Et si nous redevenions élèves après nos quatre décennies de turbin obligatoires? Dans une société où l’être humain occidental passe désormais communément les 80 balais et commence à travailler de plus en plus tard, l’idée n’est pas si saugrenue. Elle émane d’ailleurs d’un rapport, pondu par l’ancien ministre danois Poul Nielson, qui tente de déterminer le futur du rapport au travail au Danemark, en Finlande, en Norvège, en Suède, aux îles Féroé, au Groenland et aux îles d’Åland – des régions et pays réunis sous la bannière du Conseil nordique, qui tente d’harmoniser leurs politiques sociétales et de dynamiser leurs échanges. La proposition numéro 7, relative à l’éducation et à la formation, propose donc “l’introduction de [cours] obligatoires pour adultes et de formation continue pour tous les travailleurs” de cette zone. Soit un retour à l’école, pendant ou après la carrière professionnelle.
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L’idée, qui remet en cause la division de l’existence occidentale moderne telle que forgée depuis un demi-siècle, dans laquelle la vie se passe – essentiellement – à bosser, part d’un constat simple : les progrès techniques et sociaux ont augmenté l’espérance de vie, et les professionnels d’aujourd’hui travaillent bien plus tard que ceux d’hier, car ils commencent, aussi, bien plus tard. Ce paradigme, explique Poul Nielson à l’EU Observer, “ne pose pas de problèmes aux élites les mieux éduquées.“ Cependant, explique-t-il, “avec un âge moyen de départ en retraite plus tardif, ceux qui s’approchent des 60-65 ans – et qui passeront encore entre cinq et dix ans sur le marché du travail – devraient se voir offrir l’opportunité de mettre à jour leurs compétences. Et cette opportunité devrait être obligatoire.”
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Dans cinquante ans, une Europe de vieux
Côté chiffres, la proposition de Poul Nielson, qui sera étudiée par les membres du Conseil nordique en novembre, semble effectivement viable. Le rapport européen sur l’évolution démographique continentale de 2015 prévoyait un triplement du nombre d’octogénaires en Europe entre 2010 et 2060, passant de 25 à 62 millions – soit à peu de choses près la population française. Entre 2001 et 2014, grâce aux taux de fécondité faibles et aux progrès de la science, l’Européen moyen a pris un coup de vieux de quatre ans, à environ 42 ans aujourd’hui.
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Enfin, selon les projections de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l’âge moyen du départ en retraite devrait continuer, inexorablement, à remonter, après plusieurs décennies de baisse. Comme l’explique Poul Nielson dans son rapport, “il est ingénu de croire que tout le monde peut être suffisamment éduqué pour jouer un rôle productif et significatif dans le marché du travail de demain”, guidé par le métronome fou du progrès technologique. Pour une immense partie de la population, il est tout simplement impossible de rester dans le coup. Aujourd’hui, précise Quartz, les seniors danois peuvent déjà assister à des cursus de “mise à jour” sur des thèmes de leur choix… sans toutefois subir la pression des examens. Si jamais la proposition de Poul Nielson venait à être adoptée et offrait aux Scandinaves une deuxième vie étudiante, les carnets de note seraient de retour. Et les soirées de fin d’année aussi ?