Lasse du harcèlement de rue qu’elle subit au quotidien, une étudiante d’Amsterdam a décidé de se prendre en selfie avec ses harceleurs pendant un mois.
Publicité
Publicité
Noa Jansma est une étudiante de 20 ans qui vit à Amsterdam. Comme des millions de femmes à travers le monde, elle subit le harcèlement de rue au quotidien, et s’est trouvée démunie devant l’ampleur du phénomène, comme le Huffington Post le rapporte.
Elle a expliqué au site Red Pers :
Publicité
“Souvent, les femmes ne savent pas répondre à un commentaire sexiste. Poursuivre sa route semble être la seule solution, mais cela n’a aucune conséquence pour les harceleurs. Parfois, je leur faisais un doigt d’honneur, mais je me sentais bête après. Je voulais faire quelque chose qui me donne du pouvoir sur eux.”
C’est après avoir été filmée et harcelée dans un train par deux jeunes qu’elle a eu l’idée de photographier les harceleurs.
“Ce n’est pas un compliment”
Il lui a fallu du temps avant d’oser faire le premier pas, mais le premier homme la harcelant dans la rue à qui elle a demandé de faire un selfie avec elle a tout de suite répondu “avec beaucoup d’enthousiasme”. Le projet était lancé : à la fin du moins d’août, Noa a ouvert un compte Instagram appelé Dear Catcallers (“chers harceleurs”). Elle y présente sa démarche :
Publicité
“Chers harceleurs, ce n’est pas un compliment.
L’objectif de ce compte Instagram est de sensibiliser à l’objectification des femmes au quotidien. Puisque beaucoup de personnes ne savent toujours pas avec quelle fréquence et dans quel contexte le harcèlement a lieu, je montrerai mes harceleurs pendant un mois entier.”
Les publications se sont ensuite enchaînées pendant le mois de septembre : on compte, au total, 24 photos la montrant au premier plan, avec une expression neutre, accompagnée en arrière-plan ou juste à côté d’un à quatre hommes, d’âges variés.
Publicité
Publicité
“Ils trouvent que ce qu’ils font est tout à fait normal”
“Après m’avoir suivie pendant au moins dix minutes : ‘Hey sexy, tu vas où ? Je peux venir avec toi ?”, “Me suivant lentement dans deux rues en criant ‘Sexy !’, puis ‘Tu veux monter dans ma voiture ?'”, “Je sais ce que je ferai avec toi, bébé”… Les légendes décrivant le harcèlement qu’elle subit contrastent avec les visages souriants et complètement décomplexés affichés par les hommes concernés.
Fait notable : en un mois, un seul des harceleurs seulement lui a demandé pourquoi elle voulait prendre un selfie avec lui.“Ils ne sont pas du tout méfiants parce qu’ils trouvent que ce qu’ils font est tout à fait normal”, remarque Noa sur le site Het Parool.
Pas étonnant donc que ces selfies ne soient qu’une partie du harcèlement subi par l’étudiante, qui ne se sentait pas toujours suffisamment en sécurité pour proposer à l’homme de faire une photo (on voit d’ailleurs que certains n’hésitent pas à la prendre par l’épaule).
D’autres fois, le harcèlement était trop succinct ou l’homme s’était éloigné trop vite. Elle n’a en outre pas osé parfois poster certains clichés parce qu’elle avait peur que le harcèlement ne soit pas suffisamment clair : “Parfois, je prends la photo, puis je la supprime plus tard, parce que ce n’était peut-être pas vraiment sexiste”, explique-t-elle.
“Montrer qu’il s’agit d’un phénomène global”
Son initiative est suivie par près de 20 000 abonné·e·s, et dans sa dernière publication du 29 septembre, Noa a annoncé qu’elle allait mettre son compte à disposition d’autres filles dans d’autres pays :
“Mon mois de posts est terminé, mais cela ne veut pas dire que les harceleurs sont également du passé. Pour montrer qu’il s’agit d’un phénomène global et que ce projet artistique ne concerne pas que moi, je vais transmettre le compte à différentes filles à travers le monde.”
La jeune femme invite également les internautes à lui envoyer leurs propres selfies, et conclut que les réactions à ses clichés ont bien montré que “le harcèlement de rue reste un événement commun auquel beaucoup d’entre nous sont confrontées”. Comme un écho à la réflexion française sur le sujet, à partir du 1er janvier 2018, le harcèlement de rue sera puni d’une amende de 190 euros à Amsterdam. Noa n’est pas convaincue que cela sera réellement applicable, mais salue la démarche : “Je pense que c’est symbolique, et je trouve ça bien.”