’Académie royale des beaux-arts de Copenhague qu’Einar Wegener rencontre Gerda Gottlieb, sa future épouse. Alors que Wegener doit remplacer une modèle vivante absente et prendre la pose pour Gerda Gottlieb, l’artiste peintre commence à questionner son identité de genre, à s’identifier en tant que femme et à se faire appeler Lili Elbe.
Le couple d’artistes s’installe à Paris, où Gerda Gottlieb participe aux fêtes de la vie bohème et se présente souvent comme la sœur de Lili Elbe. Cette dernière restera d’ailleurs la modèle favorite de son épouse, devenue Gerda Wegener, désormais célèbre pour ses portraits de femmes fatales. En 1930, Lili Elbe entame diverses opérations chirurgicales en Allemagne et devient la première femme trans opérée.
En 1930 toujours, la peintre fait changer son état civil pour prendre le nom de Lili Ilse Elvenes. Elle meurt un an plus tard, probablement des complications d’une greffe d’utérus réalisée quelques mois plus tôt. En parallèle de sa transition, l’artiste avait officiellement rangé toiles et pinceaux, arrêté la peinture, pratique qu’elle considérait appartenir à Einar et non à Lili.
Marie-Claude Vaillant-Couturier (1912 – 1996)
Née à Paris, Marie-Claude Vogel, surnommée Maïco, grandit dans un milieu bourgeois : son père lance La Gazette du bon ton puis le magazine Vu, et sa mère est la première rédactrice en chef du Vogue français. Après un an de cours d’Art déco en Allemagne, la Parisienne devient reporter pour Vu et documente la montée du national-socialisme aux côtés d’autres photojournalistes.
Dans le cadre de cette enquête, en 1933, Marie-Claude Vogel est la première à photographier les camps de concentration nazis. Rare femme dans un milieu masculin, elle est surnommée “la dame au Rolleiflex”. En 1936, la photographe et résistante communiste cofonde l’Union des jeunes filles de France, qui fédère de jeunes militantes communistes. Elle est arrêtée puis déportée à Auschwitz-Birkenau dans le convoi dit des 31 000.
De retour à Paris en juin 1945, elle reprend ses activités politiques et devient la présidente du Conseil international des femmes. Épouse de Paul Vaillant-Couturier en 1937, puis de Pierre Villon, elle conservera le nom de son premier mari, décédé quelques mois après leur mariage.
Sonia Rykiel (1930 – 2016)
C’est aux côtés de son mari que Sonia Rykiel, née en banlieue parisienne dans un milieu bourgeois, met un pied dans la mode. Dans la boutique de prêt-à-porter que tient son époux, la jeune femme, enceinte, échange avec le fournisseur italien pour concevoir une robe de grossesse à sa convenance qui deviendra sa première création.
Autodidacte, et donc non formatée par les écoles, la Parisienne crée sa marque en 1965, dix ans après sa grossesse. Féministe et intellectuelle, elle brode des inscriptions révolutionnaires sur ses créations, encourage les femmes à se libérer des diktats de la mode, libère leurs mouvements, et œuvre à l’image d’une Parisienne “féminine, libre, sensuelle et indépendante”.
En 1970, elle invente le concept de “démode”, soit le fait de porter un vêtement pour soi, sans se soucier des règles en vigueur dans la mode. “Le pantalon, c’est la possibilité de l’égalité entre les femmes qui ont de belles jambes et celles qui n’en ont pas”, dira la créatrice, qui a imposé son style avec du noir, des vêtements à message, de la dentelle, des rayures multicolores ou encore des finitions modernes et non conventionnelles.
“Parisiennes citoyennes ! — Engagements pour l’émancipation des femmes (1789 – 2000)” est à visiter au musée Carnavalet jusqu’au 29 janvier 2023.