La galerie d’art Same, située à Tokyo, a récemment proposé à son public de “voler” les œuvres de leur choix. Une part du butin s’est cependant rapidement retrouvée sur des sites de vente aux enchères. Les organisateur·rice·s pensaient que l’événement serait plutôt confidentiel, mais l’information s’est vite propagée sur les réseaux sociaux. Au final, ce sont près de 200 personnes qui se sont pressées à l’ouverture, peu avant minuit, dans la nuit du jeudi 9 juillet au vendredi 10 juillet.
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Les “malfaiteurs” ont été si efficaces que l’exposition a été dévalisée de ses œuvres en moins de dix minutes, alors qu’elle était prévue pour durer jusqu’à dix jours. La cohue a été telle que des policiers ont été envoyés sur les lieux, avant que les organisateur·rice·s ne dissipent tout malentendu.
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Cette “exposition d’art escamotable” était une “expérimentation” censée transformer la relation entre les artistes et le public, a expliqué à l’AFP Tota Hasegawa, à l’origine du projet. Yusuke Hasada, 26 ans, a réussi à s’emparer d’un billet froissé de 10 000 yens (environ 83 euros) encadré, qui faisait partie de l’installation My Money, de l’artiste Gabin Ito.
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Arrivé une heure avant l’heure d’ouverture prévue, le jeune homme (l’un des rares à ne pas être reparti bredouille) s’était posté stratégiquement devant l’entrée de la galerie, alors que ses nombreux·ses concurrent·e·s attendaient en ordre dispersé. “Au moment où ils ont annoncé qu’ils ouvraient plus tôt, tout le monde derrière moi s’est précipité à l’intérieur. J’ai failli tomber”, a raconté à l’AFP cet Arsène Lupin d’un soir. “C’était effrayant.”
Le jeune homme assure vouloir conserver le fruit de son larcin pour décorer son appartement, mais certain·e·s avaient des intentions plus vénales : quelques heures après le casse, plusieurs objets de l’exposition étaient déjà en vente sur des sites d’enchères, à des prix atteignant parfois 100 000 yens (plus de 800 euros).
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Une foule exceptionnelle
Yuka Yamauchi, une ingénieure de 35 ans, était arrivée un quart d’heure avant minuit, juste à temps pour voir les autres repartir avec leur butin. “Il y a longtemps que j’avais vu autant de monde”, a-t-elle commenté, alors que la plupart des Tokyoïtes évitent actuellement les rassemblements, de peur d’être infecté·e·s par le coronavirus, en nette recrudescence dans la capitale japonaise.
La jeune femme a dû se contenter d’un maigre lot de consolation : une pince ayant probablement servi à accrocher l’une des œuvres. “Je l’ai trouvée par terre, alors je l’ai gardée en souvenir”, a-t-elle confié en riant.
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Le plaisir de la transgression
La possibilité de voler des objets permet d’attirer un public plus large et lui procure un certain plaisir de la transgression, analyse Minori Murata, une artiste ayant exposé des portefeuilles avec de l’argent et des cartes de crédit éparpillés.
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La société japonaise n’a pas pour habitude de braver les interdits et le pays jouit d’un taux de criminalité très faible. D’ailleurs, certain·e·s cambrioleur·se·s de l’exposition se sont comporté·e·s comme des gentle·wo·men, a estimé l’organisateur Tota Hasegawa. La preuve ? Quand l’une des personnes présentes “a perdu son sac avec son portefeuille dedans, l’objet en question a été ramassé, remis à quelqu’un de l’organisation et restitué à son propriétaire”, a-t-il souligné.