Le PDG de Disney, Bob Iger, qui a fait du Royaume enchanté un empire du divertissement, va laisser sa place à la fin de l’année prochaine à Bob Chapek, qui dirige les parcs d’attractions et produits dérivés, a annoncé mardi le groupe dans un communiqué inattendu.
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La boîte aux grandes oreilles explique néanmoins dans un communiqué qu’il ne quitte pas l’entreprise pour autant :
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“Robert A. Iger prend le rôle de président exécutif. Il va diriger les initiatives artistiques de la société, présider le conseil d’administration et utiliser toute son expérience […] pour assurer une transition fluide et réussie.”
Le patron emblématique prépare son départ après le lancement réussi de la plateforme de streaming Disney+, qui représente une percée du groupe dans l’offre directe aux consommateurs par opposition à la distribution via des intermédiaires comme les cinémas et les chaînes de télévision. L’année dernière a aussi été marquée par le rachat de l’essentiel des actifs de l’ex-groupe 21st Century Fox.
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L’intéressé a déclaré lors d’une conférence téléphonique :
“Notre groupe est devenu plus complexe ces derniers mois. Mais tous les éléments sont en place, la stratégie est déployée et j’aimerais passer le plus de temps possible sur la partie créative du travail, qui devient la plus grosse priorité.”
Une décision qui inquiète
Il a également assuré aux analystes que ce changement de direction n’avait pas été précipité, et que passer le relais à Bob Chapek lui permettait “de libérer le temps nécessaire pour se concentrer sur la création”. Une déclaration surprenante, puisqu’on apprenait en 2019 son départ futur en… 2021 !
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Lors de la présentation des résultats annuels du groupe, Bob Iger s’est félicité des succès les plus récents, comme Disney+ (28,6 millions d’abonnés en moins de 3 mois) et les derniers blockbusters La Reine des Neiges II et Star Wars: L’Ascension des Skywalker, qui ont chacun dépassé le milliard de dollars de recettes.
La nouvelle n’a pas été bien accueillie par les marchés : l’action du groupe perdait 2,6 % lors des échanges électroniques après la clôture de la Bourse — même si le contexte économique joue sans doute, alors que les craintes liées à l’épidémie de nouveau coronavirus font dévisser Wall Street.
“Ce qui se passe est très grave et nous inquiète”, a déclaré Bob Iger lors d’une interview sur la chaîne américaine CNBC, en référence à la crise sanitaire qui a forcé son groupe à fermer temporairement des parcs d’attractions.
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“C’est regrettable que (notre annonce) tombe en ce moment, mais ce n’est pas quelque chose que nous pouvons contrôler. Et cela n’a absolument pas joué dans le choix de la date.”
L’héritage de Bob Iger
Champion de l’image familiale et policée de Disney, Bob Iger va continuer à superviser un groupe qu’il a largement étendu avec les acquisitions du studio d’animation Pixar en 2006 pour 7,4 milliards de dollars, de Marvel en 2009 pour 4 milliards, de Lucasfilm en 2012 pour 4 milliards et enfin de 21st Century Fox en 2019 pour 71 milliards.
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En tout, la capitalisation boursière de Disney a quintuplé (!) sous son mandat, d’après le communiqué.
Mais c’est sans doute le lancement réussi de la plateforme de streaming Disney+ (28,6 millions d’abonnés en moins de 3 mois) qui restera comme l’un des principaux accomplissements de Bob Iger.
Avec ce nouveau service, le géant des divertissements, fondé en 1923, a percé dans l’offre directe aux consommateurs par opposition à la distribution via des intermédiaires comme les cinémas et les chaînes de télévision.
Un investisseur, Matthew Ball, ancien directeur de la stratégie mondiale d’Amazon Studios, décrypte ainsi la situation à l’AFP :
“Disney+ a été un succès incroyable et immédiat. C’est peut-être l’un des pivots stratégiques les plus importants de l’histoire des entreprises […]. Cette réussite signifie que l’équipe d’Iger est complètement prête à faire prospérer cette division après son départ. C’est la marque d’un PDG hors pair.”
Bob Chapek, un pur produit de Disney
La pression qui pèse sur le remplaçant est donc particulièrement lourde. Mais il n’y a pas de raison que Chapek échoue là où Iger a réussi, puisqu’il est lui aussi un pur produit de Disney.
Employé par l’entreprise depuis 1993, Bob Chapek est passé notamment au sein de l’entreprise par le marketing, la publicité, les produits de consommation et les parcs d’attractions. Il dirigeait l’activité “Parcs, expériences et produits” depuis 2018, qui comprend 170 000 employés dans le monde.
Un autre vétéran du groupe, certes, mais qui va devoir convaincre les investisseurs de sa capacité à diriger le groupe à l’ère du streaming. Car si le lancement d’Iger est une réussite, il faudra réussir à survivre dans un milieu de plus en plus hostile, où la concurrence s’apprête à devenir encore plus rude, et où les anciens acteurs de l’industrie sont plus frileux à cette nouvelle méthode.
Disney+ a certes bâti sa popularité sur un catalogue très riche et un abonnement très peu cher, mais ce n’est que le début de la guerre du streaming entre le pionnier Netflix, les concurrents Amazon prime Video et Apple TV+. Sans compter Peacock (NBCUniversal) et HBO Max (Time Warner), qui vont débarquer au printemps.
Bob Chapek a indiqué avoir conscience des enjeux et difficultés qui l’attendent.
“Toutes nos activités, comme celles des concurrents, subissent des perturbations. Les technologies et les façons de consommer nos produits changent […]. Nous voulons garder une longueur d’avance et nous transformer de façon proactive plutôt qu’a posteriori.”
Disney et le nouveau PDG ont fait valoir que la transition était dans les tuyaux depuis plusieurs années, et que Bob Iger avait déjà commencé à préparer son successeur, choisi à l’unanimité par le conseil d’administration.
Konbini avec AFP