Depuis sa création, WhatsApp s’est fait une spécialité de se placer en grand défenseur de la protection des données privées. En avril 2016, l’application — déjà connue pour la fiabilité de ses protocoles de chiffrement — déployait une encryption “end-to-end”, qui rendait les données entre utilisateurs illisibles à tous, même à ses propres services. En plein duel Apple/FBI, et alors que les dirigeants français et européens (coucou, monsieur Cazeneuve) ne cachent même plus leur aversion pour la vie privée en ligne, l’initiative avait propulsé l’application (et son milliard d’utilisateurs) en plein sur la ligne de front. Aujourd’hui, WhatsApp retourne (partiellement) sa veste.
Publicité
Selon des informations relayées par le LA Times, l’application, propriété de Facebook depuis 2014 après un rachat à 22 milliards de dollars (soit 19,5 milliards d’euros), s’apprête à transmettre au vaisseau mère de Mark Zuckerberg toute la base de données de ses utilisateurs, numéros de téléphones inclus. La mise à jour des conditions d’utilisation, annoncée le 25 août, préviendra les utilisateurs de ce transfert de données et leur laissera 30 jours pour modifier leurs paramètres de confidentialité.
Publicité
S’il sera effectivement possible de refuser — en décochant une case dans vos paramètres de compte — que ses informations soient utilisées par Facebook pour de la publicité ciblée, il ne sera en revanche pas possible, précise le Guardian, de refuser la migration des données vers Facebook. WhatsApp précise enfin que Facebook aura la gentillesse de ne pas balancer votre numéro de téléphone en ligne ou le donner en pâture à la première régie publicitaire venue. Trop aimable.
Plus de suggestions d’amis et des pubs plus précises
Pourtant, sur les nouvelles conditions d’utilisation mises en ligne par WhatsApp (la première mise à jour depuis 4 ans), il apparaît sans détour que ce partage d’informations vise à satisfaire l’appétit des diffuseurs de publicités partenaires de Facebook. “En connectant votre numéro de téléphone avec les systèmes de Facebook, ce dernier peut vous offrir de meilleures suggestions d’amis et vous montrer des publicités plus pertinentes si vous avez un compte Facebook”, écrit ainsi WhatsApp.
Publicité
L’idée est donc claire : rapprocher les entreprises des consommateurs et monétiser le service, qui est devenu entièrement gratuit depuis le 18 janvier dernier. La migration des données permettra enfin à Facebook de vous proposer plus d’amis sur la seule base de vos contacts téléphoniques… et de récupérer votre numéro de téléphone sans plus avoir à obtenir votre consentement. Pour le moment, il n’est pas prévu que le service WhatsApp fusionne avec Messenger.
Comme un VRP à votre porte
Si WhatsApp prend soin de préciser que le contenu des conversation restera bien entendu entièrement crypté et inaccessible aux yeux gourmands de son propriétaire, l’entreprise sait bien que la nouvelle risque d’agacer une bonne partie de ses utilisateurs. Pour le moment, impossible de savoir précisément comment ces publicités ciblées vont se manifester, mais voilà ce que disent les nouvelles conditions d’utilisation :
Publicité
“Nous vous autoriserons vous et les tiers, tels que des entreprises, à communiquer ensemble en utilisant WhatsApp […]. Vous pouvez recevoir des informations sur le statut d’un vol pour un voyage à venir, un reçu pour un article que vous avez acheté ou une notification concernant la date d’une livraison. Les messages que vous pourriez recevoir contenant du marketing pourrait contenir une offre pour quelque chose qui pourrait vous intéresser. Nous ne voulons pas que vous ayez une expérience de spam. Comme avec tous vos messages, vous pouvez gérer ces communications et nous honorerons vos choix.”
Voilà comment ça va se passer : Facebook vend aux régies publicitaires les données sur votre profil, vos goûts et vos comportements en ligne. Avec cette nouvelle coordination, ces entreprises de service, qui ne pouvaient jusqu’à présent vous atteindre que par le biais de bannières publicitaires, ont désormais votre numéro de téléphone pour vous joindre par SMS, littéralement, si vous ne faites rien pour l’en empêcher. Comme un démarcheur téléphonique. Ou un VRP à la porte. Pensez donc à vérifier vos paramètres de confidentialité.