Publicité
Facebook, Instagram, Twitter, Snapchat et toute la cohorte d’applications sociales en ligne sont des parasites de l’attention. Le constat n’a strictement rien de nouveau, mais la littérature scientifique sur le sujet continue de grandir à mesure que l’usage de ces plateformes se démocratise aux moindres recoins de la planète. La dernière étude en date, repérée par The Verge, provient de trois chercheurs de l’Université de Pennsylvanie, qui se sont intéressés à l’impact d’une diminution de l’activité sociale en ligne sur le bien-être psychologique de 143 sujets.
Publicité
L’idée ? Faire passer aux cobayes un questionnaire pour évaluer leur bien-être psychologique, puis leur imposer un régime numérique draconien – 10 minutes par plateforme et par jour, pendant trois semaines, contrôlé par des captures d’écran des téléphones de chaque participant. Les résultats : “une diminution significative de l’anxiété et de la peur de manquer un événement (la terrible fear of missing out, ou FOMO), qui suggère un meilleur contrôle de ses émotions“, écrivent les chercheurs, qui préconisent de limiter l’activité en ligne à 30 minutes par jour pour constater de réelles améliorations. La posologie est là, encore faut-il que les utilisateurs aient l’envie (et la force mentale) de les appliquer.
La Silicon Valley doute… mais pas trop
En 2018, une partie du monde semble avoir découvert le potentiel non seulement addictif mais nocif des réseaux sociaux. Ce serait drôle si les plateformes elles-mêmes (Google, Apple, Facebook et les autres) n’avaient pas immédiatement répliqué en dévoilant un arsenal d’outils visant à… limiter le temps que leurs utilisateurs passent sur leurs produits. Il y a environ un an, Facebook publiait un texte surréaliste dans lequel il expliquait, études à l’appui, que oui, passer du temps sur le réseau social pouvait dégrader l’humeur et la santé mentale… tout en brandissant d’autres résultats expérimentaux qui prouvaient tout le contraire.
Publicité
Depuis, d’autres géants lui ont emboîté le pas dans cette politique schizophrène, qui consiste à convaincre l’opinion publique des bénéfices de l’exposition aux réseaux sociaux, tout en dévoilant des outils de gestion du temps passé en ligne (comme Snooze ou Take a Break) afin de satisfaire les militants du mouvement Time Well Spent, lancé par l’ex-ingénieur de Google Tristan Harris pour “inverser la crise de l’attention numérique“. Lancé en janvier, le mouvement est parvenu à provoquer le débat et forcer la Silicon Valley à se poser, du bout des lèvres, une question qui était encore impensable il y a quelques années : l’innovation aurait-elle des conséquences négatives sur les utilisateurs ? Pour dire, même Google s’y est mis, en dévoilant en mai dernier l’initiative Well-Being pour “aider les gens à mieux comprendre les usages de leur smartphone“, tout en faisant la promotion de son nouveau système d’exploitation Android P. On frôle la dissociation de personnalité.
Rassurons-nous, la Silicon Valley ne doute pas trop non plus. Le but affiché par les géants de la tech est toujours de connecter le plus de gens possible, et de faire en sorte que ceux, déjà équipés d’Internet, y passent un maximum de temps. Pour ces entreprises, dévoiler des outils pour contrôler son usage numérique est une merveilleuse occasion de montrer sa bonne volonté vis-à-vis des régulateurs. En sachant très bien, au fond, que l’immense majorité des utilisateurs, comme d’habitude, ne fera pas l’effort de paramétrer son téléphone pour se frustrer volontairement. Pourquoi ? Parce que les réseaux sociaux et leur architecture, bâtie sur des boucles de récompenses instantanées, fonctionnent comme un produit addictif. Tant que le produit sera disponible, aucune chance de voir le consommateur réduire son usage.
Publicité