Le 9 décembre 1968, l’ingénieur Douglas Engelbart présentait au monde les Google Docs, la souris et le clavier, les hyperliens et la recherche par mot-clé.
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Il y a 50 ans, Doug Engelbart présentait, devant 2 000 personnes, le futur informatique du siècle à venir. Et personne, à part une poignée de spécialistes des sciences informatiques alors prépubères, n’avait rien compris. Le 9 décembre 1968, Engelbart, alors chercheur à l’institut de recherche de Stanford, dévoile son innovation, baptisée oN-Line System, lors de la Fall Joint Computer Conference. La conférence est à San Francisco, le chercheur est dans son labo de Menlo Park. La keynote est retransmise par vidéoconférence.
Comment est-ce possible ? Grâce au oN-Line System, qui précède la naissance d’Internet de plus de vingt ans. Lorsque Engelbart saisit un mot sur son clavier, il apparaît simultanément (sans compter la latence de l’époque) sur les deux écrans connectés. Quand il déplace son curseur, le curseur bouge à San Francisco et à Menlo Park. Engelbart vient d’inventer simultanément Skype, Internet et Google Docs, et fait sa démo devant une assemblée aussi béate que les premiers spectateurs de L’arrivée d’un train en gare de la Ciotat en 1897.
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Le plus impressionnant, se remémore Wired, reste que pour parvenir à cette présentation de 90 minutes, l’équipe d’Engelbart est partie de zéro, ce qui signifie qu’elle a également inventé, au passage, la souris, l’écran d’ordinateur à pixels et l’interface graphique à fenêtres, qui donnera plus tard… Windows. Ah, oui, et les liens hypertexte, aussi. Bref, toute l’informatique moderne : personnelle, intuitive et immensément plus fun que de taper des suites de commandes interminables sur une machine à écrire géante.
Un nouveau paradigme de travail
Pour déployer cette magie en direct, l’équipe d’Engelbart aura dépensé l’équivalent de 90 000 dollars d’époque pour le système d’affichage, rappelle Engadget. Plus tard, le département de recherche de l’armée américaine (DARPA, anciennement ARPA) paiera 175 000 dollars (soit plus d’un million de dollars actuels) pour acquérir le prototype, qui servira de base pour le développement d’Arpanet, le grand-père de notre Internet actuel.
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Et pourtant, malgré ses contributions phénoménales au développement de l’informatique contemporaine, la keynote de Douglas Engelbart reste connue des seuls spécialistes de l’informatique. Pourquoi ? Parce qu’Engelbart lui-même, à l’époque, n’imaginait pas du tout l’avenir de la technologie comme ça.
À la fin de la démonstration, Engelbart conclut en résumant ce qu’il vient selon lui d’inventer “un système d’augmentation” permettant d’accélérer le développement de l’informatique avec pour finalité “d’augmenter l’intelligence humaine”. En d’autres termes, résumés par Wired, Engebart n’avait pas conscience de présenter une série d’améliorations matérielles et logicielles mais plutôt un nouveau paradigme de travail, qui permettrait à l’humain d’être plus efficace pour analyser un monde à la complexité croissante.
Dans sa vision systémique, ces nouveaux outils engendreraient d’autres outils plus complexes encore, et ainsi de suite, avec l’idée d’améliorer la collaboration entre humains. Cette vision optimisée, c’est celle que nous vendent aujourd’hui Google, Facebook et les autres, en mettant l’accent sur la connectivité et l’intuitivité de leurs plateformes.
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Plus rapide, plus efficace, plus simple. Quelque part, Engelbart avait donc aussi inventé le dogme favori de la Silicon Valley : le solutionnisme technologique. À la différence qu’au passage, Engelbart avait également inventé le concept d’open source, mettant toute sa recherche à disposition des chercheurs pour améliorer ses systèmes. Une idée que, 50 ans plus tard, certains ont toujours du mal à accepter.