Pendant deux ans, Pieter Hugo s’est rendu à quatre reprises au Mexique, pour des séjours d’un mois. Éloigné de plusieurs milliers de kilomètres de son Afrique du Sud natal, il a élaboré une réflexion sur le pays visité, mais aussi une introspection sur son pays d’origine et sur des thématiques universelles telles que la mortalité et le sexe – sujets choisis par le commissaire d’exposition Francisco Berzunza, à l’origine de l’invitation du photographe.
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En voiture, Pieter Hugo a traversé le Mexique du sud au nord, sa capitale Mexico City et sa région désertique d’Hermosillo. Sur sa route, il a rencontré des personnages très différents, qu’il a tous photographiés de la même façon, qu’il s’agisse d’une petite fille à l’aube de sa première communion, d’une jeune mariée ou d’un homme demandeur d’asile.
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Sa série La Cucaracha, qui fait actuellement l’objet d’une exposition à Londres, fait référence à cette chanson entêtante d’origine espagnole, rendue populaire lors de la révolution mexicaine. Cette allusion historique est loin d’être un simple clin d’œil ; la série fourmille de symboles liés à l’histoire et aux traditions du pays.
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En ce sens, Pieter Hugo s’inspire du muralisme, genre artistique du XXe siècle, où les fresques abondaient de significations politiques, historiques et culturelles. L’iguane que tient une jeune mariée qu’il immortalise représente “la patience, la compréhension et la bienveillance”, note The Guardian.
Sur une autre image, un homme nu se couvre d’un serpent, animal double, synonyme de respect et d’admiration mais responsable de la chute de l’humanité dans le jardin d’Eden. Durant ses voyages, le photographe a fait de “l’ethos et l’esthétique particulières” du Mexique des sources d’inspiration fortes.
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“Le fabuleux du banal et la banalité de l’exotique”
“Je suis attiré par le fabuleux du banal et la banalité de l’exotique”, s’émerveille Pieter Hugo, connu pour ses portraits de groupes marginalisés en Afrique du Sud (“tels que les aveugles, les albinos et les victimes du sida”). Motivé par la volonté de se frotter à l’inconnu et à la découverte, il s’est intéressé à une dimension de la mort qu’il ne connaissait pas.
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Cette détermination à sortir de sa zone de confort provient directement de son enfance sous l’apartheid, en Afrique du Sud :
“Tout ce qu’on voyait était modifié et contrôlé, et je voulais en voir plus. Je voulais voir par moi-même. Dans la photographie, il s’agit de voir”, raconte-t-il à It’s Nice That.
Ses portraits aux couleurs contrastées présentent une lumière crue, comme marqués par l’utilisation d’un flash en plein jour. Mettant à l’honneur les sujets et les paysages qu’il photographie, ses images n’omettent pas les détails difficiles, les cicatrices, les plis de la peau ou la souffrance d’un regard.
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Pieter Hugo parvient, avec sa série, à créer un paradoxe emberlificoté : il propose un voyage aux apparences documentaires mais tout à fait subjectif qui laisse tout de même toute la place aux personnes qu’il saisit. Exposées en grand format, les images happent les spectateur·rice·s.
L’exposition “Pieter Hugo: La Cucaracha” est visible à la galerie Huxley Parlour (Londres) jusqu’au 14 mars 2020.