Cette semaine, l’artiste Marina Abramović présente un opéra sur la mort

Publié le par Konbini avec AFP,

Un spectacle mêlant opéra, vidéo et performance, inspiré de la vie de Maria Callas.

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Elle a parcouru pendant 90 jours la muraille de Chine, est restée silencieuse durant 700 heures face au public du MoMA, s’est lacérée au nom de l’art, et, à 74 ans, la performeuse star Marina Abramović se dit encore prête à “donner 150 %” d’elle-même.

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L’icône de la performance artistique est à l’Opéra de Paris pour présenter 7 Deaths of Maria Callas, du 1er au 4 septembre 2021, un spectacle mêlant opéra, vidéo et performance, inspiré de la vie de la célèbre diva. “Si quelqu’un m’avait dit il y a vingt ans que j’allais faire un opéra, je l’aurais traité de fou”, affirme l’artiste serbe à l’AFP, au palais Garnier.

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Ce n’est pas exactement pour explorer l’art de la “Divine” que Marina Abramović s’aventure sur le terrain lyrique, elle qui a déjà collaboré avec les chorégraphes Sidi Larbi Cherkaoui et Damien Jalet dans Pelléas et Mélisande et avec le metteur en scène Bob Wilson, qui a monté The Life and Death of Marina Abramović. “J’avais 14 ans quand je l’ai entendue à la radio dans la cuisine de ma grand-mère ; j’ai pleuré tellement j’ai été touchée par la beauté de sa voix”, se souvient-elle.

© Gisela Schober/Getty Images

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“Mon travail m’a sauvée”

La papesse de l’art performatif évoque des résonances avec sa vie : une enfance malheureuse auprès d’“une mère très difficile” en ex-Yougoslavie, “une forte présence et une incroyable fragilité émotionnelle”. Mais surtout, un énorme chagrin d’amour ; celui que La Callas connut avec Onassis et, dans son cas, sa relation fusionnelle avec le performeur Ulay.

“Je souffrais tellement que je ne pouvais plus respirer ni dormir”, se rappelle-t-elle. Mais alors que la diva, abandonnée par Onassis pour Jackie Kennedy, s’éteint à Paris en 1977 à 53 ans d’un arrêt cardiaque, “mon travail à moi m’a sauvée”, dit la performeuse.

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C’est avec Ulay, décédé en 2020, qu’elle a créé ses performances les plus emblématiques : ils courent nus l’un vers l’autre pendant près d’une heure et s’entrechoquent violemment jusqu’à l’épuisement ; ils s’embrassent, également jusqu’à l’épuisement ; se tiennent face à face, lui tirant sur un arc chargé vers le cœur. The Great Wall Walk, où ils se retrouvent à mi-chemin de la Muraille de Chine avant de se dire au revoir, consacrera leur séparation en 1988.

Dans 7 Deaths of Maria Callas, elle invite sept sopranos pour chanter des airs de la diva. Sur un écran à l’arrière-scène, Abramović apparaît dans des vidéos où elle interprète “la mort” des héroïnes d’opéra, de Tosca (un saut dans le vide) à Carmen (poignardée), puis sur scène pour incarner les dernières heures de la Callas.

“Je ne regarde jamais en arrière”

“Quand je suis devenue performeuse, le théâtre était l’ennemi, on détestait ça, c’était artificiel”, confie l’artiste. Pour elle, 7 Deaths n’est pas une simple installation, n’en déplaise aux critiques.

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La critique, Marina Abramović lui fait la sourde oreille. “La performance est l’une des formes d’art les plus difficiles. Dans les années 1970, la critique était tellement féroce que si je [la] lisais, je n’aurais jamais quitté la maison”, dit-elle, rappelant que ses premières œuvres “sont aujourd’hui dans les manuels d’art”.

Des performances aussi perturbantes qu’hypnotisantes : elle a ainsi failli mourir par asphyxie lors d’une d’entre elles. A-t-elle jamais pensé être allée trop loin ? “Je dis toujours qu’il faut donner non pas 100 %, mais 150 % de soi-même. Ces 50 % en plus, c’est ça qui fait la différence.”

Son travail le plus célèbre reste The Artist Is Present (2010), au MoMA : 850 000 personnes ont participé à cette performance, partageant une minute de silence avec l’artiste, certains fondant en larmes face à elle.

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“Après cela, la performance est devenue mainstream. Dans les années 1970, quand il y a trente personnes, c’était beaucoup de monde. Aujourd’hui, sur WeTransfer, on a eu 80 millions de vues”, dit-elle en référence à sa récente collaboration avec la plateforme où elle présente la “Méthode Abramović”, qu’elle enseigne depuis trente ans.

Si “performer est de plus en plus difficile avec l’âge”, l’artiste, qui attire notamment le jeune public, ne ralentit pas. “Je ne regarde jamais en arrière”, dit-elle.

Pandémie ou pas, elle vit depuis des mois “dans une valise”, avec de nombreux projets l’emmenant aux quatre coins du monde, comme pour celui à Kiev en octobre 2020 sur un massacre de Juif·ve·s en Ukraine pendant la Seconde Guerre mondiale. “Même après cinquante ans, on me demande encore si c’est de l’art. Cette question va probablement subsister après ma mort, mais peu importe”, sourit-elle.

Avec AFP.