“Je n’aime pas la musique”, aurait dit Pablo Picasso. Mais une exposition inédite à Paris montre que le génie espagnol était un passionné de rythmes populaires, un explorateur minutieux d’instruments et surtout, le créateur d’une vraie musique pittoresque.
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“Il n’était pas mélomane ; a priori, il ne savait pas lire une partition, il n’avait pas besoin de la musique pour travailler comme Chagall”, Matisse ou Braque, affirme à l’AFP Cécile Godefroy, commissaire de l’exposition “Les musiques de Picasso” à la Philharmonie de Paris, qui court jusqu’au 3 janvier.
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Picasso, indéniablement mélomane
Pourtant, l’œuvre de l’artiste, l’un des plus célébrés au monde et qui a fait l’objet d’un nombre incalculable d’expositions, “regorge d’instruments, de musiciens, de danse”, dit-elle. Il y a quatre ans, cette historienne de l’art a pris pour point de départ de l’exposition cette affirmation qui semble chez lui contradictoire, ce “je n’aime pas la musique”, attribuée à Picasso par la journaliste française Hélène Parmelin dans les années 1960.
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L’exposition – retardée de cinq mois en raison du coronavirus – rassemble plus de 250 œuvres en lien avec la musique, avec entre autres des toiles comme Violon et feuille de musique, Nature morte au piano, La Femme au tambourin. On y retrouve aussi trois sculptures en terre cuite blanche représentant des joueurs de flûte et de diaule (une flûte double à deux corps provenant de l’Antiquité). Elles avaient été créées pour le jardin de sa villa “La Californie” sur la Côte d’Azur où il vécut durant les années 1950.
La mélodie de son enfance
À l’origine de cette attirance, une enfance aux côtés d’un père, José Ruiz y Blasco, passionné de flamenco. Petit, “il traînait dans les quartiers gitans de Malaga [sa ville natale, ndlr] en compagnie de son père et ça l’a beaucoup marqué”, d’après Mme Godefroy. Cela lui a surtout donné un goût pour la musique populaire, comme celle qu’il écoutera plus tard d’artistes ambulant·e·s à Barcelone, dans les corridas, le cirque et les cabarets du quartier de Montmartre, où il s’installa en 1909.
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C’est “cette musique de fond de salle, bruyante [qui] se partage, [qui] est fraternelle” que reflète Picasso dans ses premières toiles, notamment à travers la figure d’Arlequin, comme celui qui joue, le regard triste, une petite guitare dans une peinture à l’huile. Sans surprise, la guitare était son “instrument favori”, un symbole en relation avec son Espagne natale, note la commissaire. La figure du saltimbanque, qui devient une forme d’auto-représentation de l’artiste, est présente à travers son œuvre prolifique.
Les instruments collectionnés par Picasso sont exposés
L’exposition réunit pour la première fois une vingtaine d’instruments à cordes et à vent que Picasso collectionnait pour les étudier, avec une méthodologie digne d’un scientifique. Dans sa période cubiste, l’artiste, qui a vécu la majeure partie de sa vie en France, démontait des objets pour les recréer, que ce soit avec un morceau de carton ou sur une toile.
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Dans les instruments, “tout y est, même les composantes qui sont invisibles”, comme Le Violon, peinture à l’huile de 1914. Compagnon pendant près de vingt ans de la ballerine Olga Khokholova et ami de grands musiciens comme Erik Satie et Igor Stravinsky, il n’était peut-être pas mélomane mais on “voyait bien que tout ce qui représentait la musique le fascinait”, souligne la commissaire.
Musicien·ne·s et ballerines ont habité toutes ses périodes successives, y compris le néoclassique, ce qu’illustre bien le chef-d’œuvre La Flûte de Pan (1923), qui représente un adolescent jouant du syrinx auprès d’un autre dans un décor théâtral d’inspiration méditerranéenne.
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Vers la fin de sa vie, la musique se convertit en une célébration. Faunes, satyres et autres personnages mythologiques peuplent ses œuvres qui débordent d’énergie et de sensualité et font “entendre” une musique pittoresque qui fait allusion à l’univers du peintre.
“Les musiques de Picasso”, une exposition à voir à la Philharmonie de Paris, jusqu’au 3 janvier 2021.